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Recensions

Requiem pour une République, Thomas Cantaloube / Frakas, Thomas Cantaloube (par Jean-Jacques Bretou)

Ecrit par Jean-Jacques Bretou , le Mardi, 06 Juillet 2021. , dans Recensions, Les Livres, Polars, La Une Livres, Roman, Gallimard

Edition: Gallimard

Requiem pour une République, Thomas Cantaloube, Folio Policier, avril 2021, 544 pages, 9,20 €

Frakas, Thomas Cantaloube, Gallimard Série Noire, avril 2021, 420 pages, 19 €

 

Requiem pour une République et Frakas ont pour point commun d’être deux romans policiers historiques se déroulant au début de la Ve République. Le premier couvre la période de septembre 1959 à avril 1962, le second de mai 1962 à août 1962. La première période est celle de la décolonisation algérienne, la seconde, celle de la guerre du Cameroun et le début de la « Françafrique ». Les deux ouvrages ont pour trait commun d’emprunter à la réalité sur fond de fiction pour mieux faire comprendre les enjeux politiques et mercantiles ainsi que le climat et les évènements de ces époques. Ainsi trouve-t-on, par exemple, parmi les héros récurrents des deux volumes, Luc Blanchard, Sirius Volkstrom, Antoine Carrega, des silhouettes de personnes connues qui passent en arrière-plan, telles celles du préfet Papon, du sénateur Mitterrand, de Marcantoni, de Charles Pasqua, de Jean-Marie le Pen, de Jean-Pierre Melville, ou bien celle de Gaston Deferre.

Les Délices de Turquie, Jan Wolkers (par Guy Donikian)

Ecrit par Guy Donikian , le Lundi, 05 Juillet 2021. , dans Recensions, Les Livres, La Une Livres, Pays nordiques, Roman, Belfond

Les Délices de Turquie, Jan Wolkers, juin 2021, trad. néerlandais (Pays-Bas) Lode Roelandt, 188 pages, 14 € Edition: Belfond

 

« J’étais vraiment dans la merde depuis qu’elle m’avait plaqué. Je ne travaillais plus. Je ne mangeais plus. Toute la journée, je restais allongé entre mes draps sales et je collais le nez sur des photos d’elle à poil, si bien que je pouvais m’imaginer voir frémir ses longs cils surchargés de rimmel lorsque je me branlais ».

Ce sont là les premières lignes du roman de Jan Wolkers. Elles donnent le ton d’un texte dont la trame est somme toute banale : le narrateur se fait plaquer par sa femme, il est malheureux parce que toujours amoureux, jusqu’à l’accompagner dans ses derniers moments. En revanche, c’est bien le ton qui donne au texte sa saveur. Est-il osé ? Certes. Est-il cru ? Parfois aussi. Est-il tendre ? A l’évidence oui.

Ce roman, paru aux Pays-Bas en 1969, et en 1976 pour sa première édition chez Belfond, et réédité à plusieurs reprises, est soutenu par une écriture qui recèle une fougue qui ne s’embarrasse pas du superflu, mais qui ne fait pas non plus l’économie du détail, croustillant si besoin est, morbide quand il le faut, et qui vise à foudroyer les méandres d’une société où les non-dits et l’hypocrisie règnent.

Agencement du désert, Carole Mesrobian (par Philippe Leuckx)

Ecrit par Philippe Leuckx , le Vendredi, 02 Juillet 2021. , dans Recensions, Les Livres, Critiques, Essais, La Une Livres, Poésie, Z4 éditions

Agencement du désert, mars 2020, 132 pages, 11 € . Ecrivain(s): Carole Carcillo Mesrobian Edition: Z4 éditions

 

Certains livres sont difficiles à cataloguer, encore faut-il qu’il soit nécessaire de procéder de la sorte. L’essai, sans doute, permet d’être seulement un texte, au sens plein d’une écriture de l’imaginaire. Y entrent de plein droit l’expression autobiographique, les traces de lectures, les rêves enfouis, le désir d’écrire.

Mêlant considérations biographiques, exploration du domaine de la femme, découverte de la Littérature et analyses précises des épigraphes de Stendhal, poèmes de l’auteure, le texte très polysémique de Mesrobian met en lumière le rôle de l’écrit, sa sauvegarde et son effet de catharsis.

Les pages émouvantes de la fille sur la mère (la non-mère), sur les avancées très relatives de la condition de la femme, plongent le lecteur dans une approche humaniste, partageable : l’enfance y a sa fonction (« la pulpe végétale de l’enfance »), « écrire c’est être libre » ou encore « l’Art est un corps qui respire ». Tissant sa recherche sur l’appui d’œuvres comme celles de Huysmans ou de Grünewald, Mesrobian affûte l’outil pour aboutir au travers de Michaux à cette « puissance incantatoire du cri ».

Les féeries profanes, Julien Miavril (par Parme Ceriset)

Ecrit par Parme Ceriset , le Vendredi, 02 Juillet 2021. , dans Recensions, Les Livres, La Une Livres, Poésie

Les féeries profanes, Julien Miavril, Éditions Stellamaris, 2019, 136 pages, 21 €

 

Le titre de ce recueil fait écho à l’expression « féeries profanes » employée par Rimbaud dans son poème Mauvais sang (Une Saison en enfer). La poésie de Julien Miavril a en commun avec celle du célèbre poète maudit d’être d’une extrême intensité, elle remue, secoue, bouleverse les repères de l’ordre établi.

Rimbaud : « Le poète se rend voyant par un long, immense et raisonné dérèglement de tous les sens » (Lettre à Paul Demeny dite Lettre du Voyant).

Le poète Julien Miavril annonce dès le début de son recueil, Les féeries profanes, être porté par une quête d’absolu qui côtoie les rivages de l’inaccessible : « J’ai depuis longtemps cessé de chercher ce qui se trouve sans peine ». Cette quête du Graal est menée essentiellement par l’intermédiaire de la poésie que l’auteur considère comme « un éternel feu nourricier ».

Duende, Jean de Breyne (par Marc Wetzel)

Ecrit par Marc Wetzel , le Jeudi, 01 Juillet 2021. , dans Recensions, Les Livres, La Une Livres, Poésie

Duende, Jean de Breyne, Propos Deux éditions, avril 2021, 158 pages, 14 €

Il existe peu de poètes de la timidité, de la réserve psycho-sociale, puisque la timidité est avant tout une hantise de se montrer trop expressif, alors qu’une ardeur poétique craint de ne l’être jamais assez. Et Jean de Breyne (né en 1943) est un poète de la timidité :

« J’attends ce moment de dire

C’est dans la phrase

Il faut l’entendre

Cela n’est jamais facile

Cependant dite » (p.124)

Il existe, de même, peu de poètes du maintien, de la correction posturale, de la juste appréhension par un corps de ce qu’il lui convient de goûter ou éviter, car la même voix qui, dans le maintien, contrôle la tenue d’un corps entre les autres, donne corps (dans la poésie) à l’entre-tenue des mots. « Vous avez raison tous deux » s’empresse de dire Mr Jourdain aux maîtres à danser et de musique qui logiquement s’empoignent. Notre poète est pourtant un poète du maintien :