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Roman

Conséquences d’une disparition, Christopher Priest (par Yann Suty)

Ecrit par Yann Suty , le Vendredi, 12 Octobre 2018. , dans Roman, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Iles britanniques, Denoël

Conséquences d’une disparition (An American Story), septembre 2018, trad. anglais Jacques Collin, 336 pages, 21,50 € . Ecrivain(s): Christopher Priest Edition: Denoël

Le 11 Septembre est-il vraiment le 11 Septembre ? Deux avions détournés par des terroristes ont percuté les tours du World Trade Center, qui se sont ensuite effondrées. Un autre appareil s’est écrasé sur le Pentagone. Et un quatrième s’est crashé dans un champ. Voilà la version officielle. Mais il y a une autre version qui a rapidement vu le jour, une version « complotiste » qui met en avant les contradictions de l’événement, ses mystères irrésolus, ses mensonges éhontés, ses preuves manquantes ou inexactes, ses aberrations scientifiques. Les contradictions sont trop nombreuses, les questions sans réponses également, pour ne pas semer le doute. Et parfois, on peut l’avouer, douter peut être terriblement excitant.

En 2001, Ben Matson, un journaliste scientifique, noue une relation avec une femme mariée (à un homme qui travaille au département de la Défense, ce qui aura son importance), mais en instance de divorce, Lilian Viklund. Ils évoquent l’avenir. Même si c’est compliqué quand l’un vit à Londres, l’autre à New-York. Ils s’organisent. Ils cumulent les miles. Petit à petit, leur projet de vivre ensemble se concrétise. Un jour, ils ont convenu de se rejoindre à Los Angeles. C’est le 11 septembre 2001. Lilian monte à bord du vol American 77, celui-là même qui s’est écrasé sur le Pentagone. Le temps des rêves est terminé.

Les jours de silence, Phillip Lewis (par Léon-Marc Levy)

Ecrit par Léon-Marc Levy , le Jeudi, 11 Octobre 2018. , dans Roman, Les Livres, Critiques, La Une Livres, USA, Belfond

Les jours de silence, août 2018, trad. américain Anne-Laure Tissut, 427 pages, 22 € . Ecrivain(s): Phillip Lewis Edition: Belfond

 

Un roman passionnant et bancal

Une pluie de références et citations des plus grands écrivains américains, traversée de traits d’esprit et de personnages aussi improbables que drôles et attachants – à commencer par le jeune narrateur –, voilà de quoi faire de cette lecture un vrai moment de plaisir littéraire. Parce que la littérature, et les livres, on y plonge jusqu’au cou dans ce roman tout entier baigné dans l’amour des auteurs et de leurs œuvres.

Tout commence par une citation de Thomas Wolfe, dont le père du narrateur est fou d’admiration. La famille s’installe – les parents et le jeune narrateur – dans une invraisemblable maison nichée dans un coin des Appalaches, en Caroline du Nord. Une maison biscornue, construite quelques décennies plus tôt par des propriétaires originaux. Une bibliothèque immense et bien garnie, en est le centre. Et le reste se distribue dans une architecture improbable, dans le désordre. Un antre menaçant et terrifiant dans lequel vont grandir deux enfants.

La Toile du monde, Antonin Varenne (par Charles Duttine)

Ecrit par Charles Duttine , le Jeudi, 11 Octobre 2018. , dans Roman, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Albin Michel

La Toile du monde, août 2018, 347 pages, 21,50 € . Ecrivain(s): Antonin Varenne Edition: Albin Michel

Une américaine à Paris.

A quoi tient le charme d’un roman que l’on dit « historique » ? On peut proposer(d’une manière un peu sommaire) plusieurs réponses. Un tel roman peut nous restituer l’atmosphère d’une époque, nous décrire aussi des évènements précis qui ont marqué le cours de l’histoire, faire encore se mouvoir des personnages telles des ombres chinoises devant cette toile de fond et pourquoi pas nous montrer du doigt aussi quelques détails surprenants, propres à cette époque et dont nous n’avons pas idée, aujourd’hui.

