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Les noms d’époque, De Restauration à années de plomb, Collectif, dirigé par Dominique Kalifa (par Jean-Paul Gavard-Perret)

Ecrit par Jean-Paul Gavard-Perret , le Mercredi, 19 Août 2020. , dans La Une Livres, Les Livres, Critiques, Essais, Gallimard

Les noms d’époque, De Restauration à années de plomb, Collectif, dirigé par Dominique Kalifa, janvier 2020, 352 pages, 23 € Edition: Gallimard

 

Les périodisations et leurs définitions

Dominique Kalifa et son équipe s’intéressent à la tension qu’il existe entre l’éphémère et la mémoire dans le rapport à l’historicité, et ce, à travers la dénomination qui définit les temporalités du monde pour en laisser la trace.

De tels mots créent nos propres représentations et interprétations de ce qui fut. Et les historiens réunis ici rentrent dans l’intentionnalité de leurs ancêtres qui définirent les époques de manière jamais neutre.

Ce livre fait suite à La véritable histoire de la Belle Epoque, du maître d’œuvre, et étend l’analyse des imaginaires qui nourrissent les expressions successives et rétrospectives sur l’histoire. Le tout à partir de la Révolution – à savoir l’époque où s’installe la conscience historique moderne.

L’homme qui marchait sur la lune, Howard McCord (par Léon-Marc Levy)

Ecrit par Léon-Marc Levy , le Mardi, 18 Août 2020. , dans La Une Livres, Les Livres, Critiques, USA, Roman, Gallmeister

L’homme qui marchait sur la lune, trad. américain, Jacques Mailhos, 124 pages, 7 € . Ecrivain(s): Howard McCord Edition: Gallmeister

 

William Gasper a des traits frappants de ressemblance avec le héros de Cormac McCarthy, Lester Ballard, dans Un enfant de Dieu. Comme lui, il erre dans la nature sauvage, dans la montagne, coupé du genre humain. Il est terre sur la terre, pierre parmi les pierres, marcheur sur La Lune. Non, ce n’est pas un cosmonaute, La Lune est le nom d’une montagne perdue au milieu du désert du Nevada. Enfin peut-être, disons au cœur de rien, de nulle part. Gasper marche, observe, mange ce qu’il trouve, entre autres sauterelles, fourmis, végétaux. Que fait-il là ? Mais rien justement, absolument rien. Il arpente ce qu’il a fini par considérer comme sa propriété : les rochers, la poussière, le ciel de La Lune.

On peut dès lors imaginer sans risque d’erreur que l’histoire ici est réduite à un fil ténu, presque sans importance. On apprend qu’il vit – ou qu’il a vécu – de la mort. Tueur à gages sûrement, après avoir été soldat dans l’enfer coréen et tireur d’élite, hors pair. Il a atterri à Sterns, bourg inconnu, où il a loué un container/mobilhome dans lequel il retourne une ou deux fois par an, pour renouveler son petit stock de protéines en fruits secs. Le reste du temps il marche. Sur La Lune.

Erdgeist, Patrick Bogner (par Charles Duttine)

Ecrit par Charles Duttine , le Mardi, 18 Août 2020. , dans La Une Livres, Les Livres, Critiques, Arts, L'Atelier Contemporain

Erdgeist, Patrick Bogner, juillet 2020, 144 pages, 35 € Edition: L'Atelier Contemporain

 

La beauté silencieuse des terres septentrionales

Ouvrir le livre du photographe Patrick Bogner, c’est découvrir des clichés de terres inhospitalières et austères, des photographies en noir et blanc de paysages âpres, durs et quasi désertiques. Ces photographies ont été prises près du cercle arctique, dans les Orcades, les Féroé, ou encore en Islande, Ecosse et Norvège, toutes présentées sans légende, sauf leurs coordonnées de latitude et de longitude. Les scènes y sont immanquablement hivernales. C’est un univers minéral et sévère que l’on découvre, invitant à une sorte d’ascèse du regard.

