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Italie

Tremble la nuit, Nadia Terranova (par Philippe Leuckx)

Ecrit par Philippe Leuckx , le Vendredi, 06 Décembre 2024. , dans Italie, Les Livres, Recensions, La Une Livres, Roman, Quai Voltaire (La Table Ronde)

Tremble la nuit, Nadia Terranova, Quai Voltaire, février 2024, trad. italien, par Romane Lafore, 192 pages, 22 € . Ecrivain(s): Nadia Terranova Edition: Quai Voltaire (La Table Ronde)

 

Ce troisième roman de l’écrivaine italienne, originaire de Messine (elle y est née en 1978), après les beaux Les années à rebours et Adieu fantômes, revient longuement par la fiction sur une tragédie, celle qui a ravagé par un tremblement de terre les villes de Messine et de Reggio de Calabre.

Plongée dans l’histoire et les gravats de 1908. Plongée dans l’âme bouleversée des personnages qui ont vécu la catastrophe dans leur chair.

On suit les habitants, au plus près des événements, et surtout deux personnages centraux, ceux de Barbara et de Nicola.

Chaque chapitre est annoncé par l’une des figures du tarot traditionnel.

Les habitants errent au milieu des rues « saccagées », en quête d’un proche, dans l’attente de retrouvailles ou d’une aide bienvenue.

La Vie simple, Pour soi et pour les autres, Carlo Ossola (par Gilles Banderier)

Ecrit par Gilles Banderier , le Mercredi, 04 Septembre 2024. , dans Italie, Les Livres, Critiques, Essais, La Une Livres, Les Belles Lettres

La Vie simple, Pour soi et pour les autres, Carlo Ossola, Les Belles-Lettres, 2023, trad. italien, Lucien d’Azay, Olivier Chiquet, 140 pages, 11,50 € Edition: Les Belles Lettres

 

Qu’est-ce qu’une vie simple ? Sitôt la question formulée, on devine que la réponse sera complexe ou, en tous cas, pas aussi succincte et directe qu’on pourrait s’y attendre. Mais cette question s’est toujours posée, de savoir comment user au mieux de ce bref intervalle de vie (« Nous ne disposons que d’un instant de soleil, un instant précieux et béni », écrivait Irwin D. Yalom) qui nous est accordé entre un néant et – et quoi ? Seules les religions ont prétendu répondre à cette dernière interrogation.

Depuis que la mode est apparue aux États-Unis, les ouvrages de développement personnel abondent et qui voudrait en constituer une collection exhaustive remplirait vite une maison de bonne taille. Il est à peine besoin de souligner leur caractère répétitif, leur désespérante horizontalité et le fait que leur succès accompagne fort bien des sociétés où la consommation d’antidépresseurs et de psychotropes divers atteint des records, et ce, dès le plus jeune âge.

À chacun son dû, Leonardo Sciascia (par Didier Smal)

Ecrit par Didier Smal , le Mercredi, 03 Juillet 2024. , dans Italie, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Roman, Folio (Gallimard)

À chacun son dû, Leonardo Sciascia, Folio, avril 2024, trad. italien Jacques de Pressac, revue et corrigée par Mario Fusco, 192 pages, 7,40 € . Ecrivain(s): Leonardo Sciascia Edition: Folio (Gallimard)

 

À chacun son dû présente d’emblée les caractéristiques, trompeuses on le verra, d’un roman policier : dès la première page, le pharmacien Manno reçoit une lettre anonyme l’avertissant de sa mort prochaine pour un motif tu qui fera l’objet de spéculations de la part de ses concitoyens, et, effectivement, il meurt quelques pages plus tard en compagnie du docteur Roscio lors d’une partie de chasse. Celui qui mène l’enquête, puisque les brigadiers progressent peu, très peu, est un professeur de lycée et critique littéraire occasionnel, ami de Roscio, Laurana. Mais très vite, Sciascia brouille le sens de son roman, se faisant même le critique du genre policier :

Un peu de fièvre, Sandro Penna (par Patrick Abraham)

Ecrit par Patrick Abraham , le Mercredi, 15 Mai 2024. , dans Italie, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Poésie

Un peu de fièvre, Sandro Penna, Ypsilon éditeur, 2022, trad. italien, Jean-Paul Manganaro, 146 pages, 20 €

 

La dissidence sexuelle, dans une société hétéronormée, peut conduire à l’inhibition destructrice, à la forfanterie, à la dissimulation sournoise comme pour Mauriac, à l’expérience quasi mystique de la honte et de « l’abjection » comme pour Jouhandeau, à l’élection, comme pour Genet, d’une contre-société opposant aux valeurs majoritaires celles qui leur seront le plus contraires pour empêcher la réconciliation. Elle peut aussi, comme chez Georges Eekhoud avec Escal-Vigor et Voyous de velours, aiguiser le regard, inverser les perspectives et dénoncer les leurres et les mensonges des discours autorisés. Elle peut enfin, comme chez Jef Last, compagnon de voyage de Gide en URSS en 1936, ou Daniel Guérin, motiver un engagement politique.

Tout autre est la manière dont Sandro Penna a construit, à partir de son goût des garçons, sa poétique. On l’observe dans les courtes proses du recueil Un peu de fièvre, retraduites par Jean-Paul Manganaro et publiées en juin 2022 par les élégantes éditions Ypsilon (une précédente version, dans une traduction de René de Ceccatty, avait été proposée dans « Les Cahiers Rouges » de Grasset en 1996).

Le Désert des Tartares (Il deserto dei Tartari, 1940), Dino Buzzati (par Léon-Marc Levy)

Ecrit par Léon-Marc Levy , le Mercredi, 24 Janvier 2024. , dans Italie, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Roman, Pocket, En Vitrine

Le Désert des Tartares (Il deserto dei Tartari, 1940), Dino Buzzati, Editions Pocket, 2004, trad. italien, Michel Arnaud, 267 pages Edition: Pocket

 

C’est avec Le Désert des Tartares, publié en 1940, que Dino Buzzati devint un écrivain majeur, en Italie et dans le monde. Ce qui a fasciné – et fascine encore – les lecteurs est ce monument d’immobilité et d’intemporalité que l’auteur a bâti autour d’une attente qui, bien que palpable au quotidien, semble proche d’un univers onirique. Si le rêve est déplacement, condensation et métaphore, celui de Giovanni Drogo, le jeune sous-lieutenant est immuabilité, dilatation et réalisme. De quelle attente s’agit-il ? D’un possible (probable ?) assaut à venir des Tartares contre la forteresse qu’il défend ? La courbe narrative du roman nous laisse plutôt penser à la seule attente qui compte dans une vie : celle de la mort, faisant ainsi de ce roman une métaphore de la condition humaine.