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Essais

Des Mondes lettrés aux Lieux de savoir, Christian Jacob (par Gilles Banderier)

Ecrit par Gilles Banderier , le Lundi, 28 Octobre 2019. , dans Essais, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Les Belles Lettres

Des Mondes lettrés aux Lieux de savoir, Christian Jacob, 2018, 464 pages, 35 € Edition: Les Belles Lettres

 

Des Mondes lettrés aux Lieux de savoir appartient à une catégorie d’ouvrages plus répandue, semble-t-il, dans le monde anglo-saxon qu’en France : le recueil de travaux publié par un savant, coup d’œil rétrospectif jeté à une carrière, dont on peut ainsi (ou non) apprécier la cohérence, les palinodies, les repentirs.

Personne ne trouve extraordinaire de pouvoir lire, dans une savante édition critique du texte original ou dans une simple traduction en livre de poche, les dialogues de Platon, le poème de Lucrèce, les tragédies de Sophocle. Ces œuvres nous enchantent et en ont inspiré bien d’autres. Mais nous oublions que nous n’en disposons que grâce à un improbable concours de circonstances. Derrière chaque page ancienne que nous pouvons lire, il y a le double miracle de sa conservation et de sa transmission. De même que le nombre des êtres humains morts dépasse de loin celui des vivants, la quantité d’œuvres perdues sans retour dépasse celle des œuvres que nous avons conservées. Et même si cela semble difficile à croire, il est tout à fait possible (bien qu’indémontrable) qu’en qualité, ces œuvres disparues aient été supérieures à celles qui nous sont parvenues.

Écrits stupéfiants, Drogues & littérature d’Homère à Will Self, Cécile Guilbert (par Jean-Paul Gavard-Perret)

Ecrit par Jean-Paul Gavard-Perret , le Jeudi, 17 Octobre 2019. , dans Essais, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Robert Laffont

Écrits stupéfiants, Drogues & littérature d’Homère à Will Self, Cécile Guilbert, septembre 2019, 1440 pages, 32 € Edition: Robert Laffont

 

Drogue et Littérature ou les poisons du rêve

Entre enfer et paradis, produit et dose, Cécile Guilbert rappelle que la drogue offre une dualité. Il y a là extase et souffrance. Les adjuvants illicites font sombrer mais aussi ils sont capables d’ouvrir des portes (particulièrement les psychédéliques). La drogue est donc souvent au seuil de la littérature et ce, depuis la poésie védique et donc quasiment les origines de l’humanité. Mais les écrivains s’en servent véritablement beaucoup plus tard.

Cécile Guilbert nous rapproche de lieux étranges voire – comme Michaux – des « rencontres avec les Dieux », bref d’un ailleurs inatteignable – source de savoir ou paradis. La mesure de l’être est donc métamorphosée par le « poison noir » de l’Opium qui provoque « la rencontre de Pommard et du Pernod » selon Cocteau qui est bien plus qu’un dandy de la drogue auquel il fut réduit. La drogue est souvent une esthétique qui dilate le temps. Et Cécile Guibert fait le tour de la question dans une classification judicieuse abondamment illustrée de textes significatifs.

Mémoire du yiddish Transmettre une langue assassinée Entretiens avec Stéphane Bou, Rachel Ertel (par Gilles Banderier)

Ecrit par Gilles Banderier , le Lundi, 14 Octobre 2019. , dans Essais, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Albin Michel, Histoire

Mémoire du yiddish Transmettre une langue assassinée Entretiens avec Stéphane Bou, Rachel Ertel, mai 2019, 218 pages, 19 € Edition: Albin Michel

 

Les langues mortes jonchent la route de l’humanité, au long de son chemin tortueux et désespérant vers on ne sait quelle destination : certaines, dont on a oublié jusqu’au nom ; d’autres connues d’une poignée de spécialistes à travers le monde ; d’autres enfin prestigieuses, comme le latin, qui ne mourut véritablement qu’au XXe siècle. On connaît au moins une langue ressuscitée, l’hébreu, certes jamais oubliée, redevenue cependant langue vivante de plusieurs millions de locuteurs. Mais qu’est-ce qu’une langue assassinée ?

Les communautés juives d’Europe, de l’Alsace à la Russie, employèrent pendant des siècles non pas l’hébreu, réservé à un usage liturgique, mais un étonnant mélange d’allemand, de langues slaves et d’hébreu : le yiddish, parlé et écrit sur la plus grande partie du continent – une extension dont peu de langues purent jamais se prévaloir. Le yiddish ne se contenta pas d’être parlé : des journaux, des romans, des pièces de théâtre, des poèmes se publiaient.

Ainsi parlait, Georges Bernanos (par Marc Wetzel)

Ecrit par Marc Wetzel , le Mardi, 08 Octobre 2019. , dans Essais, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Anthologie, Arfuyen

Ainsi parlait, Georges Bernanos, Dits et maximes de vie choisis et présentés par Gérard Bocholier, août 2019, 152 pages, 14 € Edition: Arfuyen

 

Georges Bernanos (1888-1948) vomit la sagesse, « Il n’est rien de haïssable en l’homme que sa prétendue sagesse, le germe stérile, l’œuf de pierre que les vieillards se passent de génération en génération et qu’ils essaient d’échauffer tour à tour entre leurs cuisses glacées » (n°129), et voilà pourtant – admirablement composé par Gérard Bocholier – un authentique livre de sagesse, car l’effort de sagesse (nous le savons tous par ce qui également nous en sépare !) tient à la puissance de trouver la paix dans la vérité. Car la vérité ne laisse jamais spontanément en paix : elle divise les hommes (puisqu’elle est indifférente aux intérêts subjectifs et à leur conflit) et intimide l’homme (car elle révèle ce qui rend le réel tel, et tranche depuis sa souveraine clarté) ; inversement, la fausseté nous délivre illusoirement de la guerre, car elle distord ou dissimule ce qui pousse invinciblement l’homme à détruire l’homme. Les hommes mentent d’abord par peur du mal qu’ils font ou subissent. « On ne massacre jamais que par peur, la haine n’est qu’un alibi » (n°116).

Touaregs L’exil pour patrie, Intagrist el Ansari (par Patryck Froissart)

Ecrit par Patryck Froissart , le Mardi, 08 Octobre 2019. , dans Essais, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Poésie, Maghreb, Histoire

Touaregs L’exil pour patrie, Editions Alfabarre, 2018, 200 pages, 25 € . Ecrivain(s): Intagrist el Ansari

 

Auteur de l’itinéraire poétique Echo saharien L’inconsolable nostalgie, Intagrist el Ansari est aussi journaliste et historien. C’est à ce titre qu’il a compilé sous le titre Touaregs L’exil pour patrie une sélection d’articles de presse et d’analyses géopolitiques et sociologiques qu’il a publiés dans divers magazines sur la situation de belligérance perpétuelle dans laquelle vivent les diverses populations du Sahel, et particulièrement les Touaregs du nord du Mali, depuis 2012. Cette somme est à la fois un ouvrage pédagogique et l’expression d’une révolte. Ouvrage pédagogique efficace par la redondance et la précision des éléments factuels de texte en texte et par la possibilité offerte au lecteur de suivre quasiment de mois en mois l’évolution des événements contemporains dans cette partie agitée du monde sahélien.

Ouvrage pédagogique nécessaire à qui veut tenter de démêler l’écheveau a priori inextricable des groupes armés et des forces politiques locales et externes impliqués dans l’histoire récente de ce vaste espace quasi-désertique englobant la moitié nord du Mali et les régions périphériques.