L’ouvrage est intitulé Erdgeist, l’esprit de la terre, en référence au premier Faust de Goethe. Patrick Bogner s’inscrit d’ailleurs dans la plus pure tradition romantique, notamment celle du « Sturm und Drang » ou encore des tableaux de Caspar David Friedrich, à la recherche d’une proximité avec une nature sauvage et primitive, celle où le « sublime » transparaît. Le sublime, ce sentiment esthétique bien codé, né avec le romantisme et qui relève de la contemplation de la laideur, du terrible ou encore de l’horreur.

Fille, Camille Laurens (par Sylvie Ferrando)

Ecrit par Sylvie Ferrando , le Mardi, 18 Août 2020. , dans La Une Livres, Les Livres, Critiques, Roman, Gallimard

Fille, mars 2020, 240 pages, 19,50 € . Ecrivain(s): Camille Laurens Edition: Gallimard

 

Camille Laurens se livre ici à l’exercice ardu de l’œuvre autobiographique, dans sa version récit d’enfance et de jeunesse, exercice ardu parce que le texte doit être – ou apparaître – à la fois sincère et pas ennuyeux. L’équation est réussie, grâce au style si personnel de l’auteure, à la structure du livre et au mode d’énonciation choisi.

Ainsi, le roman est constitué de trois parties correspondant aux trois âges de la vie de la narratrice : Laurence-fille (la plus longue) ; Laurence-femme (la plus courte) ; Laurence-mère, suivie d’un court épilogue. Trois voix énonciatives s’entremêlent : le « je » de l’autobiographie, le « elle » de la narration, le « tu » de la complicité et de la confidence. « Tu nais d’un mot comme d’une rose, tu éclos sous la langue » ; « Enfin, elle a ses règles, presque un an après tout le monde » ; « Je me regarde dans le miroir de la salle de bains, les cheveux mouillés, sans maquillage, je ressemble de plus en plus à mon père ». Le roman commence et se termine avec le « tu », l’adresse directe au « moi » qui parcourt les pages : « Tu cherches à comprendre mais tu ne sais pas quoi ».

En avant la chronique, Philippe Chauché (par Arnaud Genon)

Ecrit par Arnaud Genon , le Lundi, 17 Août 2020. , dans La Une Livres, Les Livres, Critiques, Essais, Anthologie, Editions Louise Bottu

En avant la chronique, Philippe Chauché, Éd. Louise Bottu, mai 2020, 174 pages, 16 € Edition: Editions Louise Bottu

 

Dès la lecture des premières chroniques de Philippe Chauché, initialement parues sur le site de La Cause littéraire, et que les belles Éditions Louise Bottu rassemblent ici, le lecteur sait qu’il est face à une véritable écriture. Cela pourrait paraître étrange pour qui distingue l’écriture de « l’écrivance », les écrivains et les « écrivants » – néologisme par lequel Roland Barthes désignait ceux pour qui « le langage n’est qu’un instrument » (1) et non pas une fin en soi, comme c’est le cas pour les écrivains. Pourtant, le critique que l’on lit dans ces pages fait de l’exercice auquel il se livre depuis de nombreuses années un véritable travail d’écriture. En ce sens, il illustre ce que le théoricien Florian Pennanech a démontré dans une récente étude intitulée Poétique de la critique littéraire, De la critique comme littérature : « Le métatexte a ses procédés propres, qui peuvent l’amener à se déployer de façon relativement autonome. Il n’est pas nécessairement le simple ‘prolongement’ naturel d’un texte, non plus que l’humble serviteur, caméléon ou transparent, stérile ou parasitaire. Il n’est pas nécessairement non plus un sous-texte, mais éventuellement un texte à part entière, avec ses propres modalités et, il ne me déplaît pas de finir par-là, sa propre créativité » (2).