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Critiques

Le Comte de Monte-Cristo, Alexandre Dumas (par Didier Smal)

Ecrit par Didier Smal , le Mercredi, 13 Janvier 2021. , dans Critiques, Les Livres, La Une Livres, Roman, Folio (Gallimard)

Le Comte de Monte-Cristo, novembre 2020, 1264 pages, 12,90 € . Ecrivain(s): Alexandre Dumas Edition: Folio (Gallimard)

 

Avant toute chose, célébrons la prouesse technique : Le Comte de Monte Cristo, pour des générations de lecteurs, ça a été deux forts volumes, parfois vieillis parce que lus et relus par une génération précédente, que ce soit au Livre de Poche, en Garnier Flammarion, chez Folio ou chez Marabout – et voici que Folio, à l’occasion du cent cinquantième anniversaire de la disparition d’Alexandre Dumas, le propose en un seul volume. On imagine le travail de mise en page, les difficultés à surmonter : que le texte soit lisible mais que les pages ne se décollent pas au fil de la lecture, bref que le plaisir de lire soit vraiment au rendez-vous. Il l’est, par le choix d’un format légèrement hors normes (plus grand que les Folio habituels, plus petit que les Quarto de chez Gallimard), tout en évitant le problème de lisibilité posé par les volumes de la Pléiade par exemple, et qui permet de savourer à nouveau ce grand roman – mais d’une seule traite.

Le Jardin d’Abdul Gasazi, Chris Van Allsburg (par Yasmina Mahdi)

Ecrit par Yasmina Mahdi , le Mercredi, 13 Janvier 2021. , dans Critiques, Les Livres, La Une Livres, Jeunesse

Le Jardin d’Abdul Gasazi, Chris Van Allsburg, éditions d’Eux, décembre 2020, trad. Christian Duchesne, 28 pages, 17,50 €

 

L’Enchantement

Le Jardin d’Abdul Gasazi, superbe album cadeau, doté d’un ruban doré qui le ferme comme un présent, a été écrit et illustré par l’un des plus grands créateurs de livres-jeunesse, Chris Van Allsburg. Né en 1949 dans le Michigan, vivant à Boston, l’illustrateur américain a été récompensé trois fois par le prix Caldecott. Le titre, Le Jardin d’Abdul Gasazi, est d’emblée mystérieux, pouvant préfigurer un épisode des Mille et une nuits. Abdul, prénom très populaire d’origine arabe, signifie « le serviteur », un être à multiples facettes, pouvant exercer des professions commerciales, diplomatiques, artistiques. Souvenons-nous aussi que le jardin, qui comprend à la fois la notion d’aménagement durable ou saisonnier, est un terrain clos et limité où y sont cultivés des végétaux. Seul, le jardin japonais est entièrement minéral.

La Ravine, Sergueï Essénine (par Léon-Marc Levy)

Ecrit par Léon-Marc Levy , le Mardi, 12 Janvier 2021. , dans Critiques, Les Livres, La Une Livres, Russie, Roman

La Ravine, Ed. Héros-Limite, 2017, trad. russe, Jacques Imbert, 175 pages, 12 € . Ecrivain(s): Sergueï Essenine

 

Quand une écriture atteint un tel dénuement, on ne parle plus d’économie mais carrément de minimalisme extrême. Essénine est un grand poète, nous le savons, et son œuvre poétique est marquée par cette recherche constante de l’économie des moyens, une poésie de l’épure, de l’essentiel, du nécessaire, de la simplicité absolue. Comme dans ces deux strophes du Cantique de la chienne :

 

« Au matin, dans la réserve au seigle,

Où rutile la toile des sacs alignés,

La chienne a mis bas une portée

De sept petits chiots roux.

Mon cœur restera de glace, Éric Cherrière (par Jean-Jacques Bretou)

Ecrit par Jean-Jacques Bretou , le Mardi, 12 Janvier 2021. , dans Critiques, Les Livres, La Une Livres, Roman, Belfond

Mon cœur restera de glace, Éric Cherrière, janvier 2020, 192 pages, 18 € Edition: Belfond

 

Lucien Faure est boulanger de son état et maire d’un petit village de haute Corrèze. Il a perdu son fils au cours de la première guerre mondiale, et de ses deux petits-fils l’un est rentré gueule cassée, et l’autre, le plus jeune, s’est enfuit avec ce dernier dans le bois de sapins épais, profond, non loin de la commune avec le fusil familial. On ne les reverra plus. En janvier 1944, les enfants du village ont repéré le bruit des moteurs des camions Mercedes-Benz L4500A, ceux avec le viseur sur le bout du capot avant. Les Allemands sont de retour. Une colonne de leur convoi va disparaître, être engloutie, les camions éclipsés, par cette forêt épaisse et ténébreuse. Mais, pour cette perte dans cette maudite végétation, les Allemands demandent des comptes, exigent des rétorsions. Il faut vingt-trois morts, de préférence des Juifs. On trouvera des Juifs dans une planque du four à pain du boulanger, on complétera avec des habitants qui n’ont pas l’air « très catholiques ». Et puis après avoir arrosé tout ça avec de l’Alkohol, sous la direction de Lothar von Wissen, on reprendra la direction des bois dans lesquels on s’enfoncera avec pour guides et otages le maire et une dizaine d’autres habitants.

Campagne perdue, Gustave Roud (par Cathy Garcia)

Ecrit par Cathy Garcia , le Lundi, 11 Janvier 2021. , dans Critiques, Les Livres, La Une Livres, Poésie

Campagne perdue, Gustave Roud, éditions Fario, octobre 2020, 112 pages, 14 €

Campagne perdue, « certes, mais une campagne transfigurée par le poème, et par là retrouvée, au moins pour un temps », comme l’écrit si justement Stéphane Pétermann dans sa postface. Postface dans laquelle il explique aussi que ce livre, paru en 1972, fut le résultat d’une longue genèse, les premiers jalons ayant été posés en 1933, à la mort de la mère de Gustave Roud, mais ce n’est que 30 ans plus tard qu’un projet littéraire, qui nécessitera encore de longues années de décantation, aboutira à une première publication à la Bibliothèque des Arts de Lausanne, en avril 1972 donc.

Campagne perdue est un tissage de proses écrites dans le Journal de l’auteur entre 1918 et 1963 avec des poèmes ayant paru pour la plupart en revues entre 1919 et 1957, des écrits glanés par le poète en marche à travers le Haut-Jura, sous le regard lointain de ses ancêtres paysans du côté maternel. En marche aussi à travers le temps, un demi-siècle qui a transformé les paysages et les hommes qui les habitent et les travaillent. Campagne perdue est un vibrant hommage à tous ces travailleurs et tout particulièrement aux laboureurs, aux faucheurs qui sous sa plume s’auréolent d’une lumière quasi sacralisée. La beauté de ces hommes, qui sont au centre de l’attention de l’auteur – qui a d’ailleurs pas mal photographié ces vigoureux corps paysans – y est soulignée, subtilement érotisée même.