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La Une CED

L’angoisse du mouton d’Ibrahim, par Kamel Daoud

Ecrit par Kamel Daoud , le Jeudi, 09 Mars 2017. , dans La Une CED, Les Chroniques, Chroniques régulières

 

La mort d’un ami vous transforme en flaques neurasthéniques pendant des jours et des semaines. Tu sais, c’est presque pareil à chaque fois que je perds quelqu’un : je n’arrive pas à pardonner la mort à la mort. A côté de la vie, elle a cet air d’une honteuse insulte. Une petite traîtrise de marche manquante sur l’escalier de l’ascension. Elle n’a rien de la clôture d’un destin et tout d’un acte de pickpocket sournois. Ce que je déteste d’abord dans la mort, c’est qu’elle laisse cette chose derrière elle pour nous insulter tous : le cadavre. Qui n’est ni le corps de celui qu’on a perdu, ni la vie, ni la preuve de son trépas, ni son meilleur souvenir, ni la preuve de sa finitude. Tout juste un pourrissement. Et là, à chaque fois, je me dis que c’est vraiment une insulte : il n’y a rien de commun entre le feu instable et superbement inexplicable de la conscience de chacun et ce tas mou du cadavre, occasion des processions inutiles. Je me dis qu’il y a arnaque et que les hommes sont chacun si miraculeux qu’ils ne doivent pas mourir comme ça, en vrac, mollement, dans l’immobilité et la décomposition des liquides en débandade. Je me dis aussi que la mort devrait être plus noble dans son esthétique, qu’elle doit choisir ses poisons et ses épilogues.

Piques et polémiques, René Pommier, par Michel Host

Ecrit par Michel Host , le Mercredi, 08 Mars 2017. , dans La Une CED, Les Chroniques, Chroniques régulières

Piques et polémiques, René Pommier, éd. Kimé, coll. Détours littéraires, janvier 2017, 157 pages, 19 €

 

De bois vert

 

« Ceux chez qui je ne trouve que des idées fausses, se persuadent aisément que j’ai des idées fixes », René Pommier

 

On le sait, René Pommier lit les textes et tente de les lire vraiment, tout comme le peintre Courbet, sur le motif, peignait ce qu’il voyait et non ce qu’il croyait ou voulait voir. C’est sa méthode, qui a donné de beaux résultats, des visites éclairantes, notamment chez Sigmund Freud, René Girard, Roland Barthes, et quelques-uns de nos plus grands classiques, tels Molière, Racine, Bossuet… Sa bibliographie est longue, elle n’est pas autrement connue ni reconnue, car marcher contre l’opinion, les préjugés dominants, c’est mettre en péril sa propre démarche : on la vouera aux gémonies ou on l’ignorera. Le silence est certainement la plus ancienne méthode critique – par la non-critique – en littérature, en science et dans bien d’autres domaines.

À propos de Petits riens pour jours absolus, de Guy Goffette, par Didier Ayres

Ecrit par Didier Ayres , le Lundi, 06 Mars 2017. , dans La Une CED, Les Chroniques

 

Une poétique des choses banales

à propos de Petits riens pour jours absolus, de Guy Goffette, Gallimard, juin 2016, 120 pages, 14 €

 

Pour un primo-lecteur de la poésie de Guy Goffette, ce dernier recueil qu’il publie chez Gallimard laisse entendre une intelligence de la chose poétique, mais sans l’ethos compliqué parfois que l’on rencontre dans la poésie contemporaine. C’est alors un voyage complice que l’on fait avec le poète, parmi ces petits riens qui font la banalité des jours. Mais le banal ne suffit pas à justifier l’existence du poème, et il faut regarder ailleurs – notamment ici vers des poètes comme Paul de Roux ou Guillaume Apollinaire – dont Guy Goffette revisite la poétique par exemple, dans un langage simple, abordable, sobre et presque enfantin.

Etty Hillesum, Une vie bouleversée ou l’itinéraire de la grâce ?, par Sophie Galabru

Ecrit par Sophie Galabru , le Jeudi, 02 Mars 2017. , dans La Une CED, Les Chroniques

 

 

Parler des écrits d’Etty Hillesum – et notamment de son journal, paru sous le titre Une vie bouleversée – est une difficile entreprise, tant nous voudrions en préserver la richesse. Produire un cheminement intellectuel, psychologique et spirituel d’une telle ampleur est un exploit. Il force l’admiration quand on sait qu’il fut accompli durant l’une des plus douloureuses périodes de l’histoire. C’est cet héroïsme dont fit preuve une jeune femme juive de vingt-sept ans, de 1941 à 1943, alors qu’elle résidait à Amsterdam et souffrait moins de l’Histoire que d’elle-même. Elle traduisait alors des œuvres de Rilke et lisait beaucoup, elle savait se faire aimer des hommes mais sans jamais s’engager envers un seul. Alors qu’Etty mène une vie tranquille mais profondément mélancolique, de plus en plus assombrie par la montée du nazisme, elle ose débuter un journal où se reflète un travail méditatif et philosophique sans précédent, la conduisant à changer ses convictions, ses sentiments et ses douleurs pour rejoindre la femme qu’elle voudrait devenir.

Carnets d’un fou – XLVII Décembre 2016, par Michel Host

Ecrit par Michel Host , le Mardi, 28 Février 2017. , dans La Une CED, Les Chroniques, Chroniques régulières

 

« C’est sans doute un terrible avantage que de n’avoir rien fait. Mais il ne faut pas en abuser », Jean Giono, Bestiaire (Préface au Petit almanach de nos grands hommes)

« Ne jetez pas vos perles aux pourceaux », Matthieu, VII, 6

 

#. Fiasco. À brûle-pourpoint, en manière de « petit coucher », François Hollande annonce à la nation, ce jeudi soir 1er décembre, qu’il ne briguera pas de second mandat de président de la république. Il a donc encore cinq mois de règne à assumer. Mais où est désormais sa légitimité profonde ? Le sens, hormis celui du délai réglementaire, de son éternisation sur le trône républicain ? Comment va-t-il faire pour continuer de ne rien faire ?

Le 1er/XII