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Pays de l'Est

Autobiographie du mal, Pavel Vilikovský (par Patryck Froissart)

Ecrit par Patryck Froissart , le Jeudi, 19 Mars 2020. , dans Pays de l'Est, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Roman, Editions Maurice Nadeau

Autobiographie du mal, Pavel Vilikovský, février 2019, trad. slovaque, Peter Brabenec, 193 pages, 21 € Edition: Editions Maurice Nadeau


Ce roman à l’atmosphère pesante met en scène les mécanismes machiavéliques de la manipulation de l’individu par les services secrets d’une police politique implacablement organisée et efficace au point non seulement d’anticiper les réactions des personnes qu’elle manœuvre et utilise de gré ou de force au service d’un pouvoir totalitaire, mais encore de les amener à agir, plus ou moins consciemment, contre leur propre morale, contre leur propre idéologie, contre leur propre nature.

L’action se situe en Tchécoslovaquie sous le régime communiste installé en 1948, à une époque et dans des circonstances historiques que l’auteur, Pavel Vilikovsky, grand écrivain slovaque décédé tout récemment, le 10 février 2020, a personnellement vécues.

Kaddish pour l’enfant qui ne naîtra pas, Imre Kertész (par Léon-Marc Levy)

Ecrit par Léon-Marc Levy , le Mercredi, 18 Mars 2020. , dans Pays de l'Est, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Roman, Babel (Actes Sud)

Kaddish pour l’enfant qui ne naîtra pas, trad. hongrois, Natalia Zaremba-Huzsvai, Charles Zaremba, 142 pages, 6,60 € . Ecrivain(s): Imre Kertész Edition: Babel (Actes Sud)

Chaque livre d’Imre Kertész est un livre important, essentiel. On le sait bien sûr pour son Être sans destin, témoignage incroyable sur Auschwitz, regard radical et inattendu sur la plus vaste horreur que le monde ait produite dans les temps des temps. Ce Kaddish – qui en est vraiment un – ne fait pas exception. Le Kaddish c’est la prière que l’on fait pour les morts chez les Juifs. C’est une prière de peine et de renoncement aux vanités du monde. Ce livre – comment pourrait-on l’appeler roman ? – est complètement, définitivement un Kaddish : dans son propos et dans sa forme.

Yitgaddal vèyitqaddsh sh’meh rabba

Bè’alma di vèra khir’outeh

Vèyamlikh malkhouteh

Veytzmakh pourqaneh

Viqarev meshi’heh …

La Petite apocalypse, Tadeusz Konwicki (par Yann Suty)

Ecrit par Yann Suty , le Vendredi, 13 Mars 2020. , dans Pays de l'Est, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Roman, Editions du Typhon

La Petite apocalypse (Mala apokalipsa, 1979), Tadeusz Konwicki, février 2020, trad. polonais, Zofia Bobowicz, 328 pages, 18,90 € Edition: Editions du Typhon

 

Quand on boit beaucoup, c’est souvent le lendemain que c’est le plus difficile. « Une cigarette à jeun n’arrange certainement pas la santé, mais cent grammes de vodka par-dessus, c’est la mort certaine. Après tout, ce ne serait pas plus mal » (p.33). Le narrateur est en pleine déprime, il fume cigarette sur cigarette, boit de l’alcool plus que de raison. D’ailleurs, le matin où l’on fait sa rencontre, il se réveille avec une sévère gueule de bois. Il est aussi écrivain qui a eu un jour du succès, mais ça fait un moment qu’il n’a pas écrit une seule ligne. Ce matin-là, il n’a pas le temps de récupérer ses esprits que deux de ses amis viennent chez lui