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1984, George Orwell, Gallimard Folio : à propos de la "nouvelle" traduction (par Didier Smal)

Ecrit par Didier Smal , le Mercredi, 16 Juin 2021. , dans La Une Livres, Les Livres, Critiques, Folio (Gallimard), Iles britanniques, Roman

1984, George Orwell, Traduction : Amélie Audiberti, mai 2021, 416 pages, 8,60 € Traduction : Josée Kamoun, mai 2020, 400 pages, 8,60 € . Ecrivain(s): George Orwell Edition: Folio (Gallimard)

 

À propos de la « nouvelle traduction » de 1984

Qu’est-ce que traduire ? Trahir, dit un adage d’origine transalpine. Oui, trahir, car un idiome n’est pas l’autre, parce que Dieu a interdit aux hommes de se transformer en briques, de briqueter des briques, parce que Dieu a empêché l’uniformité en abattant la tour de Babel et en dispersant les peuples et en les diversifiant par la langue. Belle offrande, celle de la différence et de la richesse qui en découle. Trahir, donc, parce qu’un mot n’est pas une réalité transposable d’une langue à l’autre. Trahir, aussi, parce que la première phrase de Mr. Vertigo de Paul Auster, « I was twelve when I first walked on water », est bien plus musicale que significative, et qu’en rendre le rythme et les notes en français est impossible. Il faut être en paix avec cette trahison, voire l’assumer.

La Trilogie de la Poussière, Livre 1, La Belle Sauvage & Livre 2, La Communauté des esprits, Philip Pullman (par Didier Smal)

Ecrit par Didier Smal , le Mardi, 01 Juin 2021. , dans La Une Livres, Les Livres, Critiques, Gallimard Jeunesse, Iles britanniques, Jeunesse, Roman

Edition: Gallimard Jeunesse

 

La Trilogie de la Poussière, Livre 1, La Belle Sauvage (Folio, avril 2021, 544 pages, 9,30 €), & Livre 2, La Communauté des esprits (Gallimard, septembre 2020, 656 pages, 22 €), Philip Pullman, trad. anglais, Jean Esch

Philip Pullman (1946), avec la trilogie À la Croisée des mondes, a créé non seulement un phénomène éditorial à succès désormais transformé en série télévisée (après l’adaptation cinématographique du premier tome, sous le titre de La Boussole d’or, qui fut boudée par le public) et en bande dessinée, mais surtout un univers narratif à la fois complexe et cohérent, ce qui lui donne une paradoxale évidence. Pour faire simple, disons que Pullman, dont les romans ont été publiés en français par Gallimard tant sous l’étiquette « SF » que « Folio Junior » ou tout simplement « Folio », a brouillé les pistes avec intelligence : les romans de l’univers dans lequel Lyra Parle-d’Or évolue relèvent-ils de la science-fiction, de la fantasy, de la littérature à destination de la jeunesse, du roman d’aventure ou de la méditation sur l’existence d’univers parallèles avec un détour par un rien de physique quantique, et une magnifique tendance à dire des choses essentielles et puissantes sur la vie, en nous et autour de nous ? Bien malin qui pourrait répondre de façon absolue – mais bien moins malin qui omettrait l’essentiel :

La Patte du chat, Jacques Cazotte (par Didier Smal)

Ecrit par Didier Smal , le Mercredi, 26 Mai 2021. , dans La Une Livres, Les Livres, Critiques, Rivages poche, Contes

La Patte du chat, Jacques Cazotte, avril 2021, 96 pages, 7,60 €

 

Complexe histoire que celle de Jacques Cazotte (1719-1792), pourfendeur des mœurs de son temps, et pourtant fidèle à un esprit « Ancien Régime » au point d’avoir dit, en montant sur l’échafaud : « Je meurs comme j’ai vécu, fidèle à mon Dieu et à mon roi ». Pour lui, à la fin de sa vie, alors qu’il est entré dans les ordres, le Bien est incarné en la cause royaliste, et la Révolution, c’est le Mal en action. Le Mal est déjà au cœur de son récit le plus célèbre, Le Diable amoureux, publié en 1771, cette « nouvelle espagnole » qui valut à son auteur le titre de « père du fantastique » français.

Du Diable amoureux, rien ne sera dit ici, car c’est un récit paru trente années auparavant qui retient notre attention, actualité éditoriale et curiosité littéraire obligent : La Patte du chat. L’expression « curiosité littéraire » n’est pas vaine : ce bref récit, par un tout jeune homme, est dans la veine parodique de son époque, à mi-chemin entre le conte de fées remis au goût du jour à la fin du siècle précédent (d’Aulnoy, Perrault) et l’orientalisme dans l’air du temps depuis qu’Antoine Galland a refondu en français Les Mille et une nuits.

Watertown, Frank Sinatra, Reprise, 1970 (par Didier Smal)

Ecrit par Didier Smal , le Mercredi, 19 Mai 2021. , dans La Une CED, Les Chroniques, USA

 

Et si on célébrait un sublime et bref roman américain, peu importe qu’il s’agisse d’un album de musique pop publié par Frank Sinatra ? Après tout, Bob Dylan a été nobélisé, Bruce Springsteen est l’un des meilleurs nouvellistes américains (et Nebraska son plus beau recueil, épuré et pourtant riche en histoires qui se déploient dans l’imaginaire de l’auditeur), Leonard Cohen (canadien, mais américain d’adoption) est un des plus vibrants poètes du XXe siècle, Joni Mitchell a écrit et interprété de pures merveilles d’élévation, Townes Van Zandt a écrit avec Kathleen une des plus belles tragédies amoureuses du vingtième siècle et The Cuckoo vole aile à aile avec le Corbeau de Poe – et la liste pourrait continuer, au fil des soirées passées en compagnie de disques qui sont autant d’amis.

Alors, oui, Watertown, publié en 1970, est un grand roman américain, et pourtant universel – et quiconque a ajouté « comme tout grand roman américain » a raison, mais peut retrancher le « américain », tant qu’à faire.

Diane de Selliers, partageuse de désir (par Didier Smal)

Ecrit par Didier Smal , le Mardi, 11 Mai 2021. , dans La Une CED, Entretiens, Les Dossiers

Crédits photographiques : Constance Proux


La première fois que l’on tient entre ses mains un livre édité par Diane de Selliers, l’émotion est intense, celle de la rencontre d’un dialogue parfait entre le Verbe et l’Image. De cette émotion est né le désir de converser avec une femme hors du commun éditorial, personnalité fascinante en sus.

 

La Cause Littéraire : Lorsque j’ai feuilleté La Légende dorée, j’ai subi un éblouissement, d’où cet entretien. Est-ce votre intention que d’éblouir le lecteur avec de la beauté ?

Diane de Selliers : Éblouir, je ne sais pas, mais c’est vrai que j’aime toutes les découvertes, et j’aime les partager, et je pense qu’il y a énormément à apprendre et à comprendre dans ce lien entre la littérature et la peinture. C’est aussi une façon de découvrir ces grands textes de l’humanité, que de leur donner cet éclairage iconographique qui permet d’avoir un dialogue à différents niveaux.