Ma vie et autres trahisons, Roland Jaccard
Ma vie et autres trahisons, janvier 2013, 195 pages, 16 €
Ecrivain(s): Roland Jaccard Edition: Grasset
Roland Jaccard donne prise dans Ma vie et autres trahisons à cette « [j]ubilation du mal-penser » qu’il évoque dans Sexe et sarcasmes (Presses universitaires de France, collection Perspectives critiques, 2009). Ce mal-penser dont il tète le sein avec délectation.
Il fait montre, à chaque page, du plus constant cynisme, et s’en défend de cette manière : « Nous ne disposons que d’une arme pour nous tirer d’embarras : le cynisme. Provisoirement, tout au moins ».
Protection, en somme. Carapace. Qui dissimule mal les traits d’un « romantique », comme le prouve ce passage : « Plus rien n’importait maintenant que la douceur complice de nos étreintes. […] [J]’éprouvais un tel bonheur à avoir une fois encore, et peut-être pour la dernière fois, perçu à travers les vibrations de son corps l’offrande de son âme […] ».
Mais le cynisme est aussi une façon de présenter la vérité telle qu’elle est, sans fard. Et cette mise à nu du réel, de ses chairs, cette lacération de ses jupons n’interdit pas une certaine délicatesse, qui se fait montre jusque dans le style de Jaccard. Car, comme le confiait Hervé Guibert sur le plateau d’Apostrophes, face à Bernard Pivot, « [i]l y a des effets de délicatesse dans la vérité, si cruelle soit-elle ».
Se dessine, au fil des pages de Ma vie et autres trahisons, la confession d’un homme fasciné par « [l]a féminité comme mascarade » (Sexe et sarcasmes), dont les lolitas sont l’incarnation la plus précise, un homme qui, au travers du prisme coupant des phrases, crie la nécessité qu’il y a à être soi-même, quitte à faire de très nombreuses erreurs (et c’est tant mieux), sans vouloir être selon une direction qui nous rendrait – le pense-t-on (plus ou moins confusément) – digne d’amour : « Vient toujours dans la vie d’un homme un moment où il comprend que ce qu’il doit vivre, c’est sa vie et non celle que ses parents ou ses proches ont voulue pour lui ».
Matthieu Gosztola
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