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L’Infinie Comédie, David Foster Wallace

Ecrit par Didier Smal , le Jeudi, 20 Août 2015. , dans La Une Livres, La rentrée littéraire, Les Livres, Critiques, L'Olivier (Seuil), Roman, USA

L’Infinie Comédie, août 2015, traduit de l’anglais (USA) par Francis Kerline, 1488 pages, 27,50 € . Ecrivain(s): David Foster Wallace Edition: L'Olivier (Seuil)

Depuis sa publication en 1996, L’Infinie Comédie fait partie des romans nord-américains dont on entend parler avec régularité, ses lecteurs le considérant comme une œuvre essentielle, voire centrale, des trente dernières années, et allant jusqu’à l’élire dans les cent meilleurs romans écrits en anglais depuis 1923 selon l’hebdomadaire Time.

Son auteur, David Foster Wallace (1962-2008), fait quasi l’objet d’un culte, son œuvre étant même devenue un sujet d’étude universitaire per se. Bref, c’est peu dire que, en 2015, la traduction française de ce roman fait figure d’événement et qu’il convenait, pour le lecteur non anglophone, de s’intéresser à ce « roman total », selon la qualification de son auteur lui-même, et d’en lire les environ mille cinq cents pages.

Autant l’admettre de prime abord : les mille cinq cents pages, on les sent passer. Ce roman, à certains égards, est fastidieux malgré son écriture géniale. Voire : à cause de son écriture géniale. Un peu partout, ça clignote : attention, chef-d’œuvre ! attention, démonstration de savoir-écrire en cours ! Et le lecteur, même expérimenté, même habitué à d’habiles démonstrations stylistiques, ne peut qu’obtempérer : oui Wallace est un génial styliste, d’une polyvalence aussi absolue que maîtrisée…

Inconnu à cette adresse, Kressmann Taylor

Ecrit par Didier Smal , le Lundi, 17 Août 2015. , dans La Une Livres, Les Livres, Critiques, Roman, USA, Autrement

Inconnu à cette adresse, juin 2015, trad. de l’anglais (E.-U.) par Michèle Lévy-Bram, 175 p. 8,50 € . Ecrivain(s): Kathrine Kressmann Taylor Edition: Autrement

 

En septembre 1938, le bimestriel américain Story Magazine publie une longue nouvelle intitulée Inconnu à cette Adresse, par un certain Kressmann Taylor ; ce sera un succès, critique et public, immédiat, et un véritable choc pour tous ses lecteurs de l’époque. Il ne faudra pas longtemps pour que le pseudonyme dévoile son secret : l’auteur est une femme, Kathrine Kressmann Taylor (1903-1996), et il s’agit d’une femme d’exception, puisqu’elle fut des rares à pointer la menace nazie dans un pays isolationniste où la German-American Bund pouvait revendiquer cent à deux cent mille membres. Car c’est de ça que parle Inconnu à cette Adresse : de la menace nazie, celle qu’elle fait peser sur les esprits, celle qui va mener à l’extermination massive des Juifs entre autres.

Cette nouvelle se présente sous la forme de dix-huit lettres, dont un « câblogramme », qui forment la correspondance échangée, de novembre 1932 à mars 1934, entre un Juif américain qui a séjourné en Allemagne, Max Eisenstein, et un Allemand parti de Californie pour habiter Munich avec sa famille, Martin Schulse. Ces deux amis tenaient une galerie d’art à San Francisco et le premier envoie des comptes au second, tandis que le second, dans un premier temps, le fournit en œuvres européennes.

