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Une famille américaine, Ayelet Gundar-Goshen (par Anne Morin)

Ecrit par Anne Morin , le Mardi, 07 Mai 2024. , dans La Une Livres, Les Livres, Critiques, Roman, Presses de la Cité, Israël

Une famille américaine, Ayelet Gundar-Goshen, Les Presses de la Cité, mars 2024, trad. hébreu, Laurence Klein, 365 pages, 23 € Edition: Presses de la Cité

 

Ne se sentir ni d’ici, ni de là-bas : « Parce que nous, les parents, étions des Israéliens qui parlions aussi anglais, alors que lui, notre fils, grandirait en Amérique et serait un Américain qui parlait aussi hébreu » (p.205). C’est la pensée qui vient à Lilach – Lila – au milieu du gué, au milieu de l’histoire.

Un adolescent meurt au cours d’une fête. D’un côté, un adolescent Noir, au regard doux, au corps musclé de géant dont on apprendra qu’il était homosexuel et appartenait à un groupuscule Nation of Islam. De l’autre côté – d’un autre côté –, un adolescent Juif, dans la même classe, petit, maigre, emprunté, qui se fait racketter. Et au centre, au milieu, en toile de fond, l’interrogation d’une mère tiraillée entre ce qu’elle éprouve et ce qu’elle ressent, entre son appartenance et son déracinement, tout se jouant sur fond de violence et d’incompréhension, de fermeture à l’autre. Une mère désorientée : par où commencer ? Où mèneront ses réserves et ses recherches ? Faire profil bas devant la confusion de ses sentiments, de ses appréhensions, de ses lâcher prise.

Moi, le glorieux, Mathieu Belezi (par Gilles Cervera)

Ecrit par Gilles Cervera , le Lundi, 06 Mai 2024. , dans La Une Livres, Les Livres, Critiques, Roman, Le Tripode

Moi, le glorieux, Mathieu Belezi, éd. Le Tripode, mars 2024, 329 pages, 21 € Edition: Le Tripode

 

Baraka, la fin

Moi, le Glorieux sort aux éditions le Tripode qui ont remis toute l’œuvre de Mathieu Belezi sur l’établi.

Il n’y a pas de majuscule dans ce texte, en début de paragraphe ni aux initiales des nom et prénom de l’auteur sur la couverture, mais le titre est en capitales.

MOI, LE GLORIEUX.

Ce livre est fou comme la folie furieuse, de bout en bout. Entre un Louis Ferdinand Céline déjanté, qui racle au fond nos estomacs avec la plume et un Garcia-Marques qui embarque en baroque, Mathieu Belezi nous offre un roman de ouf.

Des destins, William Cliff (par Philippe Leuckx)

Ecrit par Philippe Leuckx , le Vendredi, 03 Mai 2024. , dans La Une Livres, Les Livres, Critiques, Poésie, La Table Ronde

Des destins, William Cliff, La Table Ronde, 2023, 352 pages, 22 € . Ecrivain(s): William Cliff Edition: La Table Ronde

 

Avec la musicalité propre au sonnet, qu’il maîtrise, le poète gembloutois relate en trois cents poèmes quelques reliefs de sa vie. Passent ainsi au crible de son talent les proches, les marraine et parrain, les amis et amants de passage (un bel hommage à Joseph Orban, poète de son état), les souvenirs d’adolescent, ceux du poète en « mansarde » à Bruxelles, les expériences voyageuses, sensuelles.

Il en a connu des destins. Des paysages intérieurs à ceux d’ailleurs (le poète est épris de voyages), voilà comment une vie s’ordonne en sonnets, clairs, efficaces, sensuels, crus et nus comme peut l’être l’âme d’un vrai poète, qui, jamais, n’a renoncé à exposer sa vie, son amour des hommes, ses amours de langues et de poésies, en rameutant le concret comme le sublime, le vrai, l’ordinaire des vies, le banal, l’extraordinaire. Nulle plainte ne vient encombrer la prosodie ; nulle alarme, certes. La voix déroule la vie, sans apprêts, sans moralisme, dans la fluidité narrative des faits vécus, observés, recueillis en sonnets.

Envoyée Spéciale, Jean Echenoz (par Galien Sarde)

Ecrit par Galien Sarde , le Jeudi, 02 Mai 2024. , dans La Une Livres, Les Livres, Critiques, Roman, Les éditions de Minuit

Envoyée Spéciale, Jean Echenoz, Les Éditions de Minuit, 2016, 320 pages, 18 € . Ecrivain(s): Jean Echenoz Edition: Les éditions de Minuit

 

Court-circuitage et supplément d’âme esthétiques

Entre autres choses, les dialogues d’Envoyée spéciale, de Jean Echenoz, sont spécialement sophistiqués. Une part de leur virtuosité tient dans l’ordonnance des répliques qui les constituent : sans tirets, sans guillemets, pour les fondre dans le récit et le faire pétiller, mais par contre avec des verbes de paroles audacieux ou encore d’étranges substituts d’eux. Un exemple de ce dernier phénomène survient dès l’incipit, quand ce qu’avance le général Bourgeaud : « Épargnez-moi ces réflexions, Objat » n’est pas suivi d’une incise évidente telle que : « a dit le général en se raidissant », mais d’une autre qui fait l’économie du verbe de paroles, éludé, ou plutôt intégré dans un verbe d’action : « s’est raidi le général ».

Insomnies intimes, De l’ombre à la lumière, Valérie Fauchet (par Marjorie Rafécas Poeydomenge)

Ecrit par Marjorie Rafécas-Poeydomenge , le Jeudi, 02 Mai 2024. , dans La Une Livres, Les Livres, Recensions

Insomnies intimes, De l’ombre à la lumière, Valérie Fauchet, KDP Amazon, février 2024, 222 pages, 18 €

Les insomnies sont-elles des invitées inattendues, redoutables, comme des mantes religieuses nocturnes prêtes à nous piquer dans le vif de nos blessures ? Ou au contraire, des intimités enfin retrouvées, comme la « Flamme d’une chandelle » (1), pour réveiller le clair-obscur de notre chambre. Après Une voyante passe aux aveux et La vie est une affaire personnelle (trilogie romanesque, Editions Ipanema), Valérie Fauchet nous invite dans ce nouveau livre à apprivoiser nos insomnies de façon créative et poétique, et envisager nos lieux, nos objets autrement, pour mieux nous comprendre et nous surprendre. L’auteure nous livre sans tabou des bouts de sa vie intime romancés, avec poésie et authenticité, en résonnance avec des lieux qui l’ont marquée. Toutes sortes de lieux : des terrasses de café, des chambres d’hôtel, la plage, « des maisons prisons », « des maisons tristesse », « des maisons closes », « des maisons pop », « des maisons sans enfants », « des maisons hantées », « des maisons souvenirs », « des maisons château en Espagne », « des maisons comme des moulins, des maisons vides, des maisons où il ne se passe jamais rien, des maisons sans amour, des maisons en plein carrefour, des maisons qu’on ne voit pas, des maisons qu’on n’aime pas, et des maisons du bonheur ».