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La Une Livres

La Maison des chagrins, Victor del Árbol

Ecrit par Marc Ossorguine , le Mardi, 13 Mai 2014. , dans La Une Livres, Les Livres, Critiques, Polars, Roman, Espagne, Actes Noirs (Actes Sud)

La Maison des chagrins (Respirar por la herida) traduit de l’espagnol par Claude Bleton, septembre 2013, 480 pages, 23,50 € . Ecrivain(s): Victor del Arbol Edition: Actes Noirs (Actes Sud)

 

« Evoquer le passé et le rattacher au présent pouvait être aussi épuisant qu’explorer un labyrinthe dont on ne connaîtrait qu’une partie ».

Pour parler de la Maison des chagrins, c’est d’abord un propos de Goethe qui nous revient. Un propos où il s’étonne et se félicite – à propos de Jacques le fataliste de Diderot – d’être capable d’engloutir une telle portion d’un seul coup. C’est bien ce que l’on peut ressentir après avoir dévoré ces presque 500 pages en quelques heures. C’est qu’il ne sont pas si fréquents les récits et les livres qui vous attrapent et ne vous laissent plus de répit avant la dernière page, voire au-delà. Ce fut le cas pour nous avec La tristesse du Samouraï, cela a de nouveau été le cas avec cette Maison des chagrins.

Il y a quelque chose de désespérant et de vertigineux dans les récits multiples qui se croisent et se lient inextricablement au fil des chapitres. Le titre original insiste sur la blessure que chacun porte et avec laquelle il vit. Blessure par laquelle chacun vit, continue de vivre ou de survivre. Des blessures morales qui sont aussi des blessures physiques qui ont marqué profondément les corps : genou et main mutilés, visage défiguré par une cicatrice, stérilité...

Narcisse et ses avatars, Yves Michaud

Ecrit par Arnaud Genon , le Mardi, 13 Mai 2014. , dans La Une Livres, Les Livres, Critiques, Essais, Grasset

Narcisse et ses avatars, avril 2014, 208 pages, 17 € . Ecrivain(s): Yves Michaud Edition: Grasset

 

Décryptage du présent

Le monde actuel est en pleine mutation. Le constat est souvent fait et laisse place aux jugements divers, nostalgiques, passéistes, alarmistes pour la plupart. Notre époque est le lieu de déplacements, de « basculements », donc, mais peu nombreux sont ceux qui nous amènent à les comprendre ou mieux encore, à les penser.

Yves Michaud dans Narcisse et ses avatars est de ceux-là. Et son essai, qui prend la forme d’un abécédaire en vingt-six rubriques – parmi lesquelles avatar, liberté, people, sexe, YouTube, zapping… – est en ce sens salutaire : il nous donne à saisir le présent dans la multiplicité de ses entrées. Pas de système ici, mais un réseau qui donne corps et cohérence à cet aujourd’hui qui nous échappe parfois et que l’auteur relie à cet hier auquel nous nous raccrochons : « Pour marquer ces déplacements, j’ai indiqué en ouverture de chaque rubrique quel mot ancien nous aurions employé, il n’y a pas si longtemps, pour parler de quelque chose d’approchant ». Ainsi, « Kit remplace corps » et « Urgence remplace temps ».

Les fées penchées, Véronique Janzyk

Ecrit par MCDEM (Murielle Compère-Demarcy) , le Mardi, 13 Mai 2014. , dans La Une Livres, Les Livres, Critiques, Nouvelles

Les fées penchées, ONLIT Editions, e-book, 1ère mise en ligne 02/2014 : www.onlit.net . Ecrivain(s): Véronique Janzyk

Après Auto et La Maison, sortes de variations sur un sujet flirtant avec les deux genres de la poésie et de la nouvelle, Véronique Janzyk signe avec Les Fées penchées, e-book publié par les éditions ONLIT, un recueil de nouvelles où les fées sont de guingois, mais néanmoins fées. Car, ainsi que l’écrit Franz Bartelt cité en exergue du livre : Une fée qui a perdu sa baguette n’est peut-être plus tout à fait une fée, mais elle n’est pas pour autant une femme ordinaire (source : Décharge 161, mars 2014, Revue de poésie trimestrielle).

