Identification

Critiques

Deauville, Pierre de Régnier

Ecrit par Jeanne Ferron-Veillard , le Mercredi, 17 Août 2016. , dans Critiques, Les Livres, La Une Livres, Voyages

Deauville, La Thébaïde, mai 2016, 85 pages, 10 € . Ecrivain(s): Pierre de Régnier

 

A-t-on déjà lu un article de quatre-vingt cinq pages ?

Un guide à l’usage des hôtes lointains de Deauville. On y trouvera de l’humour, de l’enthousiasme, de la désinvolture, de l’élégance et de bien jolies manières. Un ton assurément. Un verbe affûté.

L’auteur est un œil. Un habitué des villégiatures d’été, d’hiver et de toute nature dont il a fait ici son théâtre.

Et puis il y a le jeu d’ombres, derrière.

Une ombrelle et un parfum. Deauville hier, avant 1914, après la guerre, Deauville avant. Agaçante et fascinante. Le ton n’est pas seulement perçant, il est étonnamment intemporel. Ou prémonitoire. S’y produisent des modes, les mêmes, des illustres aux illusionnistes dont l’art consiste à mettre en scène son droit profil et ses plus nobles rivalités.

Louis XI ou le joueur inquiet, Amable Sablon du Corail

Ecrit par Vincent Robin , le Mercredi, 17 Août 2016. , dans Critiques, Les Livres, La Une Livres, Belin, Histoire

Louis XI ou le joueur inquiet, 600 pages, 26 € . Ecrivain(s): Amable Sablon du Corail Edition: Belin

 

Parmi les biographies historiques récemment publiées, celle du roi de France et Valois Louis XI, densément retranscrite (600 pages) sous la plume du « chartiste » et « conservateur en chef du patrimoine aux Archives de France », Amable Sablon du Corail, restera probablement aux yeux des spécialistes un produit majeur versé au compte des études sur la structuration monarchique. On ne saurait effectivement trop entrevoir que ce travail ordonné et minutieux, remarquable d’abord pour le tableau coloré qu’il dresse d’un souverain charismatique mais également pour sa profonde immersion dans le siècle de clôture du moyen âge européen, imposera son brio et sa reconnaissance entre tous les documents de référence sur le sujet. Un essentiel souci de comparaison renverra bien entendu les amoureux du cas spécifique au dernier plus éminent traité parent, à savoir le très éminent travail de restitution réalisé il y a près de cinquante ans par l’historien américain Paul Murray Kendall – disparu pourtant deux seules années après la publication de son magistral Louis XI, révélé sous le trait original et saillant d’« universelle araigne ».

Championnes, Lorraine Kaltenbach, Clémentine Portier-Kaltenbach

Ecrit par Jean Durry , le Mardi, 16 Août 2016. , dans Critiques, Les Livres, La Une Livres, Flammarion, Histoire, Albums

Championnes, octobre 2015, 192 pages, 35 € . Ecrivain(s): Clémentine Portier-Kaltenbach et Lorraine Kaltenbach Edition: Flammarion

 

Des sentiments mêlés. C’est ce que l’on ressent en fermant ce livre attrayant, à la présentation très soignée, révélateur de certains destins trop ignorés, et riche en illustrations recherchées et peu connues.

Premier contact : très favorable. En sept chapitres – « vétérantes » (néologisme hardi auquel on aurait volontiers substitué « pionnières »), femmes du monde, filles du peuple, enfants de la balle, touche-à-tout, discriminées, militantes –, les deux auteurs – ou faut-il dire auteures ? – tressent vingt-neuf biographies, et fixent le processus du long combat mené par les femmes pour affirmer leur légitimité pleine et entière à vivre le sport de compétition, ce domaine si longtemps identifié comme quasi exclusivement « masculin ». Elles rendent ainsi hommage à des athlètes méconnues, aux fortes personnalités, qui ont fait contre vents et marées progresser la bonne course et changer la place et le statut du sexe présumé faible dans un univers pour le moins misogyne.

Histoire du silence, Alain Corbin

Ecrit par Marie-Josée Desvignes , le Mardi, 16 Août 2016. , dans Critiques, Les Livres, Essais, La Une Livres, Albin Michel

Histoire du silence, avril 2016, 216 pages, 16,50 € . Ecrivain(s): Alain Corbin Edition: Albin Michel

 

Dans ce court essai d’une grande densité, Alain Corbin nous rappelle combien le silence nous constitue et pourtant combien nos sociétés, inondées d’images et de paroles, le fuient alors que par le passé « on en goûtait la profondeur et les saveurs ». Qu’il évoque l’intimité d’une chambre, celle d’une rencontre amoureuse, celle des instants partagés avec la nature, ou des rituels mystiques ou religieux, il est aussi emblématique de certains lieux (maisons, chambres, corridors, églises, prisons, bibliothèques, forteresses). Alain Corbin dresse une Histoire du silence comme un rappel de son importance dans l’Art et la Littérature, mais aussi dans nos vies, pour preuve son vocabulaire, ses mystères et ses tactiques, ses déplacements même de l’amour à la haine jusqu’au tragique qu’il transporte avec lui.

C’est dans la littérature surtout que Alain Corbin va puiser tout d’abord des références innombrables, et notre sensibilité frottée à celle des auteurs qui l’ont recherché et accueilli dans leur quête esthétique s’en trouvera confortée en puisant dans les très nombreuses citations rapportées par l’historien.

D’ombres et de flammes, Pierric Guittaut

Ecrit par Martine L. Petauton , le Samedi, 09 Juillet 2016. , dans Critiques, Les Livres, Polars, La Une Livres, Roman, Série Noire (Gallimard)

D’ombres et de flammes, mai 2016, 299 pages, 18 € . Ecrivain(s): Pierric Guittaut Edition: Série Noire (Gallimard)

 

Il y avait eu cette Fille de la pluie, que la CL avait beaucoup aimée, déjà grandement marquée du sceau de l’originalité, et voilà ce D’ombres et de flammes. Pierric Guittaut n’écrit visiblement pas les polars de tout le monde ; fussent les impeccables productions de la Série noire Gallimard. Cet homme écrit de forts beaux et prenants romans, à part entière et constamment à part ; il se trouve qu’en plus, ce sont des polars.

L’homme vit en Berry, versant solognot ; pays des « jeteux de sorts ». Solitudes forestières, landes, bruyères, eau d’étangs improbables, et brume jusqu’à pas d’heures. Légendes et nature hautement inquiétantes, imbriquées forcément ; bêtes – peut-être, esprits – sans doute ; sorciers – toujours…

Le titre – sonorités d’un bon vieux western, ce qu’est aussi ce livre – aurait pu être un simple « part d’ombre », résumant le héros, major de gendarmerie, Remangeon, qu’une mutation quasi disciplinaire (et déjà maléfique) rabat pile dans son village natal de Sologne : « Treize années depuis sa dernière visite ; treize, comme pour confirmer le sort mauvais qui s’acharne sur moi… »