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Recensions

Les 7 vies de Melle Belle Kaplan, Gilles Paris (par Philippe Leuckx)

Ecrit par Philippe Leuckx , le Jeudi, 30 Novembre 2023. , dans Recensions, Les Livres, La Une Livres, Roman, Plon

Les 7 vies de Melle Belle Kaplan, Gilles Paris, éd. Plon, septembre 2023, 224 pages, 19,90 € . Ecrivain(s): Gilles Paris Edition: Plon

 

L’auteur, dont j’ai aimé Certains cœurs lâchent pour trois fois rien, Le bal des cendres, et Un baiser qui palpite là, comme une petite bête, a souhaité, dans ce dernier roman, très romanesque, brosser le portrait d’une femme, très belle, au passé mouvementé, qui a pris l’habitude de changer de nom et de vie, d’éveiller des mystères, d’échapper aux rumeurs, en dépit d’une célébrité voyante par son statut d’actrice hollywoodienne.

Elle collectionne les vies comme on le fait de rôles.

Orpheline, elle a connu les affres d’un orphelinat, en compagnie de son frère Ben, a connu des placements, a vécu nombre de vies.

Elle collectionne les noms Grace, Paradis, Talia, Belle.

Elle veut à tout prix qu’on ne lui rappelle pas des épisodes moins glorieux de son existence.

Elle construit celle-ci à force de prénoms et de coiffures et d’apparences.

Chien Brun, Jim Harrison (par Marie-Pierre Fiorentino)

Ecrit par Marie-Pierre Fiorentino , le Mercredi, 29 Novembre 2023. , dans Recensions, Les Livres, La Une Livres, USA, Roman, Folio (Gallimard)

Chien Brun, Jim Harrison, Folio, octobre 2023, trad. anglais (USA), Brice Matthieussent, 128 pages, 3 € . Ecrivain(s): Jim Harrison Edition: Folio (Gallimard)

 

Chien Brun, la quarantaine déglinguée, est en couple avec Shelley. Cette étudiante prépare un diplôme d’anthropologie tout en se risquant à l’analyse de son compagnon, plus enclin à noyer ses déboires dans de mémorables cuites qu’à s’épancher sur le divan d’un psy. Mais les sentiments de la jeune femme sont-ils sincères ou ne voit-elle dans Chien Brun qu’un descendant des Amérindiens – qu’il n’est, malgré les apparences, pas –, capable de lui indiquer une sépulture rare dont les fouilles la rendraient célèbre dans son milieu ?

« Shelley et moi sommes ensemble depuis environ deux ans, et notre amour se fonde sur une petite entourloupe, sur un mensonge véniel », reconnaît, lucide, Chien Brun dans ce texte où le « je » n’est jamais larmoyant. Car Chien Brun se raconte avec une déconcertante sincérité, probable recette de l’attachement des lecteurs d’Harrison et de la prédilection de celui-ci pour sa créature puisque le personnage reviendra par cinq fois dans l’œuvre du romancier (1).

Le Train des enfants (Il treno dei bambini), Viola Ardone (par Marie Duclos)

, le Mardi, 28 Novembre 2023. , dans Recensions, Les Livres, La Une Livres, Roman, Le Livre de Poche, Italie

Le Train des enfants (Il treno dei bambini), Viola Ardone, Le Livre de poche, 2022, trad. italien, Laura Brignon, 288 pages, 8,40 € Edition: Le Livre de Poche

Le roman débute à Naples en 1946 où vit Amerigo, encore garçonnet, seul avec sa mère Antonietta dans un petit appartement mais la plupart du temps dans une rue peuplée de voisins, de voisines qui s’interpellent et partagent un quotidien précaire, sonore et coloré.

Amerigo va découvrir un autre monde, celui du Nord de l’Italie, celui d’une famille nombreuse « d’obédience » communiste et celui de la musique. Pour cela il a fallu prendre Il treno dei bambini, malgré les rumeurs insistantes, il a fallu attendre à l’arrivée qu’une personne le choisisse… Ce sera Derna dévouée à la cause politique. Et c’est Amerigo qui raconte, qui nous emmène dans ses pensées au quotidien, ses peurs, ses espoirs, ses réussites en calcul et ses déceptions, son analyse du monde adulte et des sentiments avec un mélange de légèreté et de philosophie :

« L’après midi, à l’atelier, alors qu’on cirait un piano qu’on devait rendre, Alcide m’avait dit que les enfants méchants ça n’existe pas. C’est que des préjugés, c’est quand tu penses quelque chose avant même de le penser parce que quelqu’un te l’a mis dans la cervelle et qu’il y est resté bien planté ».

L’Arnitoile, En attendant la parque, Patryck Froissart (par Patrick Devaux)

Ecrit par Patrick Devaux , le Mardi, 28 Novembre 2023. , dans Recensions, Les Livres, La Une Livres, Poésie

L’Arnitoile, En attendant la parque, Patryck Froissart, Sinope éditions, Poèmes, septembre 2023, 92 pages, 8 € . Ecrivain(s): Patryck Froissart

 

La vie, tisserande d’une toile en continu, laisse-t-elle une chance de s’en sortir quand il est impossible de s’en échapper sinon avec la fin connue de tous : « le talent tors/ la pensée torve/

tisserands retors que nous sommes/ retorsadons le fil de haine/ lançons au travers de nos trames/nos navettes dans les foulées/tordues de nos tortueux consorts » ?

On comprend que dans cette Arnitoile (le mot veut dire toile d’araignée en wallon), les mots eux-mêmes et les allitérations sont pris au piège du son « fa si la » évoqué à plusieurs reprises : « porte à faux/ ce bois dévergondé divorçant du chambranle/ sur la fugue infinie des unions dégondées/ branle et bat et m’obsède/ fa si la ».

Cette volupté de mots saisissants à bien des égards m’a fait penser à Gérard de Nerval (précurseur du surréalisme) donnant aux mots un sens à la fois profond et obscur.

À pied d’œuvre, Franck Courtès (par Gilles Cervera)

Ecrit par Gilles Cervera , le Jeudi, 23 Novembre 2023. , dans Recensions, Les Livres, La Une Livres, Récits, Gallimard

À pied d’œuvre, Franck Courtès, Gallimard, août 2023, 192 pages, 18,50 € Edition: Gallimard

 

 

Le choix de soi de Franck Courtès

À pied d’œuvre publié à la Nrf devait s’appeler Manoeuvre. Ça collait mieux. La Nrf avait déjà dans ce catalogue un livre sous ce beau titre.

Un brain-storming plus tard, Courtès a son titre !

Courtès est bel et bien le manœuvre qui se tape les étages, descend les charges, braque ses ménisques, abîme ses mains. En sang ses mains et à l’œuvre. Courtès est de ces prolétaires du stylo dont l’âme vole entre parts d’ange et d’encre.