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Roman

Taqawan, Éric Plamondon (par Marc Ossorguine)

Ecrit par Marc Ossorguine , le Mercredi, 27 Mars 2019. , dans Roman, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Québec, Quidam Editeur

Taqawan, janvier 2018, 208 pages, 20 € . Ecrivain(s): Éric Plamondon Edition: Quidam Editeur

« En langue mi’gmaq, on nomme taqawan un saumon qui revient dans sa rivière natale pour la première fois. Il passe de une à trois années en mer. (…) S’il a survécu à la gueule des phoques, aux dents des requins, aux gosiers des goélands, aux becs des cormorans, il retrouve sa rivière d’origine, après des milliers de kilomètres parcourus. On ignore toujours sur quel type de radar le saumon peut compter pour retrouver le lieu exact de sa naissance. Il se dirige peut-être à l’aide de la position du soleil et des étoiles. Sachant que le saumon a un odorat très développé, mille fois plus puissant que celui d’un chien, certains pensent qu’il retrouve sa route grâce à l’odeur des rivières ».

Le Canada et sa province francophone… cela nous paraît si plein de pittoresque et de nature que l’on s’en contenterait presque. On peut. Mais ce serait faire fi de la réalité et de l’histoire. L’accent n’empêche guère la violence. La violence qui peut être des plus terribles lorsqu’elle s’exerce, comme ailleurs, sur des minorités. Ici les indiens Mi’gmaq (dont le nom, aussi parfois écrit Micmac, n’a rien à voir avec l’expression française qui désigne une embrouille, même si côté embrouille ils en ont subi quelques-unes) et les « incidents » qui se produisirent en 1981 sur la réserve de Restigouche (devenue Listuguj depuis 1992) : des centaines de policiers pour saisir des filets et interdire la pêche aux indiens, alors que cela faisait partie de leur droits reconnus.

Un poisson sur la lune, David Vann (par Catherine Dutigny)

Ecrit par Catherine Dutigny/Elsa , le Mardi, 26 Mars 2019. , dans Roman, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Gallmeister

Un poisson sur la lune, février 2019, trad. américain Laura Derajinski, 288 pages, 22,20 € . Ecrivain(s): David Vann Edition: Gallmeister

 

Autopsie d’un suicide.

« Le problème de Jim, c’est qu’il n’arrive pas à entrer dans sa propre vie, et il va laisser cela en héritage » (p.84).

Jim, 39 ans, a quitté l’Alaska direction la Californie, pour rejoindre son frère Doug qui va l’escorter dans un mini road trip, le conduisant chez un psychiatre, chez ses parents, auprès de ses ex-femmes, de ses enfants, et de quelques amis.

« On » pense que cela va l’aider à combattre ses troubles psychiques qui ressemblent à ceux d’une psychose maniaco-dépressive. « On », c’est bien entendu le médecin, mais aussi et surtout ce frère plus jeune tellement subjugué par la personnalité de l’aîné, dépassé par le mal dont celui-ci souffre et qui vit dans les souvenirs du temps où tout allait bien, celui des chasses et des pêches de leur enfance, des interminables parties de cartes et de leur ancienne complicité. « On », ce sont aussi tous ceux que Jim va croiser sur sa route et qui veulent soit ne pas voir sa souffrance, soit sincèrement l’écarter de ses pensées suicidaires.

Le Nouveau, Philippe Sollers (par Jean-Paul Gavard-Perret)

Ecrit par Jean-Paul Gavard-Perret , le Mardi, 26 Mars 2019. , dans Roman, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Gallimard

Le Nouveau, mars 2019, 144 pages, 14 € . Ecrivain(s): Philippe Sollers Edition: Gallimard

 

Qui donc sinon Sollers ?

Qu’on le veuille ou non la littérature française ne serait pas ce qu’elle est sans Philippe Sollers. Rares sont de la part d’un écrivain des œuvres aussi diverses : de Paradis (un chef d’œuvre) à Femmes (un best-seller), des œuvres de fiction à celles de philosophe (même s’il ne s’est jamais pris pour tel).

Passant désormais à la fiction courte comme si – avec l’âge – il fallait au créateur ramasser son propos afin de lui donner plus de force, Sollers crée du nouveau avec Le Nouveau. Ce titre est le nom du bateau de l’arrière grand-père de l’auteur. Il fut aussi galopin que lui et son bateau lui servit à retrouver une belle étrangère du côté de l’Irlande. Et qu’importait la force des vents.

A partir de là « nous sommes dans le sud-ouest de la France, vers Bordeaux et ses grands environs, d’où l’ensemble de l’Histoire, peu à peu, se dévoile ». Et les bords sont grands dans cette révision générale de l’histoire au moment où elle claudique (euphémisme) devant les catastrophes annoncées : climatique d’une part et économique de l’autre sous la pression de la féodalité capitaliste mondialisée.

Article 36, Henri Vernet (par Stéphane Bret)

Ecrit par Stéphane Bret , le Lundi, 25 Mars 2019. , dans Roman, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Jean-Claude Lattès

Article 36, février 2019, 400 pages, 20 € . Ecrivain(s): Henri Vernet Edition: Jean-Claude Lattès

 

Le genre du polar est bien établi dans la littérature française, celui de la fiction politique nous est moins familier, même si certains auteurs s’y sont consacrés avec un certain succès, tel Marc Dugain.

Henri Vernet, journaliste politique, a tenté une synthèse des deux genres dans Article 36.

Le roman commence par la proclamation de l’état de siège en ce début de janvier 2020. La France est submergée par une vague d’attentats terroristes, et elle ne parvient toujours pas à résoudre les problèmes de fond qui se posent au pays depuis plusieurs décennies : insécurité, chômage, banlieues en déshérence. Le Président de la République, Cardignac, fait appel à un général, Gerfaut, pour la mise en œuvre de cette Mesure. Ce général aurait contribué à sauver des Yézidis durant le conflit en Irak et en Syrie. Il peut faire penser au général de Villiers, entré en conflit au début du quinquennat avec le président Macron, à propos du budget des armées.

Berlin on/off, Julien Syrac (par Marc Ossorguine)

Ecrit par Marc Ossorguine , le Vendredi, 22 Mars 2019. , dans Roman, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Quidam Editeur

Berlin on/off, avril 2018, 142 pages, 15 € . Ecrivain(s): Julien Syrac Edition: Quidam Editeur

 

Berlin. Ach ! Berlin ! Pas besoin de « sein ein Berliner » pour que cette ville-là occupe une sacrée place dans nos repères culturels européens. Dans nos mythologies européennes, même. Une sacrée place, voire, pour certains, une place sacrée. Berlin. La VILLE. La capitale coupée en deux, fracturée, recollée… Mais sans doute pas libérée pour autant. La ville des rencontres les plus improbables. Celle des alternatives les plus radicales. La ville de toutes les « Kombinationen » entre les mots, les musiques, les couleurs, les ruines et les illusions, les espoirs. Une ville d’histoire du futur qui passe lentement dans nos mémoires, faisant ronfler mille échos.

Si l’on sait comment s’appelle cette ville, ses quartiers, on ne sait comment se nomme ce jeune français qui s’y fait flâneur de ses mythes et de ses mirages. Trois étapes à la manière d’un road movie qu’aurait pu tourner Wim Wenders (Der Himmel über BerlinLes Ailes du désir !). Ange aussi tombé du ciel, apprenti de l’humain et de la ville, il exerce d’étonnantes activités. Etonnantes de trivialité et d’absurdité.