On retrouve de tels « ingrédients » dans le roman d’Antonin Varenne, La Toile du monde, et la recette fonctionne…

Une époque : le roman se situe en 1900 à Paris, époque charnière s’il en est, celle de la construction du métro parisien (la ligne 1 « historique » dont on nous raconte les difficultés techniques et l’ambition prométhéenne), période également où la médecine est encore hasardeuse et tâtonnante (l’auteur nous fait assister, entre autres, à une séance ratée de transfusion sanguine). Période enfin d’espérances fébriles et où l’on sent peser toutes sortes de menaces à venir.

L’amie, la mort, le fils, Jean-Philippe Domecq (par Jean-Jacques Bretou)

Ecrit par Jean-Jacques Bretou , le Jeudi, 11 Octobre 2018. , dans Roman, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Thierry Marchaisse

L’amie, la mort, le fils, septembre 2018, 128 pages, 14,50 € . Ecrivain(s): Jean-Philippe Domecq Edition: Thierry Marchaisse

Le 21 juillet 2017, alors que l’auteur se trouve en vacances avec son fils Guilhem, à Ramatuelle chez le père d’Anne Dufourmantelle, compagne de Frédéric Boyer, ce dernier est appelé d’urgence sur la plage de Pampelonne, à Saint-Tropez, où un accident est arrivé à Anne. Jean-Philippe Domecq conduit son ami, F. Boyer, sur le lieu de l’accident. Ils découvrent la conjointe de l’écrivain allongée sur le sable, entourée de secouristes. Elle a été prise d’un malaise après avoir sauvé des enfants de la noyade, dont Guilhem, le fils de l’auteur. Les pompiers et les médecins ne pourront rien faire, Anne est morte. Le surlendemain après une veillée mortuaire, Domecq et son fils partent « en pèlerinage » à Chamonix, avant de revenir assister aux funérailles d’Anne et de repartir, le fils avec sa mère, le père dans le Cotentin.

Ce livre est écrit dans le chagrin qui ne « quitte » pas J. P. Domecq : « (…) j’essayais juste de raconter. Mais je n’avais pas prévu de raconter non plus, quand j’ai commencé. Je sais seulement que je ne le fais pas par besoin de guérir, on n’a aucune envie de guérir d’un chagrin – le chagrin est tout ce qu’il y a de fidèle ». Ce texte est comme un thrène, ayant pour thème la fidélité. Être fidèle en amitié jusque au-delà de la mort. L’amitié commune à tous : Anne, Boyer, auteur du fameux Mes amis mes amis, Domecq et les autres.

Œuvres complètes, Franz Kafka, La Pléiade (par Jean-Paul Gavard-Perret)

Ecrit par Jean-Paul Gavard-Perret , le Lundi, 08 Octobre 2018. , dans Roman, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Langue allemande, Nouvelles, La Pléiade Gallimard

Œuvres complètes, Franz Kafka, La Pléiade, Gallimard, octobre 2018, Tome I, Nouvelles et récits ; Tome II, Romans, trad. allemand 60 € et 55 € jusqu'au 31/03/19 . Ecrivain(s): Franz Kafka Edition: La Pléiade Gallimard

 

Franz Kafka et les célibataires endurcis

Le héros de Kafka est un homme, sans monde, sans famille. C’est un « fils » déshérité, un homme perdu au milieu du monde ou de rien – ce qui est pour lui un peu la même chose. Face à lui – et non seulement dans la Lettre au père – la figure de ce dernier est celle du despote. Elle se développe suivant les œuvres de diverses manières.

Parfois il s’agit du géniteur mais le plus souvent c’est une entité, une machine qui réduit le héros à « un point minuscule » comme le rappelle Robert Lapoujade dans Les existences moindres. Le héros – du moins ce qu’il en reste – est par excellence dépossédé de tout et de lui-même. Sa vie quoique tragique n’est même plus une destinée mais une suite d’instants.

Cette nouvelle édition par ses traductions plus nerveuses et précises montre un être dont le corps lui-même n’est plus sa propriété. Assis, il est plus proche de sa chaise que de lui-même.