La Fabrique du livre. L’édition littéraire au XXe siècle, Olivier Bessard-Banquy
La Fabrique du livre. L’édition littéraire au XXe siècle, Presses universitaires de Bordeaux & Du Lérot, septembre 2016, 510 pages, 29 €
Ecrivain(s): Olivier Bessard-Banquy
Olivier Bessard-Banquy nous propose ici une traversée du monde de l’édition du XXe siècle, nourrie par un impressionnant travail d’archives. Au fil de chapitres ordonnés chronologiquement, l’on assiste ainsi à la mutation de l’édition française, depuis le travail familial et artisanal de la fin du XIXe siècle à la concentration et l’industrialisation du secteur à l’orée des années 1970 – l’auteur laissant de côté la période contemporaine, objet d’un précédent livre : L’Industrie des lettres. Étude sur l’édition littéraire contemporaine.
Comme il le précise, Olivier Bessard-Banquy ne recherche pas de la sorte à bouleverser l’histoire de l’édition, dont les grandes étapes sont déjà connues, mais il insère dans un panorama général très complet des monographies fouillées sur des figures marquantes du monde de l’édition, et des anecdotes parfois savoureuses sur les exigences d’écrivains ou d’ayants droit impécunieux. Le lecteur aura notamment plaisir à découvrir les débuts d’hommes qui ont laissé leur nom à de grandes maisons d’édition, à les suivre dans leurs succès et leurs déboires : Albin Michel, Grasset, Pauvert, Bourgois, etc…
Olivier Bessard-Banquy nous dévoile également les stratégies de groupes tels que Hachette et Les Presses de la Cité, emblèmes d’une édition passée à l’ère industrielle, mais dont l’histoire recèle des surprises, telle l’étonnant soutien apporté par Sven Nielsen, le patron de fer des Presses de la Cité, à Christian Bourgois, ou le soutien de Hachette à nombre de maisons d’édition déficitaires. Olivier Bessard-Banquy n’oublie pas bien sûr Flammarion, Gallimard, mais traite aussi de maisons plus oubliées – comme Crès, Charlot – ou plus confidentielles : Le Sagittaire, Au sans pareil, La Sirène. Ce foisonnement fait vivement regretter l’absence d’un index : le découpage chronologique, s’il rend sensibles les grandes lignes de l’évolution du secteur, fait perdre au lecteur les traces de l’éditeur ou de la maison qu’il aurait aimé suivre de façon plus continuée, d’autant que les sous-titres, certes nombreux, tendent à privilégier l’esprit sur la clarté.
À le prendre globalement, ce livre érudit est également une défense et illustration de l’édition – du travail de ces « belles maisons » dont Olivier Bessard-Banquy adopte le point de vue tout au long de ces pages : il met en valeur leur attachement aux œuvres exigeantes, tout au long du XXe siècle, à côté et en dépit de stratégies plus purement commerciales. Le livre prend de ce fait une coloration nostalgique dans ses derniers chapitres, cette logique commerciale devenant de plus en plus prédominante – l’auteur, refusant la pure déploration, pointe cependant in fine les voies de résistances à la standardisation des textes, en appelant éditeurs et lecteurs à la mobilisation pour la cause littéraire.
Ivanne Rialland
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