Identification

La Une Livres

Le Complexe d’Eden Bellwether, Benjamin Wood (par Jean-Jacques Bretou)

Ecrit par Jean-Jacques Bretou , le Lundi, 05 Octobre 2020. , dans La Une Livres, Les Livres, Critiques, Iles britanniques, Roman, Zulma

Le Complexe d’Eden Bellwether, juin 2020, trad. Renaud Morin, 522 pages, 9,95 € . Ecrivain(s): Benjamin Wood Edition: Zulma

 

Oscar Lowe est aide-soignant à la maison de retraite Cedarbrook à Cambridge. Un soir d’octobre 2002, il rentre chez lui, à pied, après une journée de travail. Il passe devant la chapelle de King’s College et son attention est retenue par la musique puissante de l’orgue s’échappant par les portes ouvertes de la chapelle. Il pénètre dans l’église pour écouter la fin de l’office et la musique. En sortant, il fait la connaissance d’Iris Bellwether et de son frère Eden. Ces derniers étudient à Cambridge et exceptionnellement sont autorisés à loger chez leurs parents, bienfaiteurs de l’université, qui résident dans la ville de la Cam et des colleges. Une conversation a lieu entre les trois personnages. Les deux étudiants sont heureux de rencontrer quelqu’un d’« ordinaire » travaillant à la maison des glycines et Oscar apprend qu’Eden était derrière l’orgue d’où s’échappait cette musique si remarquable. C’est le début d’une « Love story » à la façon d’Erich Segal et d’un terrible thriller.

Arches du vent, et Les bois calmés, Pierre Voélin (par Jean-Paul Gavard-Perret)

Ecrit par Jean-Paul Gavard-Perret , le Lundi, 05 Octobre 2020. , dans La Une Livres, Les Livres, Critiques, Poésie, Fata Morgana

Arches du vent, et Les bois calmés, Pierre Voélin, juillet 2020, dessins Alexandre Hollan (80 pages/15 €, et 64 pages/14 €) Edition: Fata Morgana

 

En mémoire du passé

L’écriture volontairement précieuse et au rythme subtil de Pierre Voélin permet de faire comprendre comment la vie tue au nom du passé – entre autres, de la Shoah. Il s’agit alors d’avancer avec « à la bouche ce goût de solitude /et sur l’épaule un pâle chandail de cendres ». Existe ainsi dans l’œuvre une extraordinaire beauté marmoréenne : « Visage sous le masque – tombe de calcaire où vient battre la lumière criblée //L’amour impur te cherche dans les ruines », preuve que la poésie ne se tient pas hors du « claptrap » (James McNeil Whistler), et refuse l’art pour l’art. Le goût de la ruine n’est là que pour souligner les émotions et devient en quelque sorte le stimulant de la vie.

Apolline et la vallée de l’espoir, Lim Heng Swee (par Yasmina Mahdi)

Ecrit par Yasmina Mahdi , le Vendredi, 02 Octobre 2020. , dans La Une Livres, Les Livres, Critiques, Grasset, Jeunesse

Apolline et la vallée de l’espoir, Lim Heng Swee, Grasset Jeunesse, août 2020, trad. anglais, Christian Demilly, 48 pages, 15,50 € Edition: Grasset

Grand Soleil

Lim Heng Swee, originaire de Kuala Lumpur en Malaisie, est un auteur illustrateur qui a commencé par créer des paysages minimalistes où la courbe domine. S’inspirant des estampes japonaises, reprenant librement La grande vague de Kanagawa d’Hokusai, il a figuré également dans ses perspectives des chats blancs – des maneki-neko (chats porte-bonheur) – se fondant, se révélant ou se dissolvant au sommet de la houle de l’océan et des montagnes enneigées. Dans ce tout récent album, Apolline et la vallée de l’espoir, Lim Heng Swee campe l’histoire d’une petite fille solitaire habitant au fond d’une vallée, Apolline, au prénom de la martyre chrétienne d’Alexandrie, morte en 249. Une menace terrible vient assombrir l’univers pacifique de la petite semeuse et planteuse de tournesols. Ainsi, les très jeunes lecteurs vont apprendre que la particularité du tournesol, appelé Hélianthe ou Grand Soleil, plante annuelle, se trouve dans le fait qu’il se tourne le long de la journée vers le soleil, d’où son héliotropisme. Dans le langage des fleurs, en Chine, le tournesol est une nourriture d’immortalité. Le jus de sa tige apporte la sagesse.

