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Le Jardin de derrière (5) - Où la voisine tombe de l’échelle

Ecrit par Ivanne Rialland , le Samedi, 13 Décembre 2014. , dans La Une CED, Ecriture, Ecrits suivis

 

Le mardi, Georges fut brusquement tiré de son sommeil par un grand bruit, suivi d’un cri étouffé. Il se passa la main sur le visage, jeta un coup d’œil au réveil et ouvrit les volets. Ce mardi, à 6h32 du matin, une femme gisait les quatre fers en l’air, dans la plate-bande du jardin de derrière. Ses jambes nues s’agitaient faiblement tandis qu’elle tâchait de se dépêtrer de l’arbuste qu’elle avait écrasé sous son poids. Georges, arrêté un bref instant par la vision, sortit précipitamment en caleçon et tee-shirt, les cheveux tout hérissés, s’écorchant les pieds nus sur le béton râpeux.

La femme était déjà débout, se frottant énergiquement l’arrière-train, l’air furieux.

– Vous pourriez au moins vous vêtir décemment, non ?

Georges, stoppé net dans son élan, hésita, manqua d’aller chercher un peignoir, se retourna, et puis non, quand même, c’était trop fort, il se remit en marche avant. La femme avait déjà appuyé l’échelle contre le mur et commençait à grimper, sa robe se gonflant dans le vent du matin.

Le Jardin de derrière (4)

Ecrit par Ivanne Rialland , le Mercredi, 03 Décembre 2014. , dans La Une CED, Ecriture, Ecrits suivis

 

Où Georges rencontre le maire

 

De bon matin, ce lundi, Georges se rendait donc à la mairie pour y obtenir les autorisations nécessaires. Il avait eu, plus tôt encore, une conversation téléphonique avec sa femme. Hélène n’avait pas réussi à dissiper tout son enthousiasme.

– Enfin, Georges, avait-elle soupiré…

– Ça ne sera pas un gros chantier. Quelques semaines, à peine. Pierre m’aidera pendant les vacances.

– Et la maison, tu y penses ? Ton truc n’est quand même pas la priorité.

– J’y pense à la maison. Je ne pense qu’à ça : j’y vis, figure-toi. Et je n’ai rien d’autre à faire que ça, tout seul : penser à la maison.

Le Jardin de derrière (3)

Ecrit par Ivanne Rialland , le Jeudi, 27 Novembre 2014. , dans La Une CED, Ecriture, Ecrits suivis

 

Où Georges découvre ce qu’il y a sous la baignoire

 

Il poussa la baignoire sur le sol bétonné. Elle était bien plus légère qu’il n’y paraissait : du fer émaillé. La trappe faisait cinquante centimètres de côté. Elle était bordée d’acier. Une large poignée en acier brillait en son centre, au ras du béton. Georges l’agrippa, tira. La trappe était lourde, mais se souleva sans à-coups. Un bruit de mécanisme à ressort, un claquement puissant : la trappe resta dressée en l’air, exhibant une poignée identique de l’autre côté. Une odeur humide s’exhala par l’ouverture. Georges y mit la tête. Il distinguait une sorte de caveau, un cube en béton de peut-être deux mètres de côté, ou un peu moins. La lumière qui entrait par la porte laissait distinguer une ouverture arrondie, dans l’une des parois.

Le Jardin de derrière (2)

Ecrit par Ivanne Rialland , le Jeudi, 20 Novembre 2014. , dans La Une CED, Ecriture, Ecrits suivis

 

Où Georges rencontre les indigènes

 

Tôt le lendemain, par un joli temps de mai, Georges alla faire quelques courses chez Auchan. Le parking était à moitié vide, en ce dimanche matin. Devant les portes du magasin étaient exposées de lourdes tables de jardin, des auges de pierre et deux bétonneuses. La peinture un peu écaillée, avec des traces de rouille, elles semblaient avoir passé l’hiver là, sur ce parking, et leurs tréfonds retenaient peut-être un peu de neige mêlée aux feuilles de l’automne dernier. Georges médita devant elles. Il était tenté par le petit modèle. Ou une auge en plastique suffirait-elle, pour commencer ? À moins qu’il ne casse tout ce béton pour planter du gazon. Ce serait un gros chantier, et il ne savait pas trop comment s’y prendre. Il regarda autour de lui les hommes qui entraient et sortaient du magasin, remontaient dans leur voiture ou poussaient des caddies devant eux, en jogging ou en jean, leur pull à col camionneur aux manches relevées au-dessus du coude. Sauraient-ils le lui dire ?

Le Jardin de derrière (1)

Ecrit par Ivanne Rialland , le Mercredi, 12 Novembre 2014. , dans La Une CED, Ecriture, Ecrits suivis

 

Où Georges prend un congé

 

La pièce avait une odeur humide. Devant lui, un couloir s’enfonçait dans la pénombre. Les murs étaient lépreux, le coin cuisine, à sa gauche, marquait son âge. Du bois sombre, des meubles massifs, le carrelage beige piqueté de brun sur les murs, quelques fleurettes décoratives. Il fit un pas de côté, se heurta douloureusement la jambe à la table basse, grimaça, se passa la main sur le front. Il se retourna et sortit de la maison.

Sur le balcon de pierre, les mains agrippées à la rampe de fer, les yeux papillotant dans la fraîche lumière de ce matin de printemps, il regarda le panorama de champs et de bois qui s’offrait à lui de l’autre côté de la route. Sur sa droite, assez loin, en haut d’une colline pierreuse surmontée d’un bois, il distinguait le clocher gris et pointu d’un autre village. Au-delà de la cour bétonnée, au-delà de la route, un pré, son pré, clos d’un muret. A côté, un peu en contrebas, un autre pré, où vagabondaient des poules et des dindes.