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Iles britanniques

La Tempête (The Tempest), William Shakespeare (par Gilles Banderier)

Ecrit par Gilles Banderier , le Mercredi, 27 Novembre 2024. , dans Iles britanniques, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Théâtre, Les Belles Lettres

La Tempête (The Tempest), William Shakespeare, Les Belles-Lettres, 2023, nouvelle trad. Éric Sarner, édition bilingue de Florient Azoulay, Yan Brailowsky, 268 pages, 21,50 € . Ecrivain(s): William Shakespeare Edition: Les Belles Lettres

« Quoi de neuf ? – Shakespeare ! ». Derrière la formule facile pour journaliste en manque d’inspiration se cache une réalité profonde : la capacité de Shakespeare à s’adresser aux lecteurs de tous les pays et toutes les époques : Shakespeare for All Time, suivant le titre du beau livre de Stanley Wells, même s’il faut admettre qu’une partie de son théâtre (les pièces historiques) demeure peu lue hors d’Angleterre et même si, inexorablement, le temps fait son œuvre et éloigne la « culture » des Modernes de celle que déployait le dramaturge dans ses œuvres (on y reviendra).

Autant qu’on puisse le savoir avec certitude, La Tempête est probablement la dernière pièce qu’il écrivit seul, vers 1610-1611, avant son énigmatique retrait à Stratford. De manière curieuse, cette ultime pièce qui ne ressemble à aucune autre ouvre l’édition in-folio de son théâtre, publiée en 1623. De nombreuses théories, allant de la reconstruction à peu près vraisemblable au délire intégral, ont prétendu résoudre le « mystère » Shakespeare, si mystère il y a. Comme toute œuvre baroque, et au fond peut-être comme toute œuvre littéraire, La Tempête est à la fois la somme de plusieurs sources livresques et un ensemble qui dépasse cette somme :

Intermezzo, Sally Rooney (par Alix Lerman Enriquez)

Ecrit par Alix Lerman Enriquez , le Lundi, 25 Novembre 2024. , dans Iles britanniques, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Roman, Gallimard

Intermezzo, Sally Rooney, Gallimard, Coll. Du monde entier, septembre 2024, trad. anglais (Irlande), Laetitia Devaux, 464 pages, 22 € Edition: Gallimard

 

Deux frères, que tout oppose, Péter et Yvan Koubek, se retrouvent après des années d’éloignement pour enterrer leur père. Peter, le frère aîné, trente-deux ans, est un avocat apprécié qui sait briller en société. C’est un séduisant beau parleur aux multiples conquêtes féminines. Yvan, au contraire, de dix ans son cadet, est un peu autiste et se montre très maladroit en société. En revanche, ce dernier est un brillant joueur d’échecs qui fascine par sa profondeur et sa pensée logique.

Malgré leurs différences, tous deux éprouvent un sentiment de vertige et de vacillement à la mort de leur père. Peter, évoquant son père, se dit en lui-même : « il n’était même pas vieux, les gens ne cessaient de le répéter, à peine soixante-cinq ans, Peter a atteint la moitié de cet âge trente-deux ans et-demi. Selon ce calcul, il en est presque à la moitié de sa vie ». Et Yvan, songeant à son père, profère : « Une personne morte n’existe plus qu’en pensée. Et si elle n’existe plus en pensée, là, elle a vraiment disparu. Si je ne pense pas à lui, c’est comme s’il disparaissait une seconde fois ».

Terre Fragile, Claire Fuller (par Sandrine-Jeanne Ferron)

Ecrit par Jeanne Ferron-Veillard , le Jeudi, 10 Octobre 2024. , dans Iles britanniques, Les Livres, Recensions, La Une Livres, Roman, Stock

Terre Fragile, Claire Fuller, éd. Stock, Coll. La Cosmopolite, janvier 2024, trad. anglais, Mathilde Bach, 379 pages, 23 € Edition: Stock

 

As-tu déjà ressenti cela, dans une librairie par exemple, la sensation qu’un livre t’observe plus qu’un autre, il t’attend ou te tend la main, et qu’il a ce pouvoir-là. De rendre le sol instable au point de te faire chavirer. Il a un message pour toi. Parce que justement celui-ci, tu ne l’as pas choisi. Ton existence interceptée par une autre existence. Et la confiance que l’acte de lire amplifie. Terre Fragile est venu à moi avant sa parution. C’est un bouquiniste qui me l’a offert, l’éditeur le lui a adressé mais il m’avoue qu’il n’a plus le temps de lire. Ce sont les épreuves non corrigées, trente-cinq chapitres, la couverture encore blanche, la quatrième de couverture non rédigée. Claire Fuller. Lire en français un roman traduit de l’anglais, je refuse poliment. Un roman inédit puisque hormis le cercle de l’obstétrique du livre, je suis la seule à pouvoir le lire. Je parcours la page des remerciements et c’est la voix de l’auteure qui me séduit. Un livre ne se refuse pas, même poliment. J’accepte.

Patient X, Le dossier Ryūnosuke Akutagawa, David Peace (par Léon-Marc Levy)

Ecrit par Léon-Marc Levy , le Jeudi, 03 Octobre 2024. , dans Iles britanniques, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Roman, En Vitrine, Rivages, Cette semaine

Patient X, Le dossier Ryūnosuke Akutagawa, David Peace, Rivages, octobre 2024, trad. anglais, Jean-Paul Gratias, 366 pages, 24 € . Ecrivain(s): David Peace Edition: Rivages

 

David Peace n’a jamais rien fait comme tout le monde. Ses terrifiants « polars » étaient un véritable laboratoire littéraire dans lequel il dynamitait toutes les règles du genre, les contraignant à des pages sombres et souvent absconses, d’une poésie admirable. Ses célébrations du football étaient des exercices de style dont les échos – Li-ver-pool – Li-ver-pool – ne finiront jamais de résonner à nos oreilles.

Avec Patient X, Peace s’attache à présenter une sorte de biographie d’un écrivain japonais célèbre auquel il voue un véritable culte, Ryūnosuke Akutagawa. Une fois cela dit, il faut se précipiter à préciser que l’ouvrage ne ressemble à aucune biographie jamais éditée. L’intimité de Peace avec son modèle tisse une sorte de patchwork fait de passages romancés de la vie de l’auteur (vérité ? Fiction ? la magie romanesque prend en charge la question), d’articles de journaux d’époque, d’extraits de paroles de l’écrivain. La tresse entière est une résurrection de Ryūnosuke, une biographie partielle, partiale, totalement subjective.

Le Panoptique, Jeremy Bentham (par Léon-Marc Levy)

Ecrit par Léon-Marc Levy , le Mercredi, 28 Août 2024. , dans Iles britanniques, Les Livres, Critiques, Essais, La Une Livres, En Vitrine, Cette semaine, Bartillat

Le Panoptique, Jeremy Bentham, Editions Bartillat, septembre 2024, trad. anglais, Maud Sissung, 195 pages, 20 € Edition: Bartillat

 

Au-delà de l’établissement lui-même, le Panoptique – dispositif d’enfermement destiné à surveiller au plus près les populations incarcérées –, ce qui fait de ce recueil de lettres un moment essentiel de la pensée occidentale moderne réside dans les conséquences bouleversantes de la pensée qui conduit à l’élaboration de ce dispositif.

La « machine » consiste en une organisation architecturale qui vise à un but idéal pour le gardien :

« La perfection idéale, si l’on se fixait cet objet, exigerait que chaque individu soit, à tout instant, surveillé. Cela étant impossible, le mieux que l’on puisse souhaiter est que, à tout instant, ayant motif de se croire surveillé, et n’ayant pas les moyens de s’assurer du contraire, il croie qu’il en est ainsi ».