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A propos de Freud, une vie, Peter Gay (par Léon-Marc Levy)

Ecrit par Léon-Marc Levy , le Mercredi, 28 Février 2024. , dans La Une Livres, Les Livres, Critiques, Essais, Fayard, En Vitrine, Cette semaine

A propos de Freud, une vie, Peter Gay, Fayard, trad. anglais, Catherine David, 900 pages, 42 € Edition: Fayard

 

La grandeur incomparable de cette « biographie » de Freud tient essentiellement à la rupture des codes établis du genre. La vie de Freud, ses actes et moments, sa famille, son intimité, ne constituent pas, loin s’en faut, la matière de ce livre. Le choix de Peter Gay est de suivre, avec obstination et rigueur, la trace du développement de la pensée de Freud, celle qui mène à la naissance et au développement de la psychanalyse jusqu’à la mort de son créateur. Si des éléments de la vie personnelle de Freud sont évidemment souvent mentionnés, ce n’est qu’en interaction avec son travail et sa pensée théorique. Si « biographie » il y a, c’est celle de la psychanalyse, pas celle de Sigmund-Sigismund-Schlomo-Siggy. C’est assurément en cela que cet ouvrage est précieux, unique. Des biographies de Sigmund, on en connaît de nombreuses, à commencer par celle de Ernest Jones*, le monument historique érigé au maître par l’un de ses disciples. Citons aussi celle de Stefan Zweig*, son ami. Plus récemment, il faut mentionner l’excellent travail d’Elisabeth Roudinesco*.

Les Trois Mousquetaires, Alexandre Dumas (par Didier Smal)

Ecrit par Didier Smal , le Mardi, 27 Février 2024. , dans La Une Livres, Les Livres, Critiques, Roman, Folio (Gallimard)

Les Trois Mousquetaires, Alexandre Dumas, Folio, édition de Gilbert Sigaux, I. D’Artagnan, mars 2023, 560 pages, 7,50 € ; II. Milady, novembre 2023, 560 pages, 7,50 € . Ecrivain(s): Alexandre Dumas Edition: Folio (Gallimard)

L’adaptation cinématographique récente des Trois Mousquetaires par Martin Bourboulon est une catastrophe, tant au point de vue du casting (Eva Green, brune, en Milady, dont la blondeur est vantée à longueur de roman ; des mousquetaires cinquantenaires, un D’Artagnan trentenaire) que du jeu des acteurs (Lyna Khoudri en Constance Bonacieux est fade au possible, et Louis Garrel joue un Louis XIII plus névrosé que nature), et ne parlons pas des scènes de combat hyperboliques (on croit visionner des scènes inédites du Pacte des loups), ou des arrangements pris avec l’histoire narrée par Dumas, entre autres par l’ajout de détails parfois sidérants (D’Artagnan enterré vivant dès les premières scènes – il y a confusion avec l’œuvre de Poe ou Radcliffe). Le seul intérêt qu’elle présente est la réédition en deux tomes des Trois Mousquetaires et donc l’opportunité offerte par l’actualité éditoriale de se replonger dans les aventures de D’Artagnan, Athos, Porthos, et Aramis – mais notons quand même un bémol, d’importance : cette réédition en deux tomes coûte quinze euros contre huit euros pour le même roman en un seul tome chez le même éditeur ; un soupçon d’arnaque à destination d’un public craignant un seul volume fort de onze cents pages ? D’autant que la belle préface de Roger Nimier a désormais disparu.

