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Les Livres

Anesthésie générale, Jerry Stahl (par Jean-Jacques Bretou)

Ecrit par Jean-Jacques Bretou , le Lundi, 19 Juin 2023. , dans Les Livres, Recensions, Polars, La Une Livres, USA, Rivages/noir

Anesthésie générale, Jerry Stahl, Rivages-Noir, janvier 2023, trad. anglais (USA) Alexis Nolent, 608 pages, 11,50 € Edition: Rivages/noir

 

Manny Rupert, ex-flic désormais à son compte, traverse une période comme il en a l’habitude, fauché, déprimé, cabossé par la vie, il est maintenant à deux doigts de se faire virer de son logement. Il lui reste cependant une minuscule planche de salut que, inconscient comme il l’est, il va emprunter pour continuer à marcher sur le fil du rasoir. Manny va se faire enfermer, à la demande « aimable » d’un client, Harry Zell, qui le coince dans un déambulateur, dans la pire des prisons de Californie, celle de San Quentin. Sa mission, animer des ateliers sur l’addiction auprès des prisonniers pour pouvoir approcher l’un deux, un vieillard de 97 ans aux limites de la schizophrénie, afin de découvrir comme il le prétend s’il est Joseph Mengele, l’Ange de la mort d’Auschwitz qui selon la version officielle serait mort noyé en se baignant dans la ville côtière de Bertioga (Brésil) le 7 février 1979. Stahl prend la direction de San Quentin avec un exemplaire de La Prison pour les nuls et un faux certificat d’État prouvant son statut d’expert patenté auprès de l’Institut Steinheim en matière d’addiction de drogue et d’alcool.

Vers le visage, Gérard Bocholier (par Didier Ayres)

Ecrit par Didier Ayres , le Lundi, 19 Juin 2023. , dans Les Livres, Les Chroniques, La Une CED, Poésie

Vers le visage, Gérard Bocholier, éditions Le Silence qui roule, avril 2023, 108 pages, 15 €

 

 

Leçon de lumière

Disons tout de suite que cette poésie, qui reste abstraite en un sens, a pour principe celui de la prière : peu de mots, principalement une écriture de l’esprit, une adresse immatérielle et une forme vive d’espérance, l’on trouve tout cela dans ce recueil de Gérard Bocholier. Le poème, comme le poète, sortent grandis car cette poésie-prière englobe la relation polymorphe de toute langue poétique – ses registres, les images et les figures de style, y sont nombreux et cohabitent dans des séquences de souvenirs, de réflexions sur le temps, un travail pour une langue spiritualisée, choses aperçues somme toute en une leçon de lumière.

L’usure d’un monde, Une traversée de l’Iran, François-Henri Désérable (par Philippe Chauché)

Ecrit par Philippe Chauché , le Vendredi, 16 Juin 2023. , dans Les Livres, Critiques, La Une Livres, Récits, Gallimard, Voyages

L’usure d’un monde, Une traversée de l’Iran, François-Henri Désérable, Gallimard, mai 2023, 160 pages, 16 € . Ecrivain(s): François-Henri Désérable Edition: Gallimard

 

« La terre craquelée, les dunes de sable, les crêtes rocheuses, l’ocre et le beige, coupés quand vient le soir d’un vert cendreux… Il faudrait être au moins Lawrence d’Arabie pour décrire le désert. J’aimerais savoir le faire. Je ne sais pas. Il doit y avoir comme ça quelques paysages seulement faits pour être vus ».

« L’agrément dans ces lents voyages en pleine terre, c’est – l’exotisme une fois dissipé – qu’on devient sensible aux détails, et par les détails, au provinces. Six mois d’hivernage ont fait de nous des Tabrizi qu’un rien suffit à étonner » (1).

L’usure d’un monde doit beaucoup au récit de Nicolas Bouvier – L’Usage du monde est devenu ma Bible – notamment celui de la traversée de l’Iran, découvert par l’écrivain à l’âge de vingt-cinq-ans, et comme lui, il va se rendre en Iran pour prendre la vraie mesure du monde, en même temps que son pouls.

Les silences d’Alexandrie, Michèle Gazier (par Patrick Abraham)

Ecrit par Patrick Abraham , le Vendredi, 16 Juin 2023. , dans Les Livres, Critiques, La Une Livres, Roman, Mercure de France

Les silences d’Alexandrie, Michèle Gazier, Mercure de France, mai 2023, 176 pages, 17,80 € Edition: Mercure de France

« L’écriture est cannibale. Je sais qu’un jour j’apparaîtrai dans un de vos romans et je détesterai l’image que vous donnerez de moi ».

Le tout récent roman de Michèle Gazier, Les silences d’Alexandrie, ne se déroule pas à Alexandrie mais à Montpellier, Paris et Marie-Galante avec un détour par l’Espagne et l’hiver canadien. On s’y promène peu dans la ville chère à Constantin Cavafy, à E.M. Forster, à Lawrence Durrell et à Alain Blottière (1). On ne découvre pas sa géographie intime. La narratrice n’y mettra jamais les pieds. Mais cette ville à la forte charge poétique comme Lisbonne, Prague ou Trieste, par l’origine supposée d’un des personnages et les énigmes qui l’entourent, est au cœur du récit et justifie son titre.

Comme dans les livres antérieurs de Michèle Gazier, il est question d’identité personnelle, de mémoire et de secrets de famille longtemps dissimulés ; il est question de transmission ; il est question du pouvoir salvateur et manipulateur des mots. Ecrire, c’est tenter d’ordonner le chaos du monde ; c’est entrer en conflit avec la loi commune faite d’oubli, d’indifférence, de vanité paresseuse ; c’est attirer le lecteur dans un piège, le compromettre, l’obliger à renoncer à son confort.

Les ébouriffés, Anne Cortey, Thomas Baas (par Yasmina Mahdi)

Ecrit par Yasmina Mahdi , le Vendredi, 16 Juin 2023. , dans Les Livres, Recensions, La Une Livres, Grasset, Jeunesse

Les ébouriffés, Anne Cortey, Thomas Baas, Grasset Jeunesse, Coll. Lecteurs en herbe, avril 2023, 32 pages, 16,90 € Edition: Grasset

La traversée des nuages

Anne Cortey (née en 1966 à Avignon, devenue auteure et illustratrice après une maîtrise d’histoire de l’art), a écrit le texte de ce bel album jeunesse que Thomas Baas (né en 1975 à Strasbourg, diplômé des Arts décoratifs de Strasbourg) a richement illustré. Le livre aux dimensions de 30x20 cm, à la couverture reliée, fort de 32 pages, se présente aux jeunes lectrices et lecteurs en format paysage, ce qui est inhabituel et donc original.

Deux couleurs prédominent, complémentaires : le vert – vert émeraude, vert olive –, et des gammes d’orange – mat ou carotte – et de rose fuchsia. Les éléments du paysage, liquides et solides, les différentes espèces animalières entourent une cabane solitaire en bordure de lac. Dès le lever, les ébouriffés, en compagnie de leur chien, court sur pattes, vont faire fi de la pluie pour s’élancer joyeusement vers la cime des arbres. Et une aventure va commencer : la traversée des nuages. Et cela de l’aube à minuit… « La tête et les bras levés vers l’océan, / les ébouriffés se tiennent debout / sur l’herbe encore humide ». Les voilà partis très loin !