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Articles taggés avec: Abraham Patrick

Douze improvisations sur Georges Eekhoud, Histoire campine (par Patrick Abraham)

Ecrit par Patrick Abraham , le Mercredi, 16 Décembre 2020. , dans La Une CED, Ecriture

 

« M. Georges Eekhoud est un dramaturge, un passionné, un buveur de vie et de sang ».

Remy de Gourmont, Mercure de France, 1896.

 

Il faut entendre le mot improvisation dans son acception jazzistique, sans doute, mais davantage dans celui que lui donna Michel Butor dans deux beaux livres – quoique d’une façon assez différente. Ni plagiats ni pastiches, donc, mais rêveries, exercices d’admiration.

Georges Eekhoud est un écrivain flamand d’expression française né en 1854 et mort en 1927. Les travaux de Mirande Lucien, de Patrick Cardon, de Michael Rosenfeld, etc., ont suscité un nouvel intérêt envers son œuvre.

 

Entretien avec Quentin Mouron à propos de Jean Lorrain ou l’impossible fuite hors du monde (Essai), suivi de L’Age de l’héroïne (Ed. Olivier Morattel) (par Patrick Abraham)

Ecrit par Patrick Abraham , le Jeudi, 26 Novembre 2020. , dans La Une CED, Entretiens, Les Dossiers

 

Quentin Mouron, né en 1989, est un écrivain canado-suisse de langue française dont les ouvrages ont été très vite remarqués. Il vit actuellement à Lausanne. Il vient de publier un passionnant essai sur Jean Lorrain suivi de la réédition de son roman, L’Age de l’héroïne, et a eu la courtoisie de bien vouloir répondre à mes questions.

 

Cher Quentin Mouron, vous évoquez, dans l’avant-propos de votre essai, le choc ressenti lors de votre découverte de Jean Lorrain. Qu’est-ce qui vous a mené à lire cet auteur qui n’est pas précisément, aujourd’hui, en vogue, ni très étudié non plus par l’université ?

 

C’est précisément lors d’un cours à l’université de Lausanne, où j’ai étudié la littérature et la philosophie, que j’ai découvert Lorrain. Le cours ne portait certes pas sur Lorrain, mais il y était cité. Ma curiosité naturelle a fait le reste…

Ghâts, images, durée - Histoire furtive (Par Patrick Abraham)

, le Vendredi, 23 Octobre 2020. , dans Nouvelles, La Une CED, Ecriture

 

A la mémoire d’Alain Daniélou

 

Sur les ghâts d’une rivière sacrée, à Bénarès, ailleurs ou dans un songe, des jeunes filles en sari, timides, entrent dans l’eau : deux polissons en haillons les observent, dissimulés derrière une vache, une main dans leur short rapiécé. Des pèlerins récitent les prières auspicieuses en commençant leurs ablutions. Plus bas, on se lave les dents, on lessive, on se rince, on barbote. Des déchets sacrificiels flottassent. Des barques circulent, s’arriment, s’éloignent.

Un businessman, son bain rituel achevé, tapote avec concentration sur son ordinateur portable, lorgné par une mendiante persévérante. Un gras gourou enseigne à un auditoire circonspect les subtilités du détachement. Sous une tente, assis en tailleur devant un lingam arrosé de beurre clarifié, des sâdhus vêtus d’orange, le front marqué de cendre, âgés de deux cent soixante ans peut-être comme Trailanga Swami, psalmodient : si je les regarde, me voient-ils ?

Ombres de l’Inde – Histoire incertaine (par Patrick Abraham)

Ecrit par Patrick Abraham , le Vendredi, 18 Septembre 2020. , dans La Une CED, Ecriture, Récits

 

En relisant les Carnets du grand chemin. – Il m’arrive de m’interroger sur ce que pouvait être l’Inde avant la période coloniale et même avant les brutales razzias islamiques. Quels étaient ses paysages, les rapports de ses habitants à leur terre, à leur village, à leurs champs, à leurs forêts ? A quoi ressemblaient les cités dont nous visitons les ruines, comme Vijayanagar (Hampi aujourd’hui) dans le Karnataka, rasée au seizième siècle par les conquérants musulmans, sa population massacrée ou forcée à la conversion, ses temples, ses palais, ses bibliothèques, ses salons de musique détruits et sa rivière rougie de sang humain ? Selon quelles normes fonctionnaient-elles ? Qu’étaient l’espace, le temps surtout ? Qu’y avait-il dans la conscience d’un garçon de vingt ou vingt-cinq ans, guère différent dans son apparence, je le suppose, de ceux que j’ai aimés ? Comment s’éveillaient ses désirs et, s’il convoitait ses pareils, comment cette attirance était-elle par lui et par ses camarades ressentie ? Qui croisait-on sur les routes ? Quels étaient leurs dangers, leurs surprises, leurs bonheurs ? Où se portaient spontanément les yeux ? Comment s’habillait-on, s’accommodait-on de son corps ?

Sur un poème de Bernard Delvaille, Histoire portuaire (par Patrick Abraham)

Ecrit par Patrick Abraham , le Jeudi, 02 Juillet 2020. , dans Nouvelles, La Une CED, Ecriture

 

« Il avait le regard à la fois ébloui et inquiet de ceux qui voient tout – et au-delà – et sont incapables de transmettre. Rien ne lui échappait ».

 

Le Vague à l’âme de la Royal Navy est un poème de Bernard Delvaille (éd. La Répétition, 1978). C’est un assez court texte d’une douzaine de pages construit sur les notes en vers du personnage principal, Mark. B. Thompson, « enseigne de vaisseau au service de Sa Majesté », et sur les commentaires en italique et en prose d’un exégète anonyme. Il faudrait d’ailleurs plutôt parler d’un poème-récit comme pour Un jour à Durban de Claude Michel Cluny (La Différence, 1991), dont Delvaille est proche à plus d’un titre, puisqu’une mince trame narrative s’y développe, suffisamment précise et lacunaire pour susciter la rêverie.