On peut considérer que les paroles qui suivent sont du même ordre que les précédentes, avec quelque chose en moins, comme si le texte diminuant, se densifiait et allait vers l’essentiel. Donc, il est tout à fait envisageable que l’acteur s’adresse directement au public, par exemple depuis un proscenium, comme si l’acteur pouvait parler aux spectateurs sans la convention de la scène, un peu comme le font les orateurs des Speakers’ Corner à Hyde Park. En tous cas, on doit sentir que quelque chose a changé dans la manière dont évolue l’action.
J’ai un peu peur. Vous savez comme dans Vargtimmen, où le peintre écoute cette minute. Écoutez. Vous entendez ? Cette minute. Juste pour se contempler, les yeux dans les yeux. Pour être convaincant. De la dépression. C’est comme cela que ça s’appelle. Pour moi, il y a une force, un mouvement violent, une puissance en surcroît, qui permet de poursuivre, vous savez, quelque chose comme le struggle for life. Une lutte. Parce que la mort n’a aucun attrait. Non, c’est juste un peu de peur. Le trac. Pour finir, on a tous conscience que ce n’est pas une invention, je veux dire, mourir. Le trépas, c’est ça, en vérité, que l’on redoute. Toi ? Moi ? Nous ? Nous. D’accord, nous. Le trépas c’est le trépas et c’est justement ce qui fait peur parce qu’avec la mort, tout est déjà fini, on ne peut rien regretter, mais au moment de disparaître, on croit que l’on peut changer encore, que l’on peut reprendre souffle. Écoutez. Écoutez ! Cette vieille chanson irlandaise. L’univers est trop petit. Trop confiné. C’est moche, non ? De mourir. C’est moche, n’est-ce pas ?