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La conquête des îles de la Terre Ferme, Alexis Jenni (par Stéphane Bret)

Ecrit par Stéphane Bret , le Vendredi, 28 Juin 2019. , dans La Une Livres, Les Livres, Critiques, Roman, Gallimard

La conquête des îles de la Terre Ferme, 449 pages, 7,99 € . Ecrivain(s): Alexis Jenni Edition: Gallimard

 

Alexis Jenni a le sens de l’histoire. Cette aptitude à resituer les guerres coloniales de la France dans l’exercice d’un art, illustrée à merveille dans son premier roman L’art français de la guerre, il la met en œuvre dans ce roman La conquête des Îles de la Terre Ferme. Comme le rappelle l’auteur dans son texte d’avertissement précédent celui du roman : « Tout est vrai, donc sauf les imprécisions, exagérations, condensations et menteries, qui sont dues au principe de débordement qui réside au cœur de tout roman ». Effectivement, le lecteur ressent cette vérité de la conquête dans ses aspects humains, économiques, religieux, idéologiques. Sans nous faire éprouver de la sympathie pour ces hommes, Alexis Jenni prend soin de nous rappeler qui ils étaient : d’abord, des individus humiliés à l’origine par leur éducation : « Je m’appelle Juan de Luna (…) Je me souviens parfaitement du jour où je cessais de répondre, ce jour précis où mon père que j’indifférais se mit à me haïr, ce qui est un sentiment plus noble que l’indifférence, car plus intense, et plus propre à générer des prouesses ».

Article 36, Henri Vernet (par Stéphane Bret)

Ecrit par Stéphane Bret , le Lundi, 25 Mars 2019. , dans La Une Livres, Les Livres, Critiques, Roman, Jean-Claude Lattès

Article 36, février 2019, 400 pages, 20 € . Ecrivain(s): Henri Vernet Edition: Jean-Claude Lattès

 

Le genre du polar est bien établi dans la littérature française, celui de la fiction politique nous est moins familier, même si certains auteurs s’y sont consacrés avec un certain succès, tel Marc Dugain.

Henri Vernet, journaliste politique, a tenté une synthèse des deux genres dans Article 36.

Le roman commence par la proclamation de l’état de siège en ce début de janvier 2020. La France est submergée par une vague d’attentats terroristes, et elle ne parvient toujours pas à résoudre les problèmes de fond qui se posent au pays depuis plusieurs décennies : insécurité, chômage, banlieues en déshérence. Le Président de la République, Cardignac, fait appel à un général, Gerfaut, pour la mise en œuvre de cette Mesure. Ce général aurait contribué à sauver des Yézidis durant le conflit en Irak et en Syrie. Il peut faire penser au général de Villiers, entré en conflit au début du quinquennat avec le président Macron, à propos du budget des armées.

Rose de cendres, Pilar Rahola (par Stéphane Bret)

Ecrit par Stéphane Bret , le Mercredi, 20 Février 2019. , dans La Une Livres, Les Livres, Critiques, Espagne, Roman, Belfond

Rose de cendres, novembre 2018, trad. catalan, Marie-Christine Vila, Isabelle Lopez, 279 pages, 20 € . Ecrivain(s): Pilar Rahola Edition: Belfond

 

Que savons-nous de l’histoire de la Catalogne ? Du point de vue du lecteur français, non spécialiste de l’histoire ibérique, peu de choses, en vérité. Pilar Rahola, romancière catalane, vient opportunément nous éclairer à l’occasion de la parution en France de son roman Rose de cendres.

Ce roman ne traite pas à proprement parler de l’histoire événementielle de la Catalogne. Néanmoins, il évoque des questions essentielles quant à la nature du séparatisme, catalan, aux composantes de l’histoire sociale de cette région.

Albert Corner est un homme d’origine modeste. De retour de la guerre d’indépendance menée à Cuba, il se fixe pour objectif dès son retour de s’enrichir, à tout prix et par tous les moyens, y compris  la criminalité. Pourtant, durant ce conflit, il prend conscience qu’il est catalan, et à ce titre, victime, tout comme les Cubains, de la domination espagnole, en manifestant de l’admiration pour cette poignée de soldats cubains qui résistent dans une plantation, l’Indiana, située dans la province de Guantanamo…

Les Destinées sentimentales, Jacques Chardonne (par Stéphane Bret)

Ecrit par Stéphane Bret , le Jeudi, 31 Janvier 2019. , dans La Une Livres, Les Livres, Critiques, Roman, Le Livre de Poche

Les Destinées sentimentales . Ecrivain(s): Jacques Chardonne Edition: Le Livre de Poche

 

Ce roman, en trois parties, apparaît a priori comme le portrait d’un monde déjà éloigné, historiquement : celui de la bourgeoisie charentaise et limousine protestante de la fin du XIXe siècle.

M. Pommerel est un fabricant de cognac, très croyant. Il n’éprouve pas de contradiction entre l’exercice de sa foi et le commerce des spiritueux. Il y voit une sorte de confirmation : « Il retrouvait dans les affaires de multiples prescriptions, des coutumes sacrées, des défenses et des permissions, des frontières précises entre le bien et le mal ».

Cet homme assiste justement à la fin d’un sermon prononcé par Jean Barnery, pasteur. L’épouse de Pommerel, disparue, était la fille de David Barnery, fondateur de la fabrique de porcelaine de Limoges. Jean Barnery est apparenté à cette famille et conserve des intérêts dans la fabrique.

Pauline est la fille de son frère Lucien. Après le décès de ce dernier, Pommerel offre à Pauline de venir habiter chez lui à Barbazac.

Berlin finale, Heinz Rein (par Stéphane Bret)

Ecrit par Stéphane Bret , le Jeudi, 15 Novembre 2018. , dans La Une Livres, Les Livres, Critiques, Langue allemande, Roman, Belfond

Berlin finale, septembre 2018, trad. allemand Brice Germain, 869 pages, 23 € . Ecrivain(s): Heinz Rein Edition: Belfond

 

Peu de romans méritent, réellement, le qualificatif de grands romans, d’œuvres-clé susceptibles de marquer la littérature de leur époque de parution. Dans la littérature allemande, caractérisée par le courant de la Trummerliteratur, littéralement la littérature des ruines qui a marqué l’immédiat après-guerre, on ne retenait pas le nom de Heinz Rein, auteur de ce roman. Cette œuvre se situe, non pas dans l’après-guerre mais dans la période s’étendant entre le début du mois d’avril 1945 et le 30 avril, à la veille de la reddition des troupes allemandes et de la prise de Berlin par l’Armée rouge.

Ce roman peut s’inscrire dans la lignée de celui de Hans Fallada, Seul dans Berlin, qui décrit la tentative de résistance au régime nazi d’un contremaître dans une usine berlinoise. Cependant, il va beaucoup plus loin : les principaux personnages du roman, le Docteur Walter Böttcher, médecin généraliste, ancien membre du parti social-démocrate, tête du groupe de résistance Berolina ; Friedrich Wiegand, imprimeur typographe, clandestin, persécuté par la Gestapo depuis douze ans ; Joachim Lassehn, déserteur de la Wehrmacht, ancien étudiant en musique ; Klose, un restaurateur qui héberge ces clandestins ; tous illustrent à un moment ou un autre du roman l’état de la société allemande à cette époque.