Étrange, suivi de Onze kaddishim pour Rose, Pierre Maubé (par Philippe Leuckx)

Ecrit par Philippe Leuckx , le Vendredi, 02 Octobre 2020. , dans La Une Livres, Les Livres, Critiques, Poésie

Étrange, suivi de Onze kaddishim pour Rose, Pierre Maubé, éditions Lieux-Dits, Coll. Les Cahiers du Loup bleu, juillet 2020, 32 pages, 7 €

Dans un double mouvement, ce livre se déploie entre vie et mort, entre mal qui ronge le corps et souffrance terrible imposée brutalement à l’autre. Rose a été tuée, à 97 ans, par un terroriste dans la synagogue de Pittsburgh avec dix autres personnes, pour le seul « motif » d’être née juive : l’horreur radicale, qui remémore tous ces actes nazis et autres !

Étrange, premier volet d’une douzaine de poèmes, incise l’appréhension de la vie, de la douleur, du corps souffrant, dans le double sens du terme : prendre en compte et craindre. Le poème soulage-t-il de la dire cette douleur ressentie au plus nu ? En septains jouant de l’anaphore « étrange vie », le poète dissèque sa « douleur », « mienne » jusqu’au plus dur et incisif du mot : avec l’effort qu’il faut pour baliser la souffrance pour mieux la maîtriser, avec le « ricanement » perçu au plus profond, avec ce lot de déplaisantes manifestations du corps souffrant (vomissement, plainte, « vie maladive », ah ! cette « sœur d’abîme », sublime image d’un soi blessé au cœur de ce corps). Dans une description sans complaisance, le poète se met à la place de tout souffrant, quel qu’il soit, dont il éprouve jusqu’à l’os le malaise de vivre et la lueur qui, quoi qu’on ressente, subsiste, en dépit de tout.

Le Dormeur, Didier Da Silva (par Yann Suty)

Ecrit par Yann Suty , le Jeudi, 01 Octobre 2020. , dans La Une Livres, Les Livres, Critiques, Roman

Le Dormeur, Didier Da Silva, Marest Editeur, octobre 2020, 128 pages, 14 €

 

La réalité est parfois déroutante. C’est l’été 1974 et ils sont nombreux à se précipiter au cinéma pour aller voir Emmanuelle. Dans les salons, on discute de L’Archipel du goulag de Soljenitsyne. Valéry Giscard d’Estaing prononce son fameux « Vous n’avez pas le monopole du cœur » et remporte l’élection présidentielle. 1974 est aussi l’année de naissance du narrateur, David Da Silva lui-même. C’est également au cours de cette année qu’a été tourné un film, baptisé Le Dormeur, réalisé par un certain Pascal Aubier que Didier Da Silva découvrira quelques années plus tard. Il subira alors un choc esthétique. Il décidera d’en tirer un livre.

Le Dormeur est une adaptation du poème de Rimbaud, Le Dormeur du val, et qui consiste en un long travelling d’un peu plus de neuf minutes dans une forêt. On aperçoit un homme étendu que l’on croit vivant, mais qui ne l’est pas. Après avoir vu ces images, David Da Silva part à la recherche du réalisateur. Ce ne sera pas le début d’une longue traque car il le retrouve facilement. Les deux hommes sympathisent, Pascal Aubier se met à raconter sa vie, les gens avec lesquels il a travaillé. Tout le gratin du cinéma français d’une certaine époque y passe.