A mi-chemin entre l’enquête historique et sociologique et le récit empathique, qui établit des passerelles entre les trous de l’histoire, l’ouvrage d’Irène Frain s’attache aux années de la vie de Marie Curie où, après la mort accidentelle de son époux Pierre et après l’obtention de son premier prix Nobel, de physique, pour leurs travaux communs, celle qu’on appelait « la veuve illustre » vit une passion amoureuse avec le phycisien Paul Langevin. Cette liaison secrète, qui vira au scandale parce que Paul était marié, s’étendit probablement de 1910 à 1912, année où la société et la morale les forcèrent à interrompre leur histoire d’amour. Au début du XXe siècle, l’adultère était un délit et, en raison de la célébrité des amants, l’affaire de cœur menaça de tourner à l’affaire d’Etat.
Les opposants dans la vie privée (Jeanne Desfosses, femme de Paul, la mère de Jeanne et sa sœur Euphrasie Bourgeois) se doublent en effet d’opposants publics, en les personnes du beau-frère de Paul, le rédacteur et patron de presse Henri Bourgeois, et de Gustave Téry, journaliste à l’Oeuvre, organe d’extrême-droite antidreyfusard, puis en atteignant les membres de l’Université et jusqu’à ceux de l’Académie des sciences, où Marie se présente à l’automne 1910. Lorsque la presse s’en mêle, les héros sont malmenés.