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Critiques

Le Palais de glace, Tarjei Vesaas (par Léon-Marc Levy)

Ecrit par Léon-Marc Levy , le Mardi, 29 Novembre 2022. , dans Critiques, Les Livres, La Une Livres, Pays nordiques, Roman, Babel (Actes Sud)

Le Palais de glace, Tarjei Vesaas, Actes Sud Babel, 2016, trad. norvégien, Jean-Baptiste Coursaud, 219 pages, 7,70 € . Ecrivain(s): Tarjei Vesaas

 

Roman poétique, poésie romanesque, Tarjei Vesaas nous offre un modèle du genre tant l’histoire racontée est attachante et forte et la langue d’une beauté à la fois éthérée et puissante. La bulle de glace qui se forme à la tête de la cascade, créant une authentique demeure naturelle de cristal, une protubérance creuse à l’intérieur, dans laquelle pénètre à flots une lumière diffractée, étincelante, le « palais de glace », est un phénomène qui ne se produit que certaines années particulièrement froides et, cette année-là, le froid dépasse de loin les normes. Le Froid, dieu génial et terrifiant qui tient dans ses mains les habitants de ce village perdu au nord de la Norvège, et qui, en cet automne glacé, remodèle leur monde, le rend sublime et mortellement dangereux. La glace, en se formant et s’épaississant sur le lac voisin, gémit et résonne, accompagnant en particulier les nuits de détonations sourdes et inquiétantes. Les nuits, très précoces en cette période, noires et angoissantes, pleines de menaces diffuses et oppressantes.

Les Agents, Grégoire Courtois (par Didier Smal)

Ecrit par Didier Smal , le Lundi, 28 Novembre 2022. , dans Critiques, Les Livres, Science-fiction, La Une Livres, Roman, Folio (Gallimard)

Les Agents, Grégoire Courtois, Folio SF, septembre 2022, 320 pages, 8,90 € Edition: Folio (Gallimard)

 

Allons au plus bref : ce roman est tout simplement illisible. Tâchons d’expliquer pourquoi, malgré l’envie de juste en rester à cette phrase.

L’histoire se déroule dans un futur indéterminé ; le narrateur appartient à une « guilde » réfugiée à l’étage 122 de la tour 135 du quartier sud d’une ville indéterminée. L’objectif ? Survivre dans un univers de données affichées sur écran, alors que d’autres guildes, survivant dans la même tour, tentent d’éliminer leurs concurrents, et que la rue est devenue un enfer ou une jungle, ou un truc du genre. Métaphore d’un capitalisme poussé à outrance, probablement ; contre-utopie où des lecteurs autrement complaisants liront une référence au Ubik de Philip K. Dick, on peut y songer par charité. Il doit y avoir de tout cela, et on aurait aimé voir où Courtois allait emmener le lecteur.

Pierre Reverdy, Écrire, pour survivre, Roger Aïm / Julien Gracq, Prix Goncourt 1951, Histoire d’un refus (Essai), Roger Aïm (par Philippe Chauché)

Ecrit par Philippe Chauché , le Jeudi, 24 Novembre 2022. , dans Critiques, Les Livres, Essais, La Une Livres

Pierre Reverdy, Écrire, pour survivre, Roger Aïm, Éditions La Simarre, juin 2022, 132 pages, 15 €

Julien Gracq, Prix Goncourt 1951, Histoire d’un refus (Essai), Roger Aïm, Éditions La Simarre, août 2020, 75 pages, 13 €

 

« Écrire m’a sauvé – j’ai sauvé mon âme. Je ne peux pas imaginer ce qu’eût été ma vie si je n’avais pas écrit. Mais je crois que je ne suis ni un poète, ni un écrivain, ni un artiste. Mais un homme qui n’a pas trouvé d’autre moyen de garder le contact avec la vie, de surnager. J’ai écrit comme on s’accroche à une bouée » (Lettre de Pierre Reverdy à Jean Rousselot, 16 mai 1951).

« Dadaïste avant le mouvement Dada, surréaliste avant Breton, il s’inscrit dans la discipline constructive (Apollinaire) du cubisme. Même si plus tard il préserve ses relations avec les artistes surréalistes comme il l’avait fait avec les cubistes, sa trajectoire poétique originale sera autre, dans la solitude (Roger Aïm).

Verger, etc…, Pascal Commère (par Laurent Fassin)

Ecrit par Laurent Fassin , le Mercredi, 23 Novembre 2022. , dans Critiques, Les Livres, La Une Livres, Poésie, Roman, Fata Morgana

Verger, etc…, Pascal Commère, Éditions Fata Morgana, octobre 2022, 64 pages, 14 € . Ecrivain(s): Pascal Commère Edition: Fata Morgana

 

Des notes prises au fil du temps dans des carnets, puis relues sans hâte afin d’en retenir juste assez qui puissent donner lieu à un volume, ainsi est né Verger, etc… L’ouvrage, rehaussé de monotypes – des arbres exposés aux saisons, imaginés par Joël Leick – aurait pu aussi bien s’intituler Portrait de l’artiste en brin d’herbe. Car l’artiste en question, le romancier, le poète Pascal Commère, s’il ne hausse jamais le ton, procédant par touches nettes et légères, aime son pays, aime sa terre et sait nous en faire partager la gravité, l’équilibre et l’animation paisible.

Par ce livre lentement mûri et bien pensé, les gens de peu (qui s’inscrivent dans la mémoire dès l’enfance) s’animent et nous émeuvent. Au gré de la lecture, revit aussi, dans son intimité, celui qui sut aussitôt distinguer, à la lecture du premier recueil, Les Commis (Éditions Folle Avoine, 1982, réédition par Le Temps qu’il fait, 2007), une voix personnelle, attachée à ses racines. André Frénaud, pour ne pas le nommer – dont « l’expressionnisme lyrique » (sic) mériterait une reconnaissance plus grande –, nous est restitué ici d’un trait vigoureux : « Toute sa vivacité surgissait (…), l’accent de sa voix devenait plus roulant, retrouvant ainsi la tournure de parler de sa Saône-et-Loire ».

La Cloche de détresse (The Bell Jar, 1963), Sylvia Plath (par Léon-Marc Levy)

Ecrit par Léon-Marc Levy , le Mardi, 22 Novembre 2022. , dans Critiques, Les Livres, La Une Livres, USA, Roman, Gallimard

La Cloche de détresse (The Bell Jar, 1963), Sylvia Plath, Gallimard, L’Imaginaire, 1988, trad. américain, Michel Persitz, 267 pages, 10,80 € . Ecrivain(s): Sylvia PLATH Edition: Gallimard

 

Cet ouvrage de la grande Sylvia Plath est ce qu’il est convenu d’appeler un roman-culte, au même titre que l’est L’Attrape-cœurs de J. D. Salinger, écrit une dizaine d’années auparavant. De nombreux éléments relient ces deux livres : ce sont les uniques romans de leur auteur, ce sont des autobiographies à peine déguisées, ce sont des séjours de leurs héros à New York et, nous y reviendrons, les correspondances dans les postures énonciatives sont fortes.

On peut y ajouter que, comme pour l’ouvrage de Salinger, on peut être déçu, du moins par le début du récit : les mésaventures d’une jeune fille fragile de province dans les milieux mondains de Manhattan, ses amourettes, ses crises de larmes, ses brefs enthousiasmes pour des broutilles, occupent une première moitié du livre et sont plutôt ennuyeux.