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Les Chroniques

Mes Arabes, Olivier Rachet (par Didier Ayres)

Ecrit par Didier Ayres , le Mercredi, 13 Octobre 2021. , dans Les Chroniques, La Une CED, Tinbad

Mes Arabes, Olivier Rachet, éditions Tinbad, septembre 2021, 168 pages, 19 €

 

Identité

Il serait compliqué de résumer les impressions qui furent miennes à la lecture de cet ensemble de textes qui tournent autour de la faculté révolutionnaire de l’identité, ici identité homosexuelle – même si celle-là n’est pas tout dans le livre. On y voit surtout aussi une belle défense de l’Islam en ce qui concerne les mœurs ou la littérature.

Il m’a fallu trois petites journées pour lire Mes Arabes, et étudier, trop hâtivement sans doute, ce que j’appellerai ici : une herméneutique ou une phénoménologie de l’identité, ici appuyée sur un trait sexuel personnel et agissant. C’est avec cette approche en définitive que j’ai pu, sans temps morts, parcourir ce livre, à la fois poème en prose et réflexion sur soi, sur le soi homophile. Du reste, puisque j’évoque cette agitation des signes, qui s’interpolent dans le sein le plus intime de la construction d’un homo, je donne ici quelques mots phares de cet essai de discours amoureux arabo-musulman (car telle est la relation de l’auteur à lui-même passé par la figure vigoureuse de l’Arabe) : arabesque, Arabe, Raï, Paradis, alcool ou révolution notamment.

Lipstick Traces, Une histoire secrète du vingtième siècle, Greil Marcus (par Didier Smal)

Ecrit par Didier Smal , le Mardi, 12 Octobre 2021. , dans Les Chroniques, Les Livres, La Une CED, USA

Lipstick Traces, Greil Marcus, Folio, juin 2021, trad. anglais (USA) Guillaume Godard, 672 pages, 15 €

C’est une question lancinante, qui permet à l’une ou l’autre publication de concevoir un numéro spécial, tel que le fit Le Magazine Littéraire, il y a quasi vingt ans ! existe-t-il une littérature rock ? Non, définitivement non. Il existe des romans, nouvelles et poèmes qui ont tenté avec plus ou moins de bonheur de traduire l’esprit du rock (on pense au Human punk de John King, belle réussite littéraire et musicale), d’autres qui partagent une vision du monde, de la vie, pour une époque donnée (ainsi, le cyberpunk est-il soluble dans le Radioactivity de Kraftwerk ou les disques de Cabaret Voltaire ?) ; il existe aussi de remarquables plumes critiques, que l’on soit ou non d’accord avec leurs goûts – Lester Bangs, Nick Tosches, Jon Savage, Nick Kent ou encore, en France, Patrick Eudeline ; ces journalistes, dans de rares pages, sont parvenus à rendre en quelques paragraphes l’influx énergétique d’un disque écouté à un volume sonore indécent parce qu’il remuait les tripes – peut-être l’auteur de ces lignes y est-il parvenu aussi, dans une autre vie. Juste à côté du rock, il y a la littérature « beat », fumeuse au propre comme au figuré, et qui, au-delà de toute considération intellectuelle ou universitaire, est illisible soixante-dix ans plus tard – qui prend plaisir à lire le salmigondis qu’est Sur la route ? Bref, littérature et musiques d’origine afro-américaine, blues, jazz, rhythm’n’blues, soul, rock’n’roll, etc., c’est un mariage dans l’ensemble stérile.

Lisières d’instants, Pascal Mora (par Didier Ayres)

Ecrit par Didier Ayres , le Lundi, 11 Octobre 2021. , dans Les Chroniques, Les Livres, La Une CED, Poésie

Lisières d’instants, Pascal Mora, éditions Unicité, mai 2021, 82 pages, 13 €

 

Hic et nunc

J’ai été heureux de découvrir le dernier livre de Pascal Mora, où j’ai trouvé beaucoup de matière et néanmoins une espèce de sobriété poétique allant à l’essentiel. Cette impression est due à la concentration du propos, lequel se quintessencie, prend la poésie pour matière avec discrétion et finesse. Et cette poésie est dynamique, mouvante, oscillatoire, s’attachant au hic et nunc de façon hésitante mais toujours avec assez distance, visant à couvrir davantage que le poème lui-même – ce qui pour moi est proprement l’affaire de la poétique, qui ne se contente pas de son propre cercle de périmètre mais vibre, tremble dans la prosodie de l’écriture. De plus ce mouvement est ascensionnel, conduit vers une forme de spiritualisation du monde et de moments du monde. Cette poésie est chant et allant musical.

Sur Le Funambule de Jean Genet (par Patrick Abraham)

Ecrit par Patrick Abraham , le Vendredi, 08 Octobre 2021. , dans Les Chroniques, La Une CED, Théâtre

 

Notules

 

Relisant Le Funambule de Jean Genet, je pense à une troupe d’artistes ambulants (acrobates, jongleurs, dresseurs de singes) aperçue au bord d’une route à Gwalior, dans l’Etat du Madhya Pradesh (Inde), tandis que je rentrais d’une après-midi passée dans le fort qui surplombe la ville. Une tradition, m’avait-on dit, voulait que les membres de cette troupe, ou plutôt de la caste à laquelle se rattachait la troupe, se travestissent lorsqu’ils se présentaient au public. Qu’en était-il, ce jour-là ? Ces fillettes, une sorte de jarre posée sur la tête, étaient-elles des garçonnets ? Quel trouble alors en elles, en eux, face à la maigre assistance ? Ou cet échange, si je n’avais pas rêvé ce qu’on m’en avait raconté, parce que banal, leur était indifférent ?

Je pense à un vieil homme dansant tout seul en écoutant Oum Kalthoum dans l’arrière-salle d’un café de Tunis, non loin de la Porte de France, vers 1996. Il avait l’âge qu’aurait eu Abdallah B., puisque c’est pour Abdallah B. que fut écrit Le Funambule.

Les chemins de traverse d’Elizabeth George (par Martine L. Petauton)

Ecrit par Martine L. Petauton , le Jeudi, 07 Octobre 2021. , dans Les Chroniques, La Une CED


Certains la nomment « la reine George », cette américaine qui n’écrit que sur l’Angleterre, et abat, bon an mal an, son compte de pas loin de 20 magistraux romans policiers à ce jour ; chacun meilleur que l’autre dans une parfaite justesse digne de la bonification d’un Earl Grey de légende, et Dieu sait qu’on en boit en lisant, sans oublier les bières…

Elle a, dans une autre vie, avant l’écriture, beaucoup fait lire à des étudiants le miel du policier anglais. Agatha, tellement évident – elle est là à chaque page, comme en creux d’une autre époque, mais aussi Conan Doyle et Peter James. Les grands classiques anglais aussi, cités au détour des pages, avec l’exacte référence, car la dame écrit, dit-elle, des policiers qui sont aussi des romans, et tant qu’à faire, revendiquent une belle et rigoureuse écriture.