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Concours pour le Paradis, Clélia Renucci (par Guy Donikian)

Ecrit par Guy Donikian , le Mardi, 30 Octobre 2018. , dans La Une Livres, Les Livres, Critiques, Albin Michel, Roman

Concours pour le Paradis, août 2018, 268 pages, 19 € . Ecrivain(s): Clélia Renucci Edition: Albin Michel

 

Venise, nuit du 20 décembre 1577. Le feu ravage le palais des Doges. Véronèse, réveillé par son frère Benedetto, ne s’alarma tout d’abord pas de l’incendie, mais devant l’agitation inhabituelle des Vénitiens, il ne put que se rendre à l’évidence : l’affaire était grave, et le palais des Doges allait subir des dégâts très importants.

« Rien ne subsistait de la salle du Grand Conseil, ni les bancs des patriciens, ni la tribune sculptée dans un bois précieux, ni les dizaines de portraits des doges répartis en frise en-dessous du plafond aux cadres dorés à l’or fin. De l’immense fresque représentant le Paradis, ils distinguèrent à peine quelques fragments ». Ce sont là les dernières lignes des premières pages de ce roman historique qui donnent au lecteur le propos du livre : Le Paradis, cette immense toile ayant été détruite, c’est son remplacement dont il va être question et les conditions et péripéties qui vont en émailler la facture.

Opus Niger, Pierre Stans (par Guy Donikian)

Ecrit par Guy Donikian , le Lundi, 10 Septembre 2018. , dans La Une Livres, Les Livres, Critiques, Poésie

Opus Niger, PhB éditions, juin 2018, 100 pages, 10 € . Ecrivain(s): Pierre Stans

 

Ce sont presque 40 années d’écriture que ce recueil de poèmes offre au lecteur (1976-2014). Opus Niger, le titre de l’ouvrage, est également le titre de l’un des six « chapitres » qui ponctuent la publication. Lire Pierre Stans, c’est s’immerger dans une écriture que caractérisent le souci des « petits riens » et une extrême sensibilité. C’est aussi confirmer que la poésie est sans doute le dernier bastion d’une réelle écriture face à l’hégémonie du roman qui voit aujourd’hui se succéder des truismes dont le poème n’a que faire. Il ne s’agit plus de (se) raconter des histoires, mais de souligner ce que toute civilisation a mis au jour, un rapport on ne peut plus sensible au réel, qui tient du paradoxe puisque c’est l’impalpable qui se meut dans les vers, cet impalpable qui fait de nous des êtres bourrés de vibrations pour exprimer le plus intime de chacun. La « musicalité », la scansion donnent aussi au texte une épaisseur que les termes révèlent essentiellement dans ces circonstances.

La France Underground, 1965-1979, Free jazz et Rock pop, Le temps des utopies, Serge Loupien

Ecrit par Guy Donikian , le Lundi, 27 Août 2018. , dans La Une Livres, Rivages, Les Livres, Critiques, Côté Musique(s), Essais

La France Underground, 1965-1979, Free jazz et Rock pop, Le temps des utopies, mai 2018, 405 pages, 23 € . Ecrivain(s): Serge Loupien

 

On sait les bouleversements auxquels les sociétés occidentales ont dû faire face durant les années que cet ouvrage se propose de nous narrer : chacun a une idée liée à l’épicentre que fut mai 68, mais rares sont ceux qui peuvent embrasser la décennie concernée dans tous ses aspects culturels, liés à une sociologie singulière : les individus à l’œuvre pour cette « révolution » forment la première génération née après la guerre, génération qui va « inventer » la jeunesse en tant que classe sociale avec des caractéristiques qu’il faudra créer, un habitus qui devra englober un idiome, une musique, des habitudes vestimentaires, le tout à contrecourant d’une culture engluée dans un conformisme que tous ces « jeunes » veulent combattre à l’aide d’outils que sont la musique, les médias qui se développent et les modes vestimentaires, ce qu’on appelle une contre-culture.

L’Île aux troncs, Michel Jullien

Ecrit par Guy Donikian , le Lundi, 20 Août 2018. , dans La Une Livres, La rentrée littéraire, Les Livres, Critiques, Roman, Verdier

L’Île aux troncs, août 2018, 124 pages, 14 € . Ecrivain(s): Michel Jullien Edition: Verdier

 

A partir des années 1950, les « samovary » qui enlaidissaient les villes soviétiques, furent déportés sur l’île de Valaam, en région de Carélie, aux confins de la Russie, et toute proche de la Finlande. Les samovary sont ces vétérans de la seconde guerre mondiale qui ont été mutilés des jambes et qu’on retrouve à partir de 1945 mendiant dans les centres urbains de l’Union Soviétique. Ce surnom leur est attribué en raison de la ressemblance de ces corps mutilés avec l’ustensile de cuisine. Le pouvoir soviétique décide leur exil sur cette île perdue sur le plus grand lac d’Europe, dans un monastère désaffecté C’est là que Michel Jullien situe son roman.

L’auteur passe tout d’abord en revue les « pensionnaires » des lieux, nous conduisant d’une cellule à l’autre : « …un samovar par cellule, des tronchets, des Dimitri, des Boris, des Vladimir, des morphologies similaires avec le corps terminé en manière de culot, des hommes ampoules ». Plus loin, Michel Jullien qualifie le lieu pour donner aussi le nombre d’exilés qu’abrite le monastère. « Un bon choix, séjour idéal où déverser une petite communauté d’estropiés gâchant le paysage des centres urbains, quelque deux cents mendigots invétérés, à peine ».

Missak, Didier Daeninckx

Ecrit par Guy Donikian , le Mardi, 26 Juin 2018. , dans La Une Livres, Les Livres, Critiques, Folio (Gallimard), Roman

Missak, mars 2018, 352 pages, 7,80 € . Ecrivain(s): Didier Daeninckx Edition: Folio (Gallimard)

 

Edité initialement en 2009 aux éditions Perrin, Missakfait l’objet d’une réédition en poche. On salue l’initiative qui nous replonge dans un aspect particulier de la Résistance, celui de l’Affiche Rouge.

21 février 1944. Missak Manouchian, communiste arménien, chef d’un réseau de résistants immigrés, est fusillé au mont Valérien, ainsi que ses compagnons d’armes. Ce sont tous des immigrés de différentes nationalités appartenant aux FTP-MOI. La seule femme du réseau sera, elle, décapitée à Stuttgart. Tous figuraient sur la célèbre affiche rouge, placardée sur les murs de Paris, à plusieurs milliers d’exemplaires. Missak, à quelques heures de son exécution, écrira une ultime lettre à son épouse, Mélinée, lettre bouleversante dans laquelle il la prie d’être heureuse, tout en écrivant qu’il mourra sans haine et en pardonnant à tous, « sauf à ceux qui l’ont dénoncé », cette dernière expression ayant été occultée dans les différentes publications de cette lettre.