Jean Rousset, Traduire et compiler le baroque, Maxime Cartron (par Gilles Banderier)

Ecrit par Gilles Banderier , le Lundi, 26 Février 2024. , dans La Une Livres, Les Livres, Critiques, Essais

Jean Rousset, Traduire et compiler le baroque, Maxime Cartron, éditions Droz, février 2023, 114 pages, 18,90 €

 

Rares sont les ouvrages de critique littéraire par rapport auxquels il y a un avant et un après, qui modifient irréversiblement le champ d’une discipline. En général, leur but est d’attirer l’attention sur un chercheur et, si tout va bien, de lui permettre d’obtenir un poste universitaire. Jean Rousset (1910-2002) a publié au moins un ouvrage essentiel, La Littérature de l’âge baroque en France, Circé et le Paon, paru chez José Corti en 1953. Jean Rousset n’a pas inventé le concept de baroque, qui vient du domaine des beaux-arts et fut théorisé par Heinrich Wölfflin (1864-1945), un autre savant suisse (« Bologne en particulier respirait l’esprit des papes, de l’Espagne et du baroque. Là, je compris que ce dernier n’était pas simplement une époque, mais qu’il a l’ampleur d’une puissance vitale », écrivait Otto Flake dans ses Scènes d’une vie de bohème, Une jeunesse à Colmar et Strasbourg, Arfuyen, 2023, p.215), mais il s’est avisé qu’on pourrait l’appliquer à la littérature.

Portrait d’aujourd’hui (Paint It Today), Hilda Doolittle (par Yasmina Mahdi)

Ecrit par Yasmina Mahdi , le Vendredi, 09 Février 2024. , dans La Une Livres, Les Livres, Critiques, USA, Nouvelles, Editions Des Femmes - Antoinette Fouque

Portrait d’aujourd’hui (Paint It Today), Hilda Doolittle, Éditions des femmes-Antoinette Fouque, janvier 2024, trad. anglais (États-Unis) Juliette Frustié, 128 pages, 14 € Edition: Editions Des Femmes - Antoinette Fouque

 

Pleurs, douleurs

Portrait d’aujourd’hui est une nouvelle inédite et inachevée d’Hilda Doolittle (née à Bethlehem en Pennsylvanie en 1886, décédée à Zurich en 1961), traduite pour la première fois en français par Juliette Frustié. H.D. (l’acronyme emprunté par Hilda Doolittle) a écrit ce Portrait intime en 1921, « dans un monde (…) où l’homosexualité était considérée comme une pathologie et traitée comme un crime » [A. Cazé]. Texte qui ouvre le cycle largement autobiographique d’une tétralogie, donc : Portrait d’aujourd’hui, Hermione, Dis-moi de vivre, et Le Don. Hilda Doolittle a été proche d’« Ezra Pound, de Frances Josepha Gregg, Richard Aldington et Bryher (…) soit le fiancé, l’amante, le mari, la compagne » [A. Cazé].

Nous les vivants, Ayn Rand (par Gilles Banderier)

Ecrit par Gilles Banderier , le Jeudi, 08 Février 2024. , dans La Une Livres, Les Livres, Critiques, USA, Roman, Les Belles Lettres

Nous les vivants, Ayn Rand, Les Belles-Lettres, mai 2023, trad. anglais (États-Unis), Élisabeth Luc, 606 pages, 23,90 € Edition: Les Belles Lettres

 

Bien que la France se targue (ou se targuât ?) d’être à la fine pointe du goût et de la modernité, elle ignore coupablement le nom d’Ayn Rand (1905-1982). Née Alissa Rosenbaum, dans une famille juive de Saint-Pétersbourg, d’un père pharmacien, elle fut en sa jeunesse une lectrice assidue des grands auteurs français. La famille perdit ses biens lors de la Révolution de 1917 et, après différentes étapes, dont quelques années en Crimée, la jeune fille s’exila aux États-Unis, travaillant pour Hollywood et publiant en 1936 son premier roman, Nous les vivants. D’autres suivront qui connaîtront le succès, car une des originalités de celle qui avait choisi le pseudonyme d’Ayn Rand fut de couler ses préoccupations philosophiques dans la forme romanesque, son œuvre la plus fameuse (dans son pays d’adoption en tout cas) étant Atlas Shrugged (Le Réveil d’Atlas, publié en France sous le titre de La Grève).