Si une nuit d’hiver un voyageur, Italo Calvino

Ecrit par Didier Smal , le Jeudi, 09 Juillet 2015. , dans La Une Livres, Les Livres, Critiques, Folio (Gallimard), Italie, Roman

Si une nuit d’hiver un voyageur, avril 2015, trad. de l’italien par Martin Rueff, 400 pages, 8 € . Ecrivain(s): Italo Calvino Edition: Folio (Gallimard)

 

Paru en italien en 1979, Se una Notte d’Inverno un Viaggiatore a été traduit sous le titre Si par une Nuit d’Hiver un Voyageur en 1981 aux éditions du Seuil. Cette traduction n’est plus disponible couramment aujourd’hui, et voici qu’une nouvelle, sous le titre Si une Nuit d’Hiver un Voyageur, paraît aux éditions Gallimard, dans la collection Folio. Dès le titre, on voit le parti pris par Martin Rueff, le nouveau traducteur : là où Danièle Sallenave et François Wahl tendaient à rendre la littérarité du titre, lui, il en rend la littéralité. Même si l’on n’est pas italophone, on sent la nuance.

Dans la nouvelle traduction, ce qui est sensible à la comparaison avec le texte italien, c’est un double mouvement : d’une part coller au texte originel ; d’autre part s’éloigner de la première traduction. Exemple avec la première phrase du deuxième chapitre : « Il romanzo comincia in una stazione ferroviaria, sbuffa una locomotiva, uno sfiatare di stantuffo copre l’apertura del capitolo, una nuvola di fumo nasconde parte del primo capoverso ». Dans la version Sallenave/Wahl, ça donne ceci : « Le roman commence dans une gare de chemin de fer, une locomotive souffle, un sifflement de piston couvre l’ouverture du chapitre, un nuage de fumée cache en partie le premier alinéa ».

Les Hauts-Quartiers, Paul Gadenne

Ecrit par Didier Smal , le Jeudi, 02 Juillet 2015. , dans La Une Livres, Les Livres, Critiques, Roman, Points

Les Hauts-Quartiers, 800 pages, 11,90 € . Ecrivain(s): Paul Gadenne Edition: Points

 

Paul Gadenne (1907-1956) fait partie de ces auteurs francophones que le temps semble mal servir : il efface peu à peu leur souvenir, et il faut l’un ou l’autre passeur pour avoir envie d’y accéder. Merci donc à Eric Naulleau, qui fut éditeur avant d’être chroniqueur télévisuel, d’avoir persévéré à faire mention de Paul Gadenne à chaque fois que cela lui était possible : c’est grâce à lui que des heures délicieuses ont été passées à lire Les Hauts-Quartiers.

Le roman est préfacé, à sa publication (posthume) en 1973, par Pierre Mertens, admirateur de l’auteur, dont il évoque l’œuvre dans son intégralité et qui avertit, à propos des Hauts-Quartiers, en une formule dont la justesse s’avère exacte au fil de la lecture :

« Seule une réelle exégèse rendrait compte des dimensions d’un univers dont nous n’avons voulu et pu que suggérer l’importance. Son côté solaire et ses perspectives nocturnes ; sa profusion et sa nudité ; son frémissement et sa rigueur ; sa ferveur et sa fragilité, comme une immense fougère saisie par le gel ».

Le Cerveau à sornettes, Roger Price

Ecrit par Didier Smal , le Mardi, 23 Juin 2015. , dans La Une Livres, Les Livres, Critiques, Essais, USA, Wombat

Le Cerveau à sornettes, avril 2015, trad. de l’anglais (E-U) par Frédéric Brument, 224 pages, 18 € . Ecrivain(s): Roger Price Edition: Wombat

 

 

En toute logique, il faudrait éviter de parler du présent livre de Roger Price (1918-1990), puisqu’il s’agit du manifeste « évitiste » absolu. D’un autre côté, respecter la logique lorsqu’il est question des écrits de Roger Price, humoriste de son état, tiendrait quasi de l’absurde. Pas celui de Camus. Celui d’Alphonse Allais.

Reprenons. Préfacé par un Georges Perec de toute évidence sous le charme en 1967, Le Cerveau à Sornettes (In One Head and Out the Other en version originale, 1951) connaît une nouvelle traduction et donc une nouvelle jeunesse aux éditions Wombat, qui le présentent comme un « chef-d’œuvre nonsensique », « un des livres les plus frappadingues de la littérature comique anglo-saxonne » – ce qui a de quoi allécher tout amateur de mauvais esprit.