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Arfuyen

Les Éditions Arfuyen ont été créées par Gérard Pfister en 1975 et ont bénéficié depuis leur origine du soutien et de la participation de Philippe Delarbre, Marie-Hélène et William English et Alain Gouvret.
Elles sont aujourd'hui dirigées par Anne et Gérard Pfister.

 


Le Livre des Laudes, précédé de Requiem, Patrizia Valduga (par Marc Wetzel)

Ecrit par Marc Wetzel , le Vendredi, 14 Avril 2023. , dans Arfuyen, Les Livres, Les Chroniques, La Une CED, Poésie

Le Livre des Laudes, précédé de Requiem, Patrizia Valduga, Arfuyen, février 2023, trad. italien, Christian Travaux, 240 pages, 18,50 €

 

Une poète, à 38 ans, (1991), perd son père ; puis (2004), à 51, son compagnon (le célèbre poète Giovanni Raboni). Elle est déjà célèbre ; elle écrit des choses osées, instruites, maîtrisées. Osées (brillamment sensuelles, utilement scandaleuses) ; instruites (elle cite et traduit Proust, Shakespeare, Valéry, John Donne, Molière…) ; maîtrisées (elle aime s’exprimer en formes fixes de la tradition poétique : elle y puise de quoi évoquer inlassablement – dans de rituelles redites – ce qui ne peut se laisser penser pas même une fois ; et mendier aux Muses, ou aux anges, initiatives remédiatrices et interventions gracieuses, pour ce qu’on n’a pu accomplir pas même une fois). Et soudain, à l’occasion de l’un et l’autre deuil, correspondant aux deux ensembles poétiques ici réunis, la voici qui, improbablement, spectaculairement, et comme farouchement, supplie, régresse et s’humilie :

Elle regrette par exemple d’avoir écrit des poèmes érotiques, non qu’elle en soit honteuse, mais elle craint d’y avoir été inauthentique (d’avoir mis en scène ce que son expérience de la chair réelle n’aurait pu personnellement suivre, ni relayer).

Ainsi parlait, Stefan Zweig (par Didier Ayres)

Ecrit par Didier Ayres , le Lundi, 13 Mars 2023. , dans Arfuyen, Les Livres, Les Chroniques, La Une CED

Ainsi parlait, Stefan Zweig, éditions Arfuyen, janvier 2023, trad. allemand, Gérard Pfister, 192 pages, 14 €

 

Humanisme

Comprendre Zweig, c’est comprendre l’être humain. Bien sûr parce que l’écrivain est une créature, mais surtout parce que lire Zweig nous place au cœur d’une vision humaniste de l’être, fait la place à qui se dresse depuis la Renaissance – vision de l’homme qui semble s’achever de nos jours (avec l’importance croissante des machines et des intelligences mécaniques). De ce fait on est loin de Nietzsche et plus près de Montaigne. Cette créature que Zweig décrit, avec l’aisance d’un lettré témoin de deux guerres mondiales, est prise dans l’histoire, dans le déroulement historique de l’Europe à laquelle il appartient (notamment avec son amitié indéfectible pour Romain Rolland).

Le plus évident reste que la vie de Zweig revient à penser, à faire agir un discernement aigu sur les sociétés et les hommes – jusqu’à sa fin tragique au Brésil où son désespoir le conduit au suicide. Je dis discernement mais je ferais mieux d’écrire intelligence, à la fois dans l’acuité du jugement, et aussi intelligence de la personne humaine exerçant son talent d’écrivain au service de grandes idées humanistes qu’il porte en lui comme un bien précieux.

Ainsi parlait, Stefan Zweig, Dits et maximes de vie choisis et traduits de l’allemand par Gérard Pfister (par Marc Wetzel)

Ecrit par Marc Wetzel , le Lundi, 06 Février 2023. , dans Arfuyen, Les Livres, Les Chroniques, La Une CED, Langue allemande

Ainsi parlait, Stefan Zweig, Arfuyen, janvier 2023, Dits et maximes de vie choisis et traduits de l’allemand par Gérard Pfister, Edition bilingue, 192 pages, 14 €

 

