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Grasset

Les Éditions Grasset ont été successivement présidées par son fondateur, Bernard Grasset, et depuis 1955 par son neveu Bernard Privat. Parmi les premiers administrateurs figure Jean Vigneau. En1959, Grasset fusionne avec les Éditions Fasquelle, que dirigeait Jean-Claude Fasquelle depuis 1954. Il devient directeur général des éditions Grasset & Fasquelle en 1959, puis Président-directeur général en 1981. En 2000, il devient Président du conseil de surveillance et Olivier Nora lui succède en tant que Président du directoire.

Parmi les auteurs importants que Grasset a contribué à faire connaitre peuvent être cités Jean Giraudoux, ou plus récemment Pascal Quignard.

 


Ma vie et autres trahisons, Roland Jaccard

Ecrit par Matthieu Gosztola , le Vendredi, 22 Novembre 2013. , dans Grasset, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Récits

Ma vie et autres trahisons, janvier 2013, 195 pages, 16 € . Ecrivain(s): Roland Jaccard Edition: Grasset

 

Roland Jaccard donne prise dans Ma vie et autres trahisons à cette « [j]ubilation du mal-penser » qu’il évoque dans Sexe et sarcasmes (Presses universitaires de France, collection Perspectives critiques, 2009). Ce mal-penser dont il tète le sein avec délectation.

Il fait montre, à chaque page, du plus constant cynisme, et s’en défend de cette manière : « Nous ne disposons que d’une arme pour nous tirer d’embarras : le cynisme. Provisoirement, tout au moins ».

Protection, en somme. Carapace. Qui dissimule mal les traits d’un « romantique », comme le prouve ce passage : « Plus rien n’importait maintenant que la douceur complice de nos étreintes. […] [J]’éprouvais un tel bonheur à avoir une fois encore, et peut-être pour la dernière fois, perçu à travers les vibrations de son corps l’offrande de son âme […] ».

Mais le cynisme est aussi une façon de présenter la vérité telle qu’elle est, sans fard. Et cette mise à nu du réel, de ses chairs, cette lacération de ses jupons n’interdit pas une certaine délicatesse, qui se fait montre jusque dans le style de Jaccard. Car, comme le confiait Hervé Guibert sur le plateau d’Apostrophes, face à Bernard Pivot, « [i]l y a des effets de délicatesse dans la vérité, si cruelle soit-elle ».

La belle, Mathieu Terence

Ecrit par Matthieu Gosztola , le Vendredi, 15 Novembre 2013. , dans Grasset, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Roman

La belle, février 2013, 105 pages, 12,50 € . Ecrivain(s): Mathieu Terence Edition: Grasset

 

Mathieu Terence s’attache, dans le beau récit La belle (qui entretient de secrètes et plus apparentes liaisons avec son Petit éloge de la joie), à rendre compte de la façon dont il a cherché à « élucider la vie par les mots ».

Sans jamais distraire la vie, dans sa beauté, de son cours. De son élan. Musical élan.

En somme, écrire non pour seulement épouser les frémissements de la vie, mais pour, en en épousant les détails (jusque dans l’impalpable), et les inflexions sonores (jusque dans l’inaudible), parvenir à les vivre, à les vivre tels qu’ils sont, dans leur force, leur évidence. Leur mystère, aussi.

« La vie prodigue à chaque instant le miracle qui la prodigue ».

D’où les voyages, incessants, sur le dos desquels l’homme et la femme doivent se hisser – c’est la « leçon » de Terence –, pour pouvoir voir sans ciller l’horizon qu’ils portent en eux. Et dont ils ne prennent jamais soin avec suffisamment d’ardeur et de douceur mêlées.

Le quatrième mur, Sorj Chalandon (2ème critique)

Ecrit par Stéphane Bret , le Samedi, 05 Octobre 2013. , dans Grasset, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Roman, La rentrée littéraire

Le quatrième mur, août 2013, 327 pages, 19 € . Ecrivain(s): Sorj Chalandon Edition: Grasset

 

Peut-on arracher à la guerre, même très brièvement l’espace de quelques heures, des belligérants ? L’objectif apparaît chimérique, surtout lorsque le moyen employé est le théâtre.

Samuel Akounis, Juif grec né à Salonique, ayant miraculeusement échappé à la Shoah, né en 1940, n’est pourtant pas revenu de tout : il croit, avec une certaine lucidité, avec le poids de l’expérience tragique de l’histoire, aux vertus de générosité, à la force des idées. Cette fidélité, il tente de la transmettre à ses amis, à Georges, étudiant en histoire, théâtreux à ses heures, militant au Quartier Latin dans les années 70. Il incite son ami à introduire de l’intelligence dans la défense de ses convictions, à ne pas utiliser les comparaisons et slogans trop outrés et simplistes. Ainsi le morigène-t-il lorsque Georges se met à crier « CRS-SS » lors d’une manifestation : « Aloïs Brunner n’était pas là, Georges. Ni aucun autre SS. Ni leurs chiens, ni leurs fouets. Alors, ne balance plus jamais ce genre de conneries, d’accord ? ».

Immortelles, Laure Adler

Ecrit par Stéphane Bret , le Jeudi, 05 Septembre 2013. , dans Grasset, Les Livres, Recensions, La Une Livres, Roman, La rentrée littéraire

Immortelles, 5 septembre 2013, 362 pages . Ecrivain(s): Laure Adler Edition: Grasset

 

L’amitié, ce sentiment si précieux, peut nous conduire à un peu d’éternité. C’est à cette célébration que souhaite nous faire assister Laure Adler dans son roman Eternelles. C’est le récit des parcours de trois femmes, Judith, Suzanne et Florence, qui ont toutes, à différents moments de leurs vies respectives, rencontré la narratrice, l’ont marquée, influencée, façonnée dans ses choix de vie, affectifs, sociétaux.

Judith a passé son enfance en Argentine, issue d’une famille d’origine juive polonaise. Sa mère, Ethel, connaîtra la France durant la seconde guerre mondiale. Suzanne, marquée dès l’enfance par l’absence d’un père parti, dit-il, installer des filiales pour le compte d’une grande entreprise au Brésil, éprouve très tôt l’impératif de la recherche de la liberté ; elle se compare à Albertine, personnage de La Recherche du temps perdu. Elle est devenue « une fille murée ». Florence, pour sa part, cherche son salut dans les spectacles, dans le théâtre, art dont elle est éprise. Elle fréquente assidûment le festival d’Avignon, assiste aux débordements du Living Theater, à la mise en cause de Jean Vilar par des contestataires.

Le quatrième mur, Sorj Chalandon

, le Samedi, 24 Août 2013. , dans Grasset, Les Livres, Recensions, La Une Livres, Roman, La rentrée littéraire

Le quatrième mur, 21 aout 2013, 336 p. 19 € . Ecrivain(s): Sorj Chalandon Edition: Grasset

Militant d’extrême-gauche toujours prêt à en découdre dans les couloirs de la faculté avec les « rats noirs » fascistes, Georges fait un jour la connaissance de Samuel Akounis, un résistant grec à la dictature des colonels. Il est très tôt fasciné par ce personnage avec lequel il partage une véritable passion pour le théâtre. Les origines juives de Sam ne sont pas étrangères à ce sentiment. Pour l’activiste pro-Palestinien, se lier d’amitié avec un juif, c’est déjà faire l’expérience de la complexité du monde. D’ailleurs, la sagesse de Sam vient s’opposer en permanence aux jugements à l’emporte-pièces du militant. A la violence des armes, celui-ci préfère la puissance du théâtre.

Quelques années plus tard, alors que leur amitié s’est consolidée, Sam fait part à Georges du projet fou qu’il a de monter L’Antigone d’Anouilh dans Beyrouth en guerre. Un projet qu’il sait aussi dérisoire que nécessaire et qui n’aura peut-être d’autre effet que de « voler deux heures à la guerre, en prélevant dans chaque camp un fils ou une fille pour en faire des acteurs… ». Tandis que le projet est avancé, des contacts ayant été pris dans chaque camp, Samuel Akounis se voit empêché de le réaliser par un terrible cancer, séquelle de séances de tortures subies du temps des colonels. Il charge alors son ami Georges de mener à bien cette mission et lui fait promettre qu’il ira jusqu’au bout. Georges, laissant pour plusieurs mois son épouse, Aurore, et leur bébé, Louise, part au Liban.