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Les éditions de Minuit

Les Éditions de Minuit sont une maison d'édition française, fondée par Jean Bruller et Pierre de Lescure en 1941, pendant l'Occupation allemande de la France. En février 1942 est publié le premier ouvrage, Le Silence de la mer de Vercors (pseudonyme de Bruller).


Que du vent, Yves Ravey (par Gilles Cervera)

Ecrit par Gilles Cervera , le Lundi, 07 Octobre 2024. , dans Les éditions de Minuit, Les Livres, Critiques, La Une Livres

Que du vent, Yves Ravey, Les Éditions de Minuit, août 2024, 123 pages, 17 € Edition: Les éditions de Minuit

 

Le goût de l’insipide

L’art du titre selon Yves Ravey.

Nous avions commencé à lire Ravey avec le pur, synthétique et extrême Le Drap. Beau titre pour débuter la lecture d’un auteur dont on ne se lasse pas depuis des décennies. Livre après livre, tous les deux ans, Ravey nous ravit.

Ce titre Que du vent, d’aujourd’hui, excelle par son exactitude scientifique et non météorologique. Rien ne souffle sur cette histoire hormis l’ennui des lotissements, la platitude des sentiments, les piscines nulles à pleurer creusées entre deux entrepôts où notamment du commerce hasardeux de discount lessiviel venu d’Afrique.

Ceux qui appartiennent au jour, Emma Doude Van Troostwijk (par Gilles Cervera)

Ecrit par Gilles Cervera , le Mardi, 11 Juin 2024. , dans Les éditions de Minuit, Les Livres, Recensions, La Une Livres, Roman

Ceux qui appartiennent au jour, Emma Doude Van Troostwijk, éditions de Minuit, janvier 2024, 174 pages, 17 € Edition: Les éditions de Minuit

 

Celle qui appartient au Livre

Lire Emma Doude Van Troostwijk s’impose. Son nom sera vite dans nos têtes et entre nos lèvres même si dur à articuler parce qu’issu d’une autre langue.

En l’éditant, les éditions de Minuit renouent avec un passé de bribes, de voix, une littérature des petites phrases, du souffle court qui court de roche en roche et de nuée en nuage. Où tout est clair.

C’est un premier roman, il s’intitule Ceux qui appartiennent au jour.

Pour plusieurs du roman, la nuit approche mais tant que la nuit n’est pas, le jour est leur appartenance. Là qu’ils dansent, là qu’ils se rassemblent, mangent (beaucoup de repas), dorment, surtout se réveillent : C’est l’heure des corn-flakes.

Envoyée Spéciale, Jean Echenoz (par Galien Sarde)

Ecrit par Galien Sarde , le Jeudi, 02 Mai 2024. , dans Les éditions de Minuit, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Roman

Envoyée Spéciale, Jean Echenoz, Les Éditions de Minuit, 2016, 320 pages, 18 € . Ecrivain(s): Jean Echenoz Edition: Les éditions de Minuit

 

Court-circuitage et supplément d’âme esthétiques

Entre autres choses, les dialogues d’Envoyée spéciale, de Jean Echenoz, sont spécialement sophistiqués. Une part de leur virtuosité tient dans l’ordonnance des répliques qui les constituent : sans tirets, sans guillemets, pour les fondre dans le récit et le faire pétiller, mais par contre avec des verbes de paroles audacieux ou encore d’étranges substituts d’eux. Un exemple de ce dernier phénomène survient dès l’incipit, quand ce qu’avance le général Bourgeaud : « Épargnez-moi ces réflexions, Objat » n’est pas suivi d’une incise évidente telle que : « a dit le général en se raidissant », mais d’une autre qui fait l’économie du verbe de paroles, éludé, ou plutôt intégré dans un verbe d’action : « s’est raidi le général ».

Histoires de la nuit, Laurent Mauvignier (par Philippe Leuckx)

Ecrit par Philippe Leuckx , le Vendredi, 19 Mars 2021. , dans Les éditions de Minuit, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Roman

Histoires de la nuit, septembre 2020, 640 pages, 24 € . Ecrivain(s): Laurent Mauvignier Edition: Les éditions de Minuit

 

L’auteur de Des hommes, et Dans la foule, né en 1967, pensionnaire à la Villa Médicis, a déjà derrière lui une œuvre singulière, reconnue. Son dernier livre, un roman, constitue un premier point d’aboutissement d’une littérature exigeante, à la prose lente, réfléchie, très descriptive.

L’histoire se déroule, en une seule journée, au centre de la France dans un bled, La Bassée. Y vivent les quatre personnages de l’intrigue : la peintre parisienne Christine venue là se réfugier ; un couple, Patrice et Marion, et leur petite fille de dix ans, Ida.

On prépare la fête des « quarante ans » de Marion. Tout le monde s’affaire : Patrice, parti en ville, chercher de quoi se sustenter ; Christine, de son côté, a prévu les gâteaux de la fête. Ida aidera les deux pour que tout soit réussi.

Banal, me direz-vous, sauf que l’intrusion d’individus louches dans le hameau enclenche chez le lecteur et les personnages une histoire « de nuit », vraiment infernale.

La soirée, bien préparée, avait ses horaires, ses surprises.

Éparses, Voyage dans les papiers du ghetto de Varsovie, Georges Didi-Huberman (par Gilles Banderier)

Ecrit par Gilles Banderier , le Lundi, 23 Novembre 2020. , dans Les éditions de Minuit, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Histoire

Éparses, Voyage dans les papiers du ghetto de Varsovie, février 2020, 170 pages, 16,50 € . Ecrivain(s): Georges Didi-Huberman Edition: Les éditions de Minuit

 

Si célèbre soit-il, le ghetto de Varsovie ne se visite pas, contrairement à d’autres, comme ceux de Venise ou de Prague. Avec le sérieux méthodique qui caractérise ce peuple, les Allemands l’ont entièrement détruit après l’insurrection d’avril 1943. Lorsque la capitale polonaise fut reconstruite après-guerre, on ne se soucia pas de l’ancien ghetto et seul un œil aiguisé peut en apercevoir le fantôme. En vérité, la mémoire du ghetto n’est pas inscrite dans la topographie de Varsovie. Elle se trouve à l’Institut historique juif de la ville, où sont conservés les documents patiemment réunis par l’historien du ghetto, Emanuel Ringelblum (1900-1944), puis enterrés dans des caisses de fer-blanc et de grands bidons de lait, et ainsi soustraits aux flots du temps. Ces quelque 35.000 pages reposaient dans leurs abris souterrains, tandis qu’à la surface les troupes du général SS Jürgen Stroop anéantissaient le ghetto et ceux qui y vivaient. Elles s’y trouvaient toujours lorsque, deux ans plus tard, Hitler, enfermé dans son bunker, mit fin à une existence trop longue. En 1946 et 1950, on découvrit ces deux ensembles de documents (un troisième demeure introuvable), dans un piteux état : les caisses en fer, qui n’étaient pas étanches, avaient été envahies par l’eau.