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Le Livre d’Aron, Jim Shepard

Ecrit par Léon-Marc Levy , le Jeudi, 11 Février 2016. , dans USA, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Roman, L'Olivier (Seuil)

Le Livre d’Aron (The Book of Aron), février 2016, trad. américain Madeleine Nasalik, 231 pages, 21 € . Ecrivain(s): Jim Shepard Edition: L'Olivier (Seuil)

 

Comment peut-on raconter une sorte de « Guerre des Boutons » dans le cadre effroyable du Ghetto de Varsovie en 1943 ? Il faut soit écrire un chef-d’œuvre, soit rien. Jim Shepard a choisi le chef-d’œuvre. En sertissant l’histoire d’Aron et de ses copains et copines dans les rues dévastées et sinistres d’un parc à bétail pour Juifs, l’auteur taille un joyau au cœur de l’horreur.

La bande d’enfants ne « joue » pas vraiment. Leurs aventures quotidiennes visent à trouver la pitance, les couvertures, les casseroles qui manquent de plus en plus à la maison. Mais comme ce sont des enfants, ils en font un terrain de jeux. Ils creusent des trous, font des passages dans les palissades, évitent – autant que possible – les soldats nazis et les collabos polonais. Ils passent de « l’autre côté », celui des non-juifs, plus libres et mieux nantis, pour y gratter ce qu’ils peuvent et le rapporter. A ceux qui souffrent, à ceux qui se meurent, du typhus, de la tuberculose, de la faim, des assassinats réguliers des nazis et des miliciens.

Le Guérisseur de Cathédrales suivi de Nick et le Glimmung, Philip K. Dick

Ecrit par Didier Smal , le Lundi, 08 Février 2016. , dans USA, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Roman, J'ai lu (Flammarion)

Le Guérisseur de Cathédrales suivi de Nick et le Glimmung, septembre 2015, trad. de l’anglais (USA) par Marcel Thaon et Mona de Pracontal, 314 pages, 6 € . Ecrivain(s): Philip K. Dick Edition: J'ai lu (Flammarion)

 

Avant toute chose, louons les éditions J’Ai Lu, qui ont l’excellente idée de rééditer du Philip K. Dick sans l’infâmant « SF » en couverture. Certes, nous sommes des centaines de milliers à être fiers de notre goût immodéré pour la science-fiction, mais on a parfois l’impression que les maisons d’édition marquent les romans d’un clair « SF » au cas où les amateurs du genre formeraient juste une secte de lecteurs bornés et dépourvus de tout goût puisant indifféremment dans les collections à dos gris métallisé… Blague à part, pour qui tient Des Fleurs pour Algernon pour un grand roman sur l’âme humaine ; Un Jeu Dangereux pour un roman d’amour d’un tragique fini ; Le Fils de l’Homme pour un pur roman lautréamontesque ; pour qui, en bref, ne voit guère de solution de continuité entre les divers genres compris dans sa bibliothèque, cette (sous-)classification est parfois difficile à supporter… Donc, gloire à J’Ai Lu pour l’entrée en « vraie » littérature de Philip K. Dick !

Cassada, James Salter

Ecrit par Didier Smal , le Samedi, 06 Février 2016. , dans USA, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Roman, Points

Cassada, août 2015, trad. de l’anglais (USA) Jean-François Ménard, 272 pages, 8,5 € . Ecrivain(s): James Salter Edition: Points

 

Roman à l’étrange destinée que celui-ci, à la fois deuxième et sixième de James Salter (1925-2015) : publié en 1961 sous le titre The Arm of Flesh, il a été retravaillé par son auteur pour republication en 2000 sous le titre Cassada, ainsi que l’explique Eric Neuhoff dans la préface (très mal écrite, d’un style à l’indigence affligeante surtout si l’on considère qu’elle est écrite pour un roman de James Salter…) à cette nouvelle édition de poche. Pour savoir à quel point le roman a été remanié, de The Arm of Flesh à Cassada, il suffirait de dépenser environ cent dollars et se donner la peine de lire le premier ; oui, il suffirait, et ça ôterait peut-être certains doutes, ça permettrait de mieux comprendre quelle part occupent respectivement le jeune James Salter et son aîné de presque quarante ans dans le second. Ce pourrait être l’objet d’une étude de type universitaire, intéressante aux yeux de qui préfère disséquer la littérature plutôt qu’en profiter. De toute façon, ainsi que l’écrit Salter dans un bref avant-propos, « Cette nouvelle version prétend ainsi devenir le livre que l’autre aurait pu être », étant admis que l’auteur lui-même décrètre que The Arm of Flesh « présentait de graves défauts ».

Sinatra Confidential, Shawn Levy

Ecrit par Léon-Marc Levy , le Jeudi, 21 Janvier 2016. , dans USA, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Biographie, Rivages

Sinatra Confidential, novembre 2015, trad. anglais Nicolas Guichard, 368 pages, 22 € . Ecrivain(s): Shawn Levy Edition: Rivages

 

Si on a en tête la magnifique biographie de Dean Martin par Nick Tosches (*1), on ne peut qu’être dérouté par ce livre. On est loin du récit haletant, lyrique, passionné de Dino. Mais le titre Sinatra Confidential fait plutôt référence à James Ellroy et son L.A. Confidential. Et là, le livre tient la route. On retrouve en effet chez Shawn Levy la volonté de dessiner une époque à travers la carrière de Frank Sinatra. Ou plutôt, car c’est plus de cela qu’il s’agit, à travers l’histoire du « Rat Pack » (C’est d’ailleurs le titre original : « Rat Pack Confidential »).

Qu’est-ce donc que le « Rat Pack » – pour ceux qui ne le sauraient déjà – ? : Un jour, voyant les gars de la bande de Sinatra assis au premier rang du bar d’un casino, Lauren Bacall a grommelé : « Vous ressemblez à un foutu Rat Pack (*2). Ils se sont tous marrés ». Le terme est resté et ils l’ont rendu célèbre. Au début il y avait Bogart, mais le « Pack » qui a duré longtemps et écumé tous les casinos, salles de concert et restaurants de Las Vegas à la Côte Ouest, était composé de Sinatra, Dean Martin, Sammy Davis Jr, Peter Lawford et Joey Bishop.

Fonds perdus, Thomas Pynchon

Ecrit par MCDEM (Murielle Compère-Demarcy) , le Vendredi, 15 Janvier 2016. , dans USA, Les Livres, Critiques, Livres décortiqués, La Une Livres, Roman, Seuil

Fonds perdus, trad. Nicolas Richard, 441 pages, 24 € . Ecrivain(s): Thomas Pynchon Edition: Seuil

Avec Fonds perdus (Bleeding Edge), « l’auteur reclus », Thomas Pynchon, signe l’un de ses meilleurs livres, un « thriller policier » où se mêlent comme dans ses opus précédents absurde et érudition. Situant son roman dans NYC (New York City) 2001, Pynchon transpose ici les anciens codes du polar dans l’univers des nouvelles technologies. Dans un décor de Web profond se pratique, au travers de l’enquête de l’héroïne Maxine Tarnow, une radiographie des bas-fonds de la vie new-yorkaise. La vie newyorkaise telle qu’elle se déroulait, juste après l’éclatement de la bulle Internet (The Bubble dot-com), juste avant les événements tragiques du 11 septembre 2001 – dans une interzone trouble, troublante. Une problématique sert de fer de lance à l’intrigue : comment se fait-il que la start-up hashslingrz du très louche Gabriel Ice, société de sécurité informatique downtown très active dans l’Alley, n’ait pas bu le bouillon au moment de l’éclatement de la bulle ?

Un « thriller policier » vraiment ? Le genre est plus difficile à fixer. Le nom de la collection aux éditions du Seuil, Fiction & Cie, suffit sans doute et sonne plus juste. Certes le rythme haletant et la visite des bas-fonds très troubles où nous entraîne l’ère dot-com flirtent avec le genre du thriller. De même que l’enquête que nous fait suivre ce roman nous rapproche du genre policier. Mais – et cela ressemble à son auteur – tenter de définir ici avec justesse le genre de Fonds perdus est plus compliqué que cela.