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Recensions

Room, Emma Donoghue

Ecrit par Paul Martell , le Samedi, 08 Octobre 2011. , dans Recensions, Les Livres, La Une Livres, Roman, Stock, La rentrée littéraire

Room, traduit de l’anglais (Canada) par Virginie Buhl, Stock, La Cosmopolite, 402 p. 21,50 € . Ecrivain(s): Emma Donoghue Edition: Stock

Jack va bientôt fêter ses cinq ans. Il est un garçon comme les autres, avec des préoccupations de son âge… sauf qu’un certain nombre d’éléments bizarres régentent sa vie.

On apprend ainsi que « le grand méchant Nick » rôde. Il peut faire irruption chez eux tout à coup. Sa mère préfère alors cacher Jack dans un placard pour qu’il ne le voie pas…

Les dialogues prennent parfois une tournure inattendue, presque surréaliste.


« – Pourquoi t’as pas demandé des bougies comme Cadeau de Dimanche ?

– Eh bien, la semaine dernière, nous avions besoin d’analgésiques ».


Au fur et à mesure, on apprend que Jack et sa mère son séquestrés dans une même et unique pièce depuis des années, la « room » du titre. Jack y est né. Et ils n’ont pas moyen de s’échapper, la mère s’y est déjà risquée et l’a amèrement regretté…

Pensées en désuétude, Fanny Cosi

Ecrit par Arnaud Genon , le Jeudi, 06 Octobre 2011. , dans Recensions, Les Livres, Biographie

Pensées en désuétude, éditions Edilivre A Paris, 2010, 172 pages.

La quatrième de couverture de Pensées en désuétude inscrit le projet de Fanny Cosi dans la lignée de Nathalie Sarraute, plus précisément dans ce que l’auteur d’Enfance appelait  « tropismes » à savoir ces « mouvements indéfinissables qui glissent très rapidement aux limites de la conscience [, qui] sont à l'origine de nos gestes, de nos paroles, des sentiments que nous manifestons, que nous croyons éprouver et qu'il est possible de définir [et qui] paraissent encore constituer la source secrète de notre existence. » (Le langage dans l'art du roman, 1970).

Ces « pensées » fragmentaires tentent donc de saisir des instants, des sensations, des sentiments, des ressentis, les états d’âme d’un « moi » éclaté, parcellaire, qui cherche à rassembler ou à perdre – on ne sait pas, on hésite –, les parcelles éparses de ce qui constitue une identité, de ce qui enracine le « je », le détermine. Fanny Cosi y expose, comme pour s’en défaire, les déchirures, les fractures d’une vie. Les drames, les pertes. Pour s’en sauver. « J’écris sans doute pour me raccrocher à la vie… Me rapprocher de moi. M’aime. Je. » On y trouve aussi l’évocation du « sentiment amoureux », du désir, des fantasmes…

Les Fantômes de Belfast (The Ghosts of Belfast), Stuart Neville (par Léon-Marc Levy)

Ecrit par Léon-Marc Levy , le Dimanche, 02 Octobre 2011. , dans Recensions, Les Livres, Polars, La Une Livres, Iles britanniques, La rentrée littéraire, Rivages/Thriller

Les fantômes de Belfast, (The ghosts of Belfast). Trad. De l’anglais (Irlande) par Fabienne Duvigneau. 410 p. 22€. Août 2011 . Ecrivain(s): Stuart Neville Edition: Rivages/Thriller

 

Il est difficile de composer univers et roman plus noirs que ce livre. La mort, les morts en sont les figures dominantes et ordonnent (au sens littéral du terme, donnent ordre) l’existence et l’action du héros, dans un Belfast « en paix », sauf dans la tête dévastée de l’un de ses tristes anciens héros.

Gerry Fegan fut un tueur de l’IRA dans les années terribles qui ensanglantèrent l’Irlande du Nord et y installèrent une terreur meurtrière pendant des décennies. Pas n’importe quel tueur : une des plus efficaces machines à exécuter les « contrats » de l’organisation. Sang-froid, précision, absence absolue d’états d’âme, une pépite létale pour les chefs de l’IRA.

Aujourd’hui, après les années de prison qui ont suivi la paix de 1998, Gerry est dépressif, ivrogne et surtout hanté par le passé. Ici encore hanté doit être pris au sens le plus fort : il vit entouré, suivi, en permanence par les fantômes de ses victimes de naguère. Policiers, membres de l’UFF (unionistes anti-catholiques), mais aussi victimes par hasard, fauchées par des bombes aveugles ou des contrats bidons. Hanté par cette mère et son bébé déchiquetés par la bombe posée dans une boucherie (effroyable ironie).

La chambre à remonter le temps, Benjamin Berton

Ecrit par Yann Suty , le Jeudi, 29 Septembre 2011. , dans Recensions, Les Livres, La Une Livres, Roman, Gallimard, La rentrée littéraire

La chambre à remonter le temps. 380 pages, 22 €. Septembre 2011 . Ecrivain(s): Benjamin Berton Edition: Gallimard

En voilà un livre étrange qui mêle avec brio hyper réalisme et science-fiction.

Le narrateur, Benjamin Berton lui-même, (d’ailleurs, le bandeau du livre indique qu’il s’agit d’une « histoire vraie ») s’installe avec sa femme, Céline, et sa fille, Ana, dans une nouvelle maison au Mans. Tout commence sous les meilleurs auspices. La vie prend le tour d’un rêve.

Mais le rêve devient peu à peu bien morne, cède la place à l’ennui. Chaque jour semble le jumeau du précédent, rien ne se passe, tout est tout le temps pareil. Le boulot. Les transports. Les semaines passent en attendant les week-ends.

Il y a bien les voisins qui sortent quelque cette vie de la torpeur. Benjamin se retrouve à former une sorte de milice, loin de toutes ses convictions, pour faire des rondes la nuit et alpaguer d’éventuels délinquants, comme un taggueur qui parsème quelques murs de ses signatures colorées. Mais Le Mans n’est pas exactement le Bronx…

Et pendant ce temps là, ses rapports avec Céline se détériorent.

Sunset Park, Paul Auster

Ecrit par Yann Suty , le Dimanche, 25 Septembre 2011. , dans Recensions, Les Livres, La Une Livres, USA, Roman, Actes Sud, La rentrée littéraire

Sunset Park, septembre 2011, 320 pages, 22,80 € . Ecrivain(s): Paul Auster Edition: Actes Sud

Il paraît bien loin le temps des livres majeurs. De ces œuvres qui marquent durablement, comme Paul Auster en a publié entre la fin des années 80 et le début des années 90. Un âge d’or, une période de grâce, avec des livres comme Cité de verre, La Chambre dérobée, Leviathan ou La Musique du hasard. Et puis, il y a ensuite comme une cassure, qu’on pourrait dater de l’époque de Smoke, le film (d’ailleurs fort charmant et habile) dont Paul Auster signa le scénario pour Wayne Wang. Est-ce que le cinéma a dynamité la verve créatrice de l’écrivain new-yorkais ? Car après cette première incursion avec lendemain, Paul Auster ne nous livra plus d’œuvres aussi mémorables. Il baissa d’un cran. Il alterna les ouvrages de bonne facture, mais qui n’atteignirent pas des sommets (La Nuit de l’oracle, Le livre des illusions), avec d’autres moyens, voire franchement médiocres (Tombouctou, Seul dans le noir).

Et Sunset Park, dans quelle catégorie est-il à ranger ?

Ça commence bien, même très bien, comme du bon Paul Auster. Le livre raconte l’histoire d’un homme, Miles Heller qui, rongé par la culpabilité après avoir provoqué la mort de son demi-frère, Bobby, a tout claqué. Il a abandonné ses études, quitté le domicile new-yorkais parental pour errer de petits boulots en petits boulots. Sept ans plus tard, il se retrouve à Miami, en Floride, à vider les maisons  abandonnées en hâte par leurs habitants victimes de la crise des subprimes.