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Sur les rails De Victor Hugo à Jacques Roubaud, Anne Reverseau (par Ivanne Rialland)

Ecrit par Ivanne Rialland , le Lundi, 10 Décembre 2018. , dans La Une Livres, Anthologie, Les Livres, Critiques, Poésie

Sur les rails De Victor Hugo à Jacques Roubaud, Les Impressions nouvelles, août 2018, 128 pages, 13 € . Ecrivain(s): Anne Reverseau

 

 

C’est un joli petit volume que nous propose Anne Reverseau avec cette anthologie illustrée consacrée aux trains. L’iconographie est abondante. Tout en noir et blanc, elle est composée de gravures et de photographies anciennes. Ce choix, qui a sans doute des raisons économiques, crée l’atmosphère propice pour retrouver l’émerveillement – ou l’effroi – des débuts du chemin de fer, comme nous y invite Anne Reverseau à travers sa sélection de textes.

Ceux-ci, nombreux – 72 extraits – ne sont toutefois pas concentrés sur ces seuls débuts héroïques. Ils s’échelonnent du milieu du XIXeau XXIesiècle, montrant la persistance de cette fascination pour les trains et les gares, en dépit de ce que pouvait augurer Apollinaire dans « La victoire » (Calligrammes) :

Les travaux et les jours (extraits 5), par Ivanne Rialland

Ecrit par Ivanne Rialland , le Lundi, 22 Octobre 2018. , dans La Une CED, Bonnes feuilles, Documents

 

Le fils

Dans l’herbe du jardin de banlieue mal entretenu par deux parents trop occupés, un bocal vide à la main, il guette. Il dédaigne les fourmis, trop communes, qui dessinent leur longue file jusqu’au haut du portail. Quelques mouches noires traversent les airs en un vrombissement discret. Il se déplace, le nez penché vers la terre, s’arrête un instant près d’une touffe de lavande, visite du bout des doigts les herbes aromatiques maternelles, et se dirige enfin vers le vieux rosier grimpant, son meilleur pourvoyeur. Pas de scarabée brillant parmi les pétales des roses à moitié fanées qui s’éparpillent au sol au moindre effleurement, pas même de coccinelle zigzaguant entre les épines, mais tout de même un gendarme à la robe noire et rouge, auquel il aménage aussitôt, dans le pot au couvercle percé, une vraie petite forêt artistiquement disposée.

Il gardera deux jours le pot sur le rebord de sa fenêtre, dissimulé par un coin de rideau, avant de libérer son occupant maussade près du perron.

Les travaux et les jours (extraits), par Ivanne Rialland

Ecrit par Ivanne Rialland , le Mercredi, 15 Août 2018. , dans La Une CED, Bonnes feuilles, Ecriture

 

La mère

L’ivresse anxieuse d’un déménagement la plonge depuis de longs mois dans l’obsession d’une matérialité complexe et pléthorique. Excitante échappatoire aux routines quotidiennes, les savoirs qu’elle accumule finissent par la confiner dans un pragmatisme étroit qui nourrit en elle une colère rentrée. Performances multiples et contradictoires des lave-linge séchants, difficile navigation entre les carreaux de ciment et les carrelages cérame dont elle se fait expédier des échantillons par la poste, redoutables écueils des prêts immobiliers et des clercs de notaire, la fierté de cette expertise – récompensant les années d’expérience qui lui ont aussi blanchi quelques mèches de cheveux, et des qualités de caractère qu’elle juge trop méconnues par ses proches – cède la place à une vague honte de ces préoccupations bourgeoises et une envie grandissante de tout laisser couler, de se gentiment faire avoir, de ne plus se préoccuper de la couleur du parquet ni de la peinture des murs, de vivre deux ans s’il le faut au milieu des cartons, sachant que, quoi qu’elle fasse, la peinture se tachera, le parquet se rayera, les meubles de cuisine s’écorneront, si vite que pour y résister, pour ne pas souffrir d’une macule de sauce tomate ou d’une lame mal posée, pour ne pas souffrir d’en souffrir, il vaut mieux dès l’abord royalement s’en foutre.

Les travaux et les jours (extraits), par Ivanne Rialland

Ecrit par Ivanne Rialland , le Mercredi, 14 Février 2018. , dans La Une CED, Bonnes feuilles, Ecriture

 

 

La mère

Assise poliment sur le canapé de cuir, son assiette à dessert posée sur ses genoux serrés, elle tâche de briser la pâte dure de la tarte avec le côté de sa fourchette, tout en balayant du regard le cercle des parents assemblés autour de la table basse. Du fond de l’appartement parviennent les cris excités des enfants. Sans être chaleureuse, l’atmosphère est cordiale, et chacun y va de son anecdote sur sa descendance, qui s’agite là-bas, dans les chambres des fils de la maison. On sourit, amusés, complices. Les plaisanteries fusent, qui manifestent chez certains une camaraderie ancienne qu’elle contemple à légère distance.

La Fabrique du livre. L’édition littéraire au XXe siècle, Olivier Bessard-Banquy

Ecrit par Ivanne Rialland , le Vendredi, 21 Avril 2017. , dans La Une Livres, Les Livres, Critiques, Essais, Histoire

La Fabrique du livre. L’édition littéraire au XXe siècle, Presses universitaires de Bordeaux & Du Lérot, septembre 2016, 510 pages, 29 € . Ecrivain(s): Olivier Bessard-Banquy

 

Olivier Bessard-Banquy nous propose ici une traversée du monde de l’édition du XXe siècle, nourrie par un impressionnant travail d’archives. Au fil de chapitres ordonnés chronologiquement, l’on assiste ainsi à la mutation de l’édition française, depuis le travail familial et artisanal de la fin du XIXe siècle à la concentration et l’industrialisation du secteur à l’orée des années 1970 – l’auteur laissant de côté la période contemporaine, objet d’un précédent livre : L’Industrie des lettres. Étude sur l’édition littéraire contemporaine.

Comme il le précise, Olivier Bessard-Banquy ne recherche pas de la sorte à bouleverser l’histoire de l’édition, dont les grandes étapes sont déjà connues, mais il insère dans un panorama général très complet des monographies fouillées sur des figures marquantes du monde de l’édition, et des anecdotes parfois savoureuses sur les exigences d’écrivains ou d’ayants droit impécunieux. Le lecteur aura notamment plaisir à découvrir les débuts d’hommes qui ont laissé leur nom à de grandes maisons d’édition, à les suivre dans leurs succès et leurs déboires : Albin Michel, Grasset, Pauvert, Bourgois, etc…