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Articles taggés avec: Smal Didier

Nevernight, Tome 1, N’oublie jamais, Jay Kristoff (par Didier Smal)

Ecrit par Didier Smal , le Mercredi, 28 Juin 2023. , dans La Une Livres, Les Livres, Critiques, Roman, Science-fiction

Nevernight, Tome 1, N’oublie jamais, Jay Kristoff, éditions J’ai Lu, Flammarion, octobre 2022, 784 pages, 10,50 € ; Tome 2, Les grands jeux, mars 2023, trad. anglais (Australie) Sébastien Guillot, mars 2023, 800 pages, 11 €

 

Une formule permet de comprendre le succès mondial de la série de fantasy Nevernight : redoutablement efficace. Rien à redire : l’Australien Jay Kristoff mène son récit tambour battant, tient le lecteur en haleine (même si le lecteur aguerri sait plus ou moins dans quelle direction se dirige l’histoire), joue du rebondissement, de l’alternance parfaite entre scènes violentes et profondeurs (voire ténèbres) psychologiques, le tout parsemé de considérations oscillant entre religion et politique d’un univers spécifique aux multiples contrées et mœurs, d’un rien de désir sexuel connaissant son apogée en une poignée de scènes explicites, et de notes humoristiques noires au possible. Nevernight, à l’image de son héroïne Mia Corvere, est une machine de guerre destinée à vaincre les réticences de tout amateur de fantasy, qui se retrouve à tourner les pages de façon quasi frénétique.

Manhattan Transfer, John Dos Passos (par Didier Smal)

Ecrit par Didier Smal , le Lundi, 19 Juin 2023. , dans La Une Livres, En Vitrine, Cette semaine, Les Livres, Critiques, Folio (Gallimard), Roman, USA

Manhattan Transfer, John Dos Passos, Folio, février 2023, trad. anglais (USA) Philippe Jaworski, 544 pages, 9,70 € Edition: Folio (Gallimard)

 

Grâces soient rendues à Philippe Jaworski, dont on peut de bon droit estimer qu’il a souffert, enfant, adolescent et adulte, de traductions pénibles d’ouvrages anglo-saxons, puisqu’il soigne depuis des années cette souffrance en rendant justice à ces ouvrages ! Et pour le coup, on soupire d’aise : il était grand temps que Manhattan Transfer, le cinquième roman de John Dos Passos et, au passage, l’un des plus importants romans de la modernité soit proposé en français autrement que dans la langue guindée et purificatrice de Maurice-Edgar Coindreau. Certes, ce dernier a œuvré pour la reconnaissance de la littérature anglo-saxonne en France, d’Ernest Hemingway à William Faulkner ou de John Steinbeck à Erskine Caldwell, mais qu’est-ce qu’il pouvait élaguer ! On rêve ainsi à lire Le Petit arpent du bon Dieu en français dans toute sa virulence…

Pour Manhattan Transfer (1925), c’est donc désormais chose faite, que ce passage de l’anglais d’un New York populaire à un français assoupli de ses convenances, et on peut pleinement goûter le propos de John Dos Passos. Jugeons sur pièce avec un paragraphe saisissant, celui de l’accident du livreur de lait Gus, conclusion du second chapitre :

Lore, Alexandra Bracken (par Didier Smal)

Ecrit par Didier Smal , le Mardi, 13 Juin 2023. , dans La Une Livres, Les Livres, Recensions, Roman, USA, J'ai lu (Flammarion)

Lore, Alexandra Bracken, J’Ai Lu/Flammarion, février 2023, trad. anglais (USA) Jean-Baptiste Bernet, 704 pages, 9,90 € Edition: J'ai lu (Flammarion)

 

L’idée n’est pas neuve, depuis au moins le Malpertuis de Jean Ray, de faire descendre les dieux de l’Olympe sur Terre ; Alexandra Bracken la perpétue en lui offrant une plus-value guerrière et complotiste : tous les sept ans a lieu l’Agôn. Sept jours durant, neuf dieux majeurs descendent sur Terre, mortels et susceptibles d’être assassinés par un « Chasseur » qui endosse dès lors leurs pouvoirs – enfin, ceux d’un dieu à la fois, le cumul étant impossible. Les « Chasseurs » eux-mêmes appartiennent à neuf lignées héritières de héros mythologiques, chaque lignée défendant « son » dieu et tentant de s’approprier les pouvoirs de l’un ou l’autre dieu. Cette appropriation permet durant sept années de développer des activités tout humaines. Ainsi, qui s’est approprié les pouvoirs et donc l’influence d’Arès sur Terre, a tout intérêt à avoir investi dans l’armement ; quant à Apollon, il facilite grandement les choses du côté de l’industrie pharmaceutique.

Silas Marner, Le tisserand de Raveloe, George Eliot (par Didier Smal)

Ecrit par Didier Smal , le Jeudi, 08 Juin 2023. , dans La Une Livres, Les Livres, Critiques, Folio (Gallimard), Iles britanniques, Roman

Silas Marner, Le tisserand de Raveloe, George Eliot, Folio, janvier 2023, trad. anglais, Pierre Leyris, Alain Jumeau, 368 pages, 9,20 € Edition: Folio (Gallimard)

Au dix-neuvième siècle, deux George se partagent la renommée littéraire : Sand, la Française, et Eliot, l’Anglaise, et la seconde admirait l’œuvre de la première. D’ailleurs, à certains égards, cette admiration transparaît dans Silas Marner (1861) : il y a de La Mare au diable et de La Petite Fadette, ces beaux récits ruraux publiés quatorze et douze ans auparavant, dans cette évocation d’une rude campagne anglaise où la solitude et l’habitude semblent la règle, et que survienne une belle exception à cette règle !

Reprenons. Silas Marner est le troisième roman de George Eliot, qui vient de rencontrer le succès critique et public avec Le Moulin sur la Floss juste un an auparavant : à cette vaste fresque d’un amour tragique succède un récit plus bref, resserré, dont les quelque deux cents premières pages manuscrites effrayeront l’éditeur lorsque l’autrice les lui enverra – trop sombres, trop tragiques. Ses craintes s’avéreront vaines : le troisième tiers de Silas Marner est lumineuse, comme cela advient régulièrement dans le roman anglais du dix-neuvième siècle ; aux Français les fins désespérantes, aux Anglais la rédemption finale.

Scholomance, Tome 1 Éducation meurtrière, Naomi Novik (Par Didier Smal)

Ecrit par Didier Smal , le Mercredi, 31 Mai 2023. , dans La Une Livres, Les Livres, Critiques, Roman, J'ai lu (Flammarion)

Scholomance, Tome 1 Éducation meurtrière, Naomi Novik, éd. J’ai Lu, avril 2023, trad. anglais (USA) Benjamin Kuntzer, 384 pages, 8,60 € Edition: J'ai lu (Flammarion)

 

La carrière éditoriale de l’Américaine Naomi Novik vient d’entrer dans une troisième période. La première fut celle de la remarquable série Téméraire (2006-2016), une rencontre en neuf tomes entre Cecil Scott Forester et Robin Hobb, pour faire très bref. La deuxième fut composée de deux romans sublimes : Déracinée (2015) et La Fileuse d’argent (2018), deux histoires qui plongeaient dans le folklore de l’Est de l’Europe, tant yiddish que slave, proposant chacune la destinée d’une jeune femme confrontée à une magie terrifiante et pourtant magnifique ; deux romans multi-primés, deux chefs-d’œuvre d’une fantasy plongeant aux racines du genre, en l’occurrence le conte (dans le genre, on ne voit que la Trilogie d’une nuit d’hiver de Katherine Arden à posséder autant de grâce et de puissance narrative).