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Folio (Gallimard)

Collection de poche des éditions Gallimard

 


La gouvernante suédoise, Marie Sizun (par Philippe Leuckx)

Ecrit par Philippe Leuckx , le Vendredi, 05 Octobre 2018. , dans Folio (Gallimard), Les Livres, Critiques, La Une Livres, Roman

La gouvernante suédoise, mai 2018, 320 pages, 7,80 € . Ecrivain(s): Marie Sizun Edition: Folio (Gallimard)

 

Voilà bien un roman, style saga familiale, plein de rebondissements, à l’intrigue noueuse comme un « nœud » narratif, le style même d’un bon livre romanesque d’été, si l’auteur n’avait puisé à sa propre histoire pour en donner une matière quasi fictionnelle. On ne révélera rien de la chute – digne de romans à l’eau-de-rose, alors que c’est pure réalité historique.

La narratrice conte ainsi les histoires de sa famille, d’origines suédoise et française, doublement scandinave (le lecteur s’en rendra compte s’il lit jusqu’au bout). On est dans les années 1867-1868 lorsque démarre l’intrigue. Nous nous contenterons de dire qu’un émigré français, devenu professeur de sa langue à Göteborg, fait la rencontre décisive de sa future femme, qui lui donnera cinq enfants. La narratrice descend de ce Léonard et de sa femme Hulda. Il s’agira pour le couple d’engager très vite une gouvernante, Livia (Olivia), suédoise, d’où le titre.

Marguerite Duras, Romane Fostier (par Jean-Paul Gavard-Perret)

Ecrit par Jean-Paul Gavard-Perret , le Mercredi, 19 Septembre 2018. , dans Folio (Gallimard), Les Livres, Critiques, La Une Livres, Biographie

Marguerite Duras, septembre 2018, 304 pages, 9,40 € . Ecrivain(s): Romane Fostier Edition: Folio (Gallimard)

 

Les Incursions secrètes de Duras

Dans l’œuvre de Duras chaque mot est une incantation – celui qui appelle l’esprit le fait apparaître – et l’auteure fit jaillir des lieux secrets contre lesquels on se penche, au bord de rien. Il y a là des nids d’errance, des espaces de repli qui sont comme des angles morts du monde à l’intérieur de soi.

Et Romane Fostier en remonte l’histoire à travers celle de Duras – de l’enfance rebelle en Indochine jusqu’à sa retraite à Neauphle-le-Château. Pas de scoop dans cette biographie mais cette façon de montrer comment les bourgeons portent des écailles pour renvoyer la lumière en éclats. Le chemin de Duras est un espace aux lisières presque closes, une sorte d’utopie dont l’accès est blotti derrière des paupières où se cachent bien des douleurs.

La biographe les pénètre pour montrer comment la romancière et cinéaste sut lâcher les freins, fendre l’œuf du monde, s’inclure dans l’élan jusqu’à pulvériser les restrictions du regard, accueillir l’éperdu dans la chambre flottante de l’esprit rebelle et acéré.

Les Larmes, Pascal Quignard (par Philippe Leuckx)

Ecrit par Philippe Leuckx , le Vendredi, 14 Septembre 2018. , dans Folio (Gallimard), Les Livres, Critiques, Essais, La Une Livres, Roman

. Ecrivain(s): Pascal Quignard Edition: Folio (Gallimard)

 

Le grand érudit latiniste, féru d’histoire romaine, grecque, franque, le romaniste averti se fait mémorialiste des temps carolingiens dans ce « roman », pétri d’histoire, de culture, de références, et d’invention de son lot. L’écriture, reconnaissable dès les premiers paragraphes, allie une poésie corsetée, une description ascétique des corps et des âmes, une vision « historique » par son lexique, ses exigences. Le phrasé est coupé court (il évoquera bien sûr dans son récit romanesque la « Cantilène de Sainte Eulalie » dont il fallut couper le cou puisque les flammes n’érodaient nullement son corps. De son cou s’éleva une colombe). On retrouve ce style si particulier que Terrasse à RomeCarusLes Escaliers de ChambordBoutèsAbîmesLes Solidarités mystérieusesLe Nom sur le bout de la langueLes Ombres errantesVilla AmaliaSur le jadis, dans des registres différents, ont mis en exergue.

Le règne de Charlemagne et de ses descendants directs (surtout deux petits-fils jumeaux non reconnus comme légitimes, fils de Bertha, sa fille, …) occupe l’espace temporel (des années 777 à 843 : l’occasion donnée à notre écrivain d’évoquer les séquences d’Eulalie, les fameux serments de Strasbourg, et cette Europe, déjà morcelée alors, toujours vaillante et déchirée).

Hommage à Philip Roth (5) : Le rabaissement

Ecrit par Léon-Marc Levy , le Jeudi, 28 Juin 2018. , dans Folio (Gallimard), Les Livres, Critiques, La Une Livres, USA, Roman

Le rabaissement (The humbling), trad. de l'anglais (USA) par Marie-Claire Pasquier, décembre 2011, 122 p. 13,90 € . Ecrivain(s): Philip Roth Edition: Folio (Gallimard)

 

Un livre de Philip Roth n’est jamais un livre parmi ses autres livres. C’est un polygone de plus dans la toile tissée par le maître, une pièce de plus placée dans le puzzle – l’unique puzzle – bâti, pièce après pièce, depuis des décennies. Avec, comme tous les grands obsessionnels que sont toujours les grands écrivains, des thèmes récurrents, des « idées fixes » : ici, dans « le rabaissement », celui probablement qui domine l’œuvre de Roth, la boucle fatale du corps. Autour de l’Arc d’Héraclite : « l’Arc porte le nom de vie, mais son œuvre c’est la mort ».

Aussi « ne pas aimer » un livre de Roth, ou trouver – ça s’est lu à propos de « le rabaissement » - que « c’est un livre moins fort que les autres », c’est simplement passer à côté du projet, de la vie, de la passion littéraire de Roth. C’est aussi et surtout passer à côté de l’unicité d’une entreprise esthétique. Dans un tableau de maître, on ne trouve pas que le coin en bas à gauche est plus faible que le reste : le tableau est un discours indissociable, indivisible. Il en est de même de l’œuvre de Philip Roth : chaque élément constitue le sens esthétique de l’œuvre entière. Chaque élément est synecdoque.

Missak, Didier Daeninckx

Ecrit par Guy Donikian , le Mardi, 26 Juin 2018. , dans Folio (Gallimard), Les Livres, Critiques, La Une Livres, Roman

Missak, mars 2018, 352 pages, 7,80 € . Ecrivain(s): Didier Daeninckx Edition: Folio (Gallimard)

 

Edité initialement en 2009 aux éditions Perrin, Missakfait l’objet d’une réédition en poche. On salue l’initiative qui nous replonge dans un aspect particulier de la Résistance, celui de l’Affiche Rouge.

21 février 1944. Missak Manouchian, communiste arménien, chef d’un réseau de résistants immigrés, est fusillé au mont Valérien, ainsi que ses compagnons d’armes. Ce sont tous des immigrés de différentes nationalités appartenant aux FTP-MOI. La seule femme du réseau sera, elle, décapitée à Stuttgart. Tous figuraient sur la célèbre affiche rouge, placardée sur les murs de Paris, à plusieurs milliers d’exemplaires. Missak, à quelques heures de son exécution, écrira une ultime lettre à son épouse, Mélinée, lettre bouleversante dans laquelle il la prie d’être heureuse, tout en écrivant qu’il mourra sans haine et en pardonnant à tous, « sauf à ceux qui l’ont dénoncé », cette dernière expression ayant été occultée dans les différentes publications de cette lettre.