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Critiques

Trilogie de Corfou, Gerald Durrell

Ecrit par Ivanne Rialland , le Mardi, 01 Juillet 2014. , dans Critiques, Les Livres, La Une Livres, Roman, La Table Ronde

Ma famille et autres animaux et Oiseaux, bêtes et grandes personnes, traduits par Léo Lack, Le Jardin des dieux, traduit par Cécile Arnaud, avril 2014, 400, 352 et 304 pages, 14 € chaque volume . Ecrivain(s): Gerald Durrell Edition: La Table Ronde

 

Fuyant un maussade été anglais, la famille Durrell part pour Corfou, où elle restera cinq années idylliques, racontées par le plus jeune de la fratrie, Gerald. Âgé d’une dizaine d’années, le futur naturaliste évoque avec nostalgie son émerveillement pour la faune de Corfou. Féeries dans l’île : le titre choisi lors de la première parution française du volume inaugural de la trilogie (en 1958, chez Stock) rend bien compte de l’atmosphère enchantée de ce séjour qui semble baigné d’un éternel été.

Il masquait cependant la fantaisie et l’humour de l’ouvrage, rendu par la traduction ici littérale du titre anglais : Ma famille et autres animaux. Comme l’explique en effet Gerald Durrell dans sa préface, après avoir introduit les pittoresques membres de sa famille dans ce qui devait être un « exposé […] sur l’histoire naturelle de l’île », « ils s’y installèrent et invitèrent divers amis à partager avec eux les chapitres suivants ». Ce sont ces figures amicales qui dominent d’ailleurs le dernier volume, inédit en français, proposé par La Table ronde dans une traduction de Céline Arnaud. Les deux premiers volumes reprennent pour leur part dans une version révisée la traduction de Léo Lack, publiée pour la première fois aux éditions Stock, respectivement en 1958 et 1970.

Un jour nous serons humains, David Léon

Ecrit par Marie du Crest , le Mardi, 01 Juillet 2014. , dans Critiques, Les Livres, La Une Livres, Poésie, Théâtre, Espaces 34

Un jour nous serons humains, 22 pages, 2014 . Ecrivain(s): David Léon Edition: Espaces 34

 

 

« Le parti pris des animaux, le parti pris des hommes ».

 

L’œuvre de David Léon se tisse avec les voix. Un jour nous serons humains (opus 4) fait entendre sous la forme d’un poème dramatique un dire et un cri en humanité ou plutôt une parole du vivant : celle de « nos Bêtes » et la nôtre. Comme la citation-épigraphe de Deleuze ou les textes de Bailly l’affirment, nous sommes fraternellement liés aux animaux. L’ouverture du texte d’ailleurs est un envol annoncé par des points de suspension, qui en quelque sorte font passage entre le silence qui les précède et les premiers mots que les italiques enluminent.

Datura, François Bellec

Ecrit par Catherine Dutigny/Elsa , le Lundi, 30 Juin 2014. , dans Critiques, Les Livres, La Une Livres, Roman, Jean-Claude Lattès

Datura, mai 2014, 450 pages, 21,50 € . Ecrivain(s): François Bellec Edition: Jean-Claude Lattès

Second volet des aventures de François Costentin, cartographe dieppois, après L’arbre de nuit, Datura emmène le lecteur sur la route des Indes au début du XVIIe siècle. Le héros a abandonné la France pour se consacrer à son rêve, devenir pilote pour le compte de la Casa da India, une institution créée à Lisbonne en 1503, qui s’occupait de la navigation et du commerce avec l’Orient et assurait le monopole royal sur ce commerce.

Une fois promu pilote sous le nom de Francisco da Costa, il retourne à Goa en 1620 afin de poursuivre sa carrière sur les routes maritimes reliant les comptoirs portugais, mais aussi pour retrouver les deux femmes, l’une Indienne, l’autre une « senhora » portugaise dont il est épris et qui lui ont donné chacune un enfant.

Disons-le tout de suite, l’intrigue romanesque qui sert de fil rouge au roman, et qui fleure gentiment l’eau de rose, manque de sel, un comble pour un roman d’aventures maritimes. Ce n’est pas forcément elle qui retient le plus l’attention du lecteur. En revanche, l’amiral François Bellec est un orfèvre pour nous conter les vicissitudes des périples en mer, nous familiariser avec les techniques de navigation en employant un vocabulaire précis, souvent dans son jus d’origine, toujours étayé par des références aux écrits de l’époque ainsi qu’à des documents plus anciens. On regrettera à cet égard que le lexique d’une quarantaine de termes en fin d’ouvrage ne soit pas plus étoffé. C’est tout dire.

Le petit déjeuner des champions, Kurt Vonnegut

Ecrit par Léon-Marc Levy , le Samedi, 28 Juin 2014. , dans Critiques, Les Livres, La Une Livres, USA, Roman, Gallmeister

Le petit déjeuner des champions (Breakfast of champions), Traduction (USA) Gwilym Tonnerre, avril 2014. 312 p. 10,50 € . Ecrivain(s): Kurt Vonnegut Edition: Gallmeister

 

Disons-le d’entrée, peu importe l’histoire. Il paraît qu’il y en a une ! Mais on peut parfaitement l’oublier, dans tous les cas la mettre largement de côté ! Kurt Vonnegut ici ne raconte pas d’histoire ! Il règle ses comptes, avec l’Amérique, la modernité, le « progrès » ou plutôt la folie qu’on a affublée de ce nom.

Tout y passe : la publicité en tout premier lieu, cet affichage obscène, doublement obscène parce que vendant n’importe quoi à n’importe qui mais aussi avec des arguments qui tiennent à la une forme de pornographie permanente sous couvert de « communication ». C’est de cela que Kilgore Trout est censé parler lors d’un colloque.

« Il était supposé y participer à un colloque intitulé ‘L’avenir du roman américain à l’heure de McLuhan ». Il souhaitait déclarer lors de ce colloque : « Je ne sais pas qui est McLuhan mais je sais ce que c’est de passer la nuit avec une foule de vieux sagouins dans un cinéma new yorkais. Et si on parlait de ça ? »

Manuel d’écriture et de survie, Martin Page

Ecrit par Philippe Chauché , le Samedi, 28 Juin 2014. , dans Critiques, Les Livres, La Une Livres, Roman, Seuil

Manuel d’écriture et de survie, mai 2014, 176 pages, 14 € . Ecrivain(s): Martin Page Edition: Seuil

 

« J’ai des points communs avec des dessinateurs, des peintres, des biologistes, des musiciens, avec des personnes qui ne pratiquent aucun art mais qui exercent leur profession avec imagination. Je déteste l’idée de groupe et de corporatisme. Aller voir ailleurs profite toujours à notre art ».

Sur le ring du roman, Martin Page invite Daria, une jeune femme romanesque qui se livre à quelques exercices littéraires. Il répond à ses lettres imaginaires, comme à l’entraînement : esquive, pas de danse, jambes souples, souffle contrôlé et poings prêts à frapper, pour lui montrer ce qu’il convient d’éviter si elle veut gagner aux points. Il témoigne de ses combats permanents, de sa lutte incessante contre les assis et contre lui-même. Le doute comme une paire de gants de cuir où l’on se glisse, les incertitudes comme des cordes qui renvoient l’écrivain au centre du ring, exposition totale, où se découvrir peut être fatal. Mais aussi toujours avancer, même lorsque l’on perd du terrain. Ecrire et ne jamais baisser la garde, écrire et s’en donner les moyens.