Chacune des quinze nouvelles qui composent ce recueil d’une sensibilité et d’une sobriété d’écriture propre au tour de plume de Véronique Janzyk, scrute l’esprit penché qui disjoncte doucement (À propos, site en ligne ONLIT), raconte ceux qui déjantent et vont déséquilibrer des vies cependant singulièrement vibrantes et résonnantes par le fil quasiment sans balancier de leurs vertiges d’existence traversant des vides retenus au bord par telle ou telle raison suffisante de continuer (un désir de créativité, l’amour, des rencontres, le désir de continuer dans l’obscur ou la « folie » aussi, à transcender…). Des existences au bord des présences et du présent, dans ces marges de terrains vagues, fertiles cependant par les trash de fragilité qu’elles dégagent, élaguent, étoffent, mettent en scène/en œuvre. Des existences « au bord », retenues debout par l’expression même de leurs douleurs.

Un bon fils, Pascal Bruckner

Ecrit par Martine L. Petauton , le Lundi, 12 Mai 2014. , dans La Une Livres, Les Livres, Critiques, Récits, Grasset

Un bon fils, février 2014, 250 pages, 18 € . Ecrivain(s): Pascal Bruckner Edition: Grasset

 

« On appartient au monde qu’on a fait, pas à celui d’où on vient ».

Depuis quelque temps – il en fallait, du temps ! – les publications prolifèrent, ainsi que les témoignages-coups de poing, sur ces enfants de collaborateurs déclarés ; ceux qui se sont « mangé » le père facho, le traîneur des rues de Sigmaringen, l’antisémite bien marqué à la Céline – le talent en moins, souvent. On a lu Marie Chaix et ses Lauriers du lac de constance, plus récemment ce Gérard Garouste sorti de ses chefs d’œuvre tourmentés pour décliner dans L’intranquille son insupportable paternel, qui le traitera d’« enjuivé ».

Ils ont eu la totale, les gamins, et plus tard, les adultes issus de là : ces pères ; la violence conjugale, le plus souvent, à la hauteur d’une haine des autres jamais assouvie ; le prosélytisme féroce en guise d’instruction civique, et ces Juifs emportés jusqu’au bout de leur vie ; boucs-émissaires dont le noir, comme on dirait de la lumière stellaire, brilla au-delà même de leur propre mort… Il est des enfers dont on sort, ô combien plus difficilement que le grandir de tout un chacun – disent tous ces échappés, Pascal Bruckner en remarquable porte-drapeau :

Joselito, le vrai, José Miguel Arroyo

Ecrit par Philippe Chauché , le Samedi, 10 Mai 2014. , dans La Une Livres, Les Livres, Critiques, Biographie, Espagne, Récits, Verdier

Joselito, le vrai, traduit de l'espagnol par Antoine Martin, Avril 2014, 288 p. 16,20 € . Ecrivain(s): José Miguel Arroyo Edition: Verdier

 

 

« Au commencement est le silence. C’est du moins ce qui me frappa lorsque j’assistai à ma première corrida, à l’âge de douze ans, il y a tout juste un demi-siècle. J’entendais bien les clameurs, les applaudissements, les sifflets, et surtout les injonctions criées aux protagonistes depuis les gradins… Mais à toutes ces manifestations, les hommes de lumière opposaient le mutisme le plus opaque.  » François Zumbielhl – Le discours de la corrida – Verdier – 2008

Silence des toreros, mutisme absolu de ces hommes de l’éphémère, ils savent que la parole appartient finalement aux autres, à ceux qui voient – de loin – ce qui se joue de près, se sacralise sur le sable. Les toreros parlent peu, écrivent encore moins. Leur histoire, leur roman, leurs rêves, ils l’écrivent sur le sable à cinq heures du soir, et cela suffit semble-t-on comprendre, ou bien laissez- moi seul avec ce taureau, et pour le reste, nous verrons bien !