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Essais

Arguments d'un désespoir contemporain, Richard Millet

Ecrit par Martine L. Petauton , le Dimanche, 01 Mai 2011. , dans Essais, Les Livres, Recensions, La Une Livres, Hermann

Arguments d’un désespoir contemporain, 156 p., 18 euros. . Ecrivain(s): Richard Millet Edition: Hermann

C’est un livre à l’image de ces eaux noires, vivantes par en-dessous, mais presqu’immobiles à l’œil ; mystérieuses, attirantes ; celles qui essaiment sur le grand plateau de Millet : Millevaches - Millesources. On les regarde, partagés entre fascination et crainte ; elles font partie d’un autre nous, lointain ; elles murmurent les origines ; elles n’invitent pas à la baignade…
Un essai, ce petit livre dense ? C’est à la fois plus vivant et plus personnel – l’homme, l’écrivain habitent chaque page, en une genèse pudique et un peu austère – on imagine qu’on aurait pu l’intituler : « souffles », « cri », ou simplement « dires ».
C’est âpre, rugueux comme le granite, bousculant comme le « Jean d’Auvergne » qui sature le Limousin en hiver ; en même temps, le son a la pureté d’un cristal. On retrouve, là, dans cet « arguments… » l’itinéraire et l’œuvre de cet auteur, définitivement haut perché, à part, dans la grande littérature.
Livre d’amour de la littérature et de la langue, qu’il faut mériter, et, pour moi, le chemin a été dur, car il faut en passer par deux ou trois choses qui sont en Millet, qui le façonnent, qu’on sait de lui, qu’on n’aime pas vraiment ! « la foule… relents de produits de chez Mac Donald… diverses sortes de métis… créolisation générale… vacarme ».

The Corner, David Simon & Ed Burns (par Yann Suty)

Ecrit par Yann Suty , le Jeudi, 07 Avril 2011. , dans Essais, Les Livres, Recensions, Polars, La Une Livres

The Corner, Enquête sur un marché de la drogue à ciel ouvert. 396 p. 21 € – Florent Massot . Ecrivain(s): David Simon & Ed Burns

 

De temps en temps, il est bon de refermer ses livres et de s’installer devant la télé. Avec la série américaine Sur Ecoute (The Wire en VO), elle atteint des sommets. Seuls quelques très grands films peuvent rivaliser avec. On peut l’affirmer également haut et fort : Sur Ecoute écrase la très grande majorité de la production littéraire. Qu’en déplaise aux puristes, elle peut légitimement être placée au même plan que des œuvres de Dostoïevski. Parfaitement !
Créée par le journaliste David Simon et Ed Burns, un ancien inspecteur de police, la série a été scénarisée par des pointures du polar Outre-Atlantique : Richard Price, Dennis Lehane, George Pelecanos. Et ça se voit. Les personnages sont finement écrits. Avon Barksdale, Stringer Bell, McNulty, Omar, Leaster Freamon, Kima Greggs. Marlo Stanfield, le lieutenant Cedric Daniels, Roland « Prez » Pryzbylewski, Tommy Carcetti… pour n’en citer que quelques-uns (et il y en a tant d’autres !) : chacun est une véritable série dans la série à lui seul. Transpirant d’humanité, ils évoluent en fonction des situations auxquelles ils sont confrontés et le téléspectateur change de point de vue sur eux au fur et à mesure.
Les dialogues sont écrits au cordeau et les intrigues menées avec un sens implacable du récit. Le tout dans une ambiance jazzy qui prend son temps. Sur écoute n’est pas une de ces séries qui va à toute allure à la 24. C’est ce qui ne la rend que plus addictive.

De L'autofiction comme outil herméneutique, Thomas Carrier-Lafleur (par Arnaud Genon)

Ecrit par Arnaud Genon , le Mardi, 08 Mars 2011. , dans Essais, Les Livres, Livres décortiqués

Une philosophie du « temps à l'état pur ». L'autofiction chez Proust et Jutra, Laval, Presses de l'université Laval, coll. « Zêtêsis », 2010, 220 p. 30 € . Ecrivain(s): Thomas Carrier-Lafleur

 

L’autofiction, après avoir été considérée comme un « mauvais genre1 » nourrit de plus en plus régulièrement le champ de la théorie littéraire. Le mot vient désormais s’appliquer à de véritables monuments comme l’œuvre proustienne ou à d’autres médias artistiques tels que le cinéma2. Que l’on considère la « chose » comme un genre littéraire, comme une posture énonciative ou un concept, elle est dans tous les cas un moyen d’interroger le sujet, de renouveler son questionnement à l’ère de la crise qu’il traverse depuis la fin de la Deuxième Guerre mondiale. Considérée de cette manière, l’autofiction amène le critique à approcher ce qui touche à la philosophie, ainsi que le remarque justement Thomas Carrier-Lafleur dans l’avant-propos de la présente étude: « L’esthétique du je, la déconstruction du sujet, sa reconstruction, de même que son interprétation sont des notions philosophiques clés pour comprendre l’autofiction » (p.10).