Identification

Poésie

Bénie soit ma langue, Journal intime, Gabriela Mistral (par Didier Ayres)

Ecrit par Didier Ayres , le Mardi, 18 Février 2025. , dans Poésie, Les Livres, Les Chroniques, La Une CED, Amérique Latine

Bénie soit ma langue, Journal intime, Gabriela Mistral, éditons des femmes-Antoinette Fouque, octobre 2024, trad. espagnol (Chili), Anne Picard, 270 pages, 23 €

Rencontre

Avec ce livre que publient les éditions des femmes-Antoinette Fouque, je me suis trouvé dans la position amie d’une rencontre, lecture provoquant une amitié littéraire immédiate et forte à propos, et d’une grande densité. Je dis ami avec toute la force de l’épithète, au sens presque littéral, rencontre de l’Autrui évangélique, découlant d’une connivence tacite avec l’œuvre de ces cahiers qui balaient l’existence de l’autrice de 1905 à 1956. Une fois cette confession faite, il reste à m’expliquer comme à moi-même comment je suis rentré dans ce texte.

Ces 18 cahiers proposent une découverte kaléidoscopique du travail de la poétesse chilienne, Prix Nobel 1945. Avec eux, nous sommes à mi-chemin du journal et de l’autobiographie, ce qui rend saisissants tous les détails d’une vie passée à devenir une poète. La durée, en quelque sorte abolie, décrit le récit d’une vie, d’une vie d’écriture, écriture qui se développe avec et pour la vie, énonce sans fard les aléas d’une femme pauvre ballottée entre les pays, la pauvreté et l’acrimonie de l’intelligentsia chilienne – ce qui fut particulièrement dur pour la sensibilité de Gabriela, victime de rumeurs qui la blessaient.

L’anniversaire de toutes les choses, Roxana Hashemi (par Marc Wetzel)

Ecrit par Marc Wetzel , le Mercredi, 29 Janvier 2025. , dans Poésie, Les Livres, Les Chroniques, La Une CED

L’anniversaire de toutes les choses, Roxana Hashemi, Éditions Nous, novembre 2024, 96 pages, 14 €

 

Cette jeune poète a l’horreur facile :

« des spores fongiques sortiront de bouches âgées

à chaque expiration

les poumons ont commencé

la décomposition

une personne posera déjà son

bébé sur le compost » (p.23)

mais elle n’a l’horreur facile, que parce que l’horreur est réelle, et que la virtuosité de cette auteure saisit son réel par cœur. La preuve est qu’elle a tout aussi naturellement l’humour facile :

Vibre, exquise nature ! selon Chardin, Alain Vircondelet (par Didier Ayres)

Ecrit par Didier Ayres , le Mardi, 28 Janvier 2025. , dans Poésie, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Récits

Vibre, exquise nature ! selon Chardin, Alain Vircondelet, éditions Les Ateliers Henry Dougier, janvier 2025, 130 pages, 14,90 €

Durée

Oui, la durée est le maître mot de ce livre qui se propose, avec simplicité, de recourir à l’écriture pour en faire une escorte suffisante et le récit d’un tableau : Le Panier de fraises des bois, de Jean Siméon Chardin. Cette entreprise de lecture d’un chef d’œuvre est facile, vivante, argumentée comme en un sens l’est une biographie. Qui essaie de prendre à bras le corps le monde de la vanité du XVIIIème siècle.

Ce livre nous plonge dans un compotier de fraises sauvages afin de comprendre de l’intérieur – si je puis dire – ce qui est passage ou pérennité dans l’activité de toute vie humaine. Cette pyramide de fruits rouges nous permet de comprendre le but de la vie, à l’instar de la leçon que donnent ces fraises peintes, qui vraisemblablement seraient promises à une destruction naturelle, où ici elles se figent et tendent vers l’éternité. C’est en tout cas le flux logique de toute matière, sachant qu’ici c’est la peinture qui fait écran à la mort. Et si je dis la mort, il faut comprendre le temps. C’est à un archi-présent que nous avons à faire, au carrefour du fini et de l’infini, sorte de magie végétale métaphysique.

Lire les Rivières précédé de La Rivière des Parfums, Bernard Fournier (par Murielle Compère-Demarcy)

Ecrit par MCDEM (Murielle Compère-Demarcy) , le Mardi, 28 Janvier 2025. , dans Poésie, Les Livres, Les Chroniques, La Une CED

Lire les Rivières précédé de La Rivière des Parfums, Bernard Fournier, Éditions Aspect, Coll. Folium, 2017, 14 €

Le poète Bernard Fournier poursuit sa quête de Réponses (Marches III, partie I), à l’écoute symbiotique du monde naturel qui l’environne, dépositaire de voix humbles ou enfouies auxquelles de prime abord on ne prête pas toujours attention. Ici la rivière prend le relais des pierres qui, Vigiles des villages, peuvent comme nous écouter l’univers, lorsqu’« elles veillent, / les yeux mi-clos sur leurs traits lapidaires / à l’écoute du bruissement des soies, des griffures d’insectes : froissements ou feulements de fauves ». S’il ne l’arraisonne pas complètement, l’homme qui marche (cf. Marches, éd. Aspect) gère son embarquement dans sa traversée du monde, afin de ne pas se perdre et pouvoir poursuivre sa destination. Et même si la poésie – cette nourriture des mots – pourrait éventuellement égarer son cap, il se préoccupe d’accomplir un destin davantage qu’un voyage : « Apprenons la patience des orages le long des routes et des rivages » écrit le poète. Savoir la terre, les arbres, les fleurs, ici les rivières, c’est, non seulement (re-)connaître le terroir et nos territoires mais aussi, écouter l’environnement et s’y accorder, notamment en célébrant par le chant poétique la symphonie polyphonique d’un Univers-Un.

Au cabaret des oiseaux et des songes – Roman d’escapades - Éric Poindron (par Philippe Chauché)

Ecrit par Philippe Chauché , le Vendredi, 24 Janvier 2025. , dans Poésie, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Roman, Le Passeur

Au cabaret des oiseaux et des songes – Roman d’escapades - Éric Poindron – Préface de Denis Grozdanovitch – Le Passeur Éditeur – 349 p. – 17 euros . Ecrivain(s): Eric Poindron Edition: Le Passeur

 

« Mes éducations et mes écoles primesautières furent les églises de campagne et les cathédrales d’Europe, les musées de guingois et de province, les vignes sacrées, les presbytères confidentiels, l’océan qui chahute et les cours d’eau qui chuchotent, la correspondance des peintres et les journaux d’écrivains, la forêt confessionnal, les châteaux et les bistrots, les bibliothèques publiques et les chapelles privées. »

 

Au cabaret des oiseaux et des songes est peut-être le roman le plus personnel d’Éric Poindron ; une escapade dans l’enfance et la grande jeunesse de l’auteur aux mille faces. Comme la vie est un roman, le roman est une vie inspirée et inspirante. Il y a l’école des buissons et des rivières, celle des chemins traversés et des lanternes magiques et poétiques.