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Iles britanniques

Rouge ou Mort, David Peace

Ecrit par Léon-Marc Levy , le Jeudi, 21 Août 2014. , dans Iles britanniques, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Roman, La rentrée littéraire, Rivages

Rouge ou mort (Red or Dead), traduit de l’anglais par Jean-Paul Gratias. 22 août 2014. 800 p. 24 € . Ecrivain(s): David Peace Edition: Rivages

 

« And you'll never walk alone...
You'll never walk alone. 
Walk on, walk on, with hope in your heart, 
And you'll never walk alone... 
You'll never walk alone. »*

 

Ce livre n’est pas un roman – bien qu’il soit romancé. Ce n’est pas non plus un récit historique, bien que tout y soit rigoureusement fondé sur la réalité vécue. Ce n’est pas enfin un grand poème, bien que la langue y soit l’objet d’un travail permanent de rythmique et de sonorités. Ce livre – ce grand livre – est une Messe solennelle, une suite de psaumes, un hymne sacré dédié au football. Au Liverpool Football Club. A son entraîneur historique Bill Shankly. A son public de supporters passionnés, les prolétaires de Liverpool. Ce livre est chanté à un million de voix pour la gloire éternelle des « Reds », les « rouges », ceux qui ne « marcheront jamais seuls »*.

War and Breakfast (Shoot, Get Treasure, Repeat), vol 1, Mark Ravenhill

Ecrit par Marie du Crest , le Jeudi, 21 Août 2014. , dans Iles britanniques, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Théâtre, Les solitaires intempestifs

War and Breakfast (Shoot, Get Treasure, Repeat), vol 1, traduit de l’anglais par M. Goldberg, C. Hargreaves, D. Hollier, G. Joly, S. Magois et B. Pélissier, juin 2014, 224 p. 17 € . Ecrivain(s): Mark Ravenhill Edition: Les solitaires intempestifs

 

« Pourquoi vous nous faites sauter ? »

Ces premiers mots du volume 1 de War and breakfast sonnent comme un coup de tonnerre : il sera question de la violence de la guerre, du terrorisme et d’une société sûre de ses valeurs contre le monde des « enturbannés » dans la suite des neuf pièces courtes d’un ensemble qui en compte dix-sept, que Ravenhill publia en Angleterre en 2008, soit cinq ans après le début de la guerre en Irak menée aux côtés des Etats-Unis, sous le gouvernement Blair. Chacune d’entre elles est traduite par un traducteur jouant à la fois sur l’idée d’une suite dans laquelle chaque texte peut-être autonome mais aussi constitué comme un morceau d’un puzzle dramatique. En effet, d’une pièce à l’autre, l’auteur établit des ponts : retour de certains personnages (en premier lieu, les soldats), de certains dispositifs (chœurs et dialogues), expressions en leitmotive telles « liberté et démocratie » ou « alléluia ! ». La guerre du titre en est le fil conducteur et le breakfast, l’écho dérisoire des occidentaux même si la fresque a été montée à l’heure du petit-déjeuner, durant l’édition de 2007 à Edimbourg.

Un homme au singulier, Christopher Isherwood

Ecrit par Léon-Marc Levy , le Jeudi, 03 Juillet 2014. , dans Iles britanniques, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Roman, Grasset

Un homme au singulier (A single man). Traduction de l'anglais Léo Dilé. Avril 2014. 175 p. 8,20 € . Ecrivain(s): Christopher Isherwood Edition: Grasset

 

Dire à chaque opus d’Isherwood qu’il s’agit d’un chef-d’œuvre va finir par paraître conventionnel. Et pourtant que dire d’autre en tout premier sur ce bijou de roman qu’est « un homme au singulier » ? Un condensé de vie, de douleur, de solitude et d’apaisement nous attend dans ce petit livre.

Une journée, une, dans la vie au crépuscule de George. Il est seul, envahi par le souvenir omniprésent de Jim, mort il y a peu et qui l’a laissé derrière, désemparé. La vie continue certes mais quelle vie ? Ecornée, étrangère à soi, orpheline. On ne se fait pas à la mort de l ‘autre, on vit autour d’une béance, d’un trou infini.

« Et c’est ici, presque tous les matins, que George, arrivé au pied de l’escalier, a cette sensation de se trouver soudain au bord d’une corniche à pic, brutalement creusée, aux arêtes vives – comme si la route avait été emportée par un glissement de terrain. C’est ici qu’il s’arrête pile et sait, avec une acuité à donner la nausée, presque comme pour la première fois : Jim est mort. Est mort. »

La violette du Prater, Christopher Isherwood

Ecrit par Léon-Marc Levy , le Jeudi, 05 Juin 2014. , dans Iles britanniques, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Roman, Grasset

La violette du Prater (The Prater Violet). Traduit de l’anglais par Léo Dilé. Grasset Cahiers rouges avril 2014. 150 p. 7,90 € . Ecrivain(s): Christopher Isherwood Edition: Grasset

 

Dans l’œuvre d’Isherwood, pourtant très fournie, il n’y a que des chefs-d’œuvre. Certes « Adieu à Berlin » y fait figure de sommet mais ce roman-ci est aussi l’œuvre d’un maître. Tout l’art d’Isherwood s’y retrouve, cette capacité à glisser sur la toile de fond sombre de l’histoire du XXème siècle pour se réfugier – et nous réfugier – dans le destin somme toute trivial de personnages romanesques.

Romanesque, comment l’être plus que la figure centrale de ce livre : Bergmann, metteur en scène de cinéma digne du personnage de Falstaff du grand Will. Enorme, baroque, génial, bruyant, agaçant, attachant ! Le narrateur, le jeune écrivain/scénariste « Isherwood », mais oui, en est tout ébouriffé mais fasciné surtout. Les quelques semaines partagées à travailler avec Bergmann à la réalisation d’un film, « la violette du Prater », seront pour lui un vrai parcours initiatique. Pas seulement au plan professionnel, mais surtout au plan humain.

Les scènes désopilantes se succèdent sous les yeux ébahis des collaborateurs du film et d’Isherwood.

La solitude est sainte, William Hazlitt

Ecrit par MCDEM (Murielle Compère-Demarcy) , le Samedi, 31 Mai 2014. , dans Iles britanniques, Les Livres, Critiques, Essais, La Une Livres, Quai Voltaire (La Table Ronde)

La solitude est sainte, mai 2014, 126 pages, 14 € . Ecrivain(s): William Hazlitt Edition: Quai Voltaire (La Table Ronde)

 

Avant tout destiné à la peinture, William Hazlitt (1778-1830) offre dans La solitude est sainte le rythme et la coulée à la sensibilité romantique du littérateur en lui. Mais le peintre et l’écrivain s’y retrouvent, puisque tous deux exercent le goût de l’observation sur le vif ; l’œil au quotidien sans cesse aux aguets de l’environnement journalier en ses détails et sa vue panoramique ; une érudition empirique fondée sur l’expérience et l’étude de la nature qu’il importe non pas de copier mais d’exprimer (cf. Préface de Lucien d’Azay in La solitude est sainte).

Ce recueil, dont le titre est emprunté au Stello d’Alfred de Vigny, se compose de trois essais dont une sensibilité reconnaissable parcourt la teneur et la cohérence des propos sur l’art de vivre célébré. Partir en voyage ainsi rejoint Vivre à part soi dans la liberté individuelle défendue et illustrée par une solitude choisie et assumée pour mieux vivre en harmonie avec le monde extérieur observé à distance, et avec soi-même. Le goût et l’envie d’une existence itinérante va de pair chez William Hazlitt, qui a publié ces essais en 1821 et 1822, avec des départs non manqués dès que cela lui était possible et pleinement assumés en leur solitude désirée afin, justement, d’aller mieux à la rencontre de l’Autre.