Zweig l’a lui-même remarqué : son œuvre plaît toujours et partout parce qu’il n’en garde, en la composant, que le mouvement essentiel. Il préfère « élaguer » un développement pourtant réussi, sacrifier tout ce qui ne serait que bien écrit pour que le lecteur, devinant un auteur en sachant méthodiquement plus qu’il n’en dit, ne quitte jamais des yeux le secret qu’avec art on lui porte plus loin et dérobe. Mais il n’a pu, bien sûr, élaguer le (formidable) succès même qu’il en obtint (la renommée n’est pas une intrigue qu’on puisse rendre plus agile et sobre !), et son vœu constant de limiter strictement son influence propre à celle de son œuvre n’a pu s’exaucer que dans toutes les tragiques – persécutoires – dernières années où l’anonymat personnel l’attendit aux divers lieux où l’exil le jetait (il n’y était plus le visage identifiable de son nom).

« Même l’exil – je l’ai appris à suffisance – n’est pas si difficile à vivre que la solitude dans sa patrie » (§.203).

Ainsi parlait, Jean de Ruysbroeck (par Didier Ayres)

Ecrit par Didier Ayres , le Jeudi, 26 Janvier 2023. , dans Arfuyen, Les Livres, Les Chroniques, La Une CED

Ainsi parlait, Jean de Ruysbroeck, trad. et préf. Marie et jean Moncelon, éd. Arfuyen, 2022, 14€

 

Une approche de Dieu

Ainsi parlait Jean de Ruysbroeck laisse entrevoir une relation à Dieu fondée sur une expérience mystique, en tout cas telle que j’ai pu la percevoir. Approche de Dieu contemplative, intérieure et mystérieuse. Tout confine ici à la rencontre de Dieu par le croyant qui a besoin de « toute parole qui sort de la bouche de Dieu » (Matt. IV, 4). Cela dit, il faut donner quelques éléments saillants qui justifient ici cette quête, car le chemin pour le chapelain de Sainte-Gudule est balisé. Son langage dessine les reliefs d’un paysage escarpé et montagneux, c’est-à-dire des flans abrupts, des chemins complexes, des pierres dures et surtout des découvertes spirituelles. Il y a un nombre important de termes de cette métaphore de l’élévation de l’âme : hauteurs, accroissement, croissance, fructification, agrandissement, toutes ces images concourant à dresser le portrait d’un Dieu intérieur. Si ces images de l’élévation découlent de l’imaginaire religieux du prêtre d’une simple paroisse de Bruxelles, il se trouve aussi des allusions récurrentes au feu, à l’ignition, au soleil, à la combustion des consciences, à l’embrasement de l’Esprit.

Ainsi parlait Épicure par Gérard Pfister (par Gilles Banderier)

Ecrit par Gilles Banderier , le Mardi, 03 Janvier 2023. , dans Arfuyen, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Anthologie

Ainsi parlait Épicure, fragments inédits choisis et traduits du grec et du latin par Gérard Pfister, Orbey, Arfuyen, 8 septembre 2022, 188 pages, 14 €. Edition: Arfuyen

 

Il faut être prudent, nous le savons tous, lorsque l’on parle de complot ou de conspiration, qui impliquent tous deux un secret absolu, alors que, le plus souvent, le plan est posé sur la table, accessible à quiconque veut – ou peut – le voir et a la curiosité de le consulter. Dans le cas particulier d’Épicure, cependant, tout se passe comme si une double conjuration avait été à l’œuvre. D’une part pour faire disparaître matériellement son œuvre : les doxographes antiques rapportent qu’il avait composé trois cents volumes. On peut toujours débattre quant à savoir s’il s’agissait de livres distincts, autonomes au sens moderne du mot, ou de rouleaux séparés (il en fallait plusieurs pour transcrire un traité entier). Quoi qu’il en ait été, l’ensemble était considérable et la comparaison avec le massif des œuvres de Platon, Aristote ou Plotin qui nous sont parvenues s’impose. Or, de cet ensemble très important, ne subsistent que trois lettres, des maximes et divers fragments. D’autre part, à défaut d’un effacement complet (la survie du peu qui subsiste tient à une succession improbable de miracles philologiques et archéologiques), la pensée d’Épicure a fait l’objet d’un gauchissement et d’un travestissement trop systématiques pour ne pas avoir été délibérés.