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Articles taggés avec: Leuckx Philippe

Le jardin sous la neige, Jean-Michel Maulpoix (par Philippe Leuckx)

Ecrit par Philippe Leuckx , le Vendredi, 19 Mai 2023. , dans La Une Livres, Les Livres, Critiques, Mercure de France, Poésie

Le jardin sous la neige, Jean-Michel Maulpoix, Mercure de France, mars 2023, 128 pages, 16 € . Ecrivain(s): Jean-Michel Maulpoix Edition: Mercure de France

 

Lyrisme et mélancolie se retrouvent dans ce cinquantième livre de l’auteur, né en 1952 et souvent fêté. Dernière bourse Goncourt de la poésie, Maulpoix est assurément l’un de nos meilleurs poètes de langue française mais aussi un essayiste exigeant, fervent défenseur de Bonnefoy, Verlaine. On lui doit ainsi le brillant Les 100 mots de la poésie (PUF, 2018).

Les poèmes repris sous le titre de la neuvième et dernière partie du livre disent combien la saison morte abreuve de chagrin, de nostalgie, pour l’âge, pour la femme aimée. « A la saison froide » sert d’anaphore à ces textes qui disent le délitement, la perte, les regrets, la solitude.

En brèves proses, tout est suggéré, évoqué dans une langue fluide, ponctuée des tirets d’un dialogue de l’auteur avec soi, puisqu’il ne faut pas « se résigner à tituber » mais poursuivre l’écriture coûte que coûte. Bien sûr, il y a les auxiliaires du rêve, de l’imagination et du sommeil, afin que tout ne soit pas perdu.

La Bibliothèque de Rilke, Harri Veivo (par Philippe Leuckx)

Ecrit par Philippe Leuckx , le Vendredi, 12 Mai 2023. , dans La Une Livres, Les Livres, Recensions, Essais, Pays nordiques, Cheyne Editeur

La Bibliothèque de Rilke, Harri Veivo, Cheyne Editeur, mars 2023, 64 pages, 17 € Edition: Cheyne Editeur

 

Voilà un petit livre inclassable, dû à un auteur finlandais, amoureux des livres et de la culture française. Le titre résonne à la fois comme un hommage à l’auteur allemand, à la « bibliothèque », et à toutes les expériences de vie que la mémoire (celle aussi de la lecture) engrange, le long de ses parcours. Le prosateur de ce beau livre (sept sections aux titres singuliers) donne comme sous-titre « Essais de voix », à entendre comme une réflexion sur la mémoire : celle des faits enregistrés par l’auteur enfant, par d’autres, historiques ou très banals.

Un trauma agite pourtant ce texte, d’un flot de violence, l’explosion due à un attentat qui a touché, entre autres victimes, en 2016, Harri Veivo. Il y revient comme à un fait déterminant, celui qui l’a privé d’une partie de son ouïe. Autre traumatisme : la photo des corps des victimes des camps, sur un char, découverte par un enfant qui ne comprend rien à ce qu’il voit.

Soutine et son temps, Emil Szittya (par Philippe Leuckx)

Ecrit par Philippe Leuckx , le Vendredi, 21 Avril 2023. , dans La Une Livres, Les Livres, Arts, Recensions

Soutine et son temps, Emil Szittya, Éditions du Canoë, mars 2023, 112 pages, 15 €

 

Voici la réédition d’un ouvrage publié en 1955 par l’essayiste hongrois Emil Szittya (1886-1964). Le titre résume bien l’entreprise : cerner Soutine, son environnement artistique, son époque, celle de l’école de Paris, regroupant nombre d’étrangers notoires.

De la formation de Soutine aux années de guerre, l’essayiste suit les longs développements artistiques et créatifs d’une personnalité, rebelle, difficile à saisir, assez misanthrope, née juif en Lituanie, à la fin du XIXe siècle.

Haineux, ne croyant guère à l’amitié, farouchement indépendant, d’une hygiène toujours douteuse, Soutine fut un solitaire frustré, fréquentant les bordels, s’adonnant à la boisson, n’ayant connu pour ainsi dire aucune relation amoureuse durable. D’une jalousie féroce à l’égard des autres artistes (Krémègne, Modigliani, Picasso…), il connut à Paris (Montparnasse) une vie misérable durant de nombreuses années.

La lumière de ma mère, Mehdi Charef (par Philippe Leuckx)

Ecrit par Philippe Leuckx , le Jeudi, 30 Mars 2023. , dans La Une Livres, Les Livres, Recensions, Biographie

La lumière de ma mère, Mehdi Charef, éditions Hors D’atteinte, mars 2023, 176 pages, 15 €

 

Après le beau livre sur son père (La Cité de mon père), le cinéaste et écrivain d’origine algérienne publie un admirable livre sur sa mère.

La mère, figure entre toutes, reçoit un hommage ciselé dans la tendresse, la vénération et la pudeur. Elle a vécu en Algérie jusqu’à la fin du conflit, est venue en France, a vécu dans le bidonville de Nanterre et a élevé huit enfants. Elle, qui a toujours parlé l’arabe, ne sait ni lire ni écrire mais s’est très vite intégrée à la culture française dans laquelle elle a voulu que ses enfants se développent. Charef, en très courts chapitres, restitue l’histoire, le vécu et le quotidien de celle qui l’a porté neuf mois.

Tout repasse : l’empreinte du pays natal, les gens qu’on a quittés, les habitudes, les mœurs, les us et coutumes, les habitudes des femmes, le lent apprentissage de l’ailleurs. Dans une langue, à la fois classique, chaleureuse, lyrique, Mehdi Charef donne vie et parfum à celle qui a toujours souhaité le meilleur pour les siens, qui a connu le plus grand chagrin, celui de la perte de l’une de ses filles, à l’âge de huit ans, là-bas au pays. En filigrane, c’est le pays d’origine que l’on suit, épisode après épisode, au moment même de la guerre quand le futur cinéaste avait à peine dix ans.

La Rafle du Vel d’Hiv, Laurent Joly (par Philippe Leuckx)

Ecrit par Philippe Leuckx , le Vendredi, 17 Mars 2023. , dans La Une Livres, Les Livres, Recensions, Histoire, Grasset

La Rafle du Vel d’Hiv, Laurent Joly, Grasset, mai 2022, 400 pages, 24 € Edition: Grasset

 

Voilà un livre-événement qui va réveiller les consciences car il est la somme de recherches sur l’histoire de l’Occupation et d’un de ses plus sinistres faits, la Rafle de juillet 1942 qui coûta la déportation à plus de treize mille Juifs. Basé sur une documentation féconde (une soixantaine de pages de références bibliographiques, en fin de volume), l’essai historique fouille véritablement les circonstances qui préparèrent l’horreur.

Jamais un livre sur le sujet ne mit en cause d’une façon aussi argumentée et éclairante que ce document de Joly, qui pointe la totale responsabilité de la Police parisienne qui usa de tous ses ressorts pour « réussir » l’opération et faire plaisir (que de zèle du côté de nombre de commissaires) à l’Occupant. Bien sûr, Bousquet, Darquier de Pellepoix et autres pontes du gouvernement de Vichy sont aux sources mêmes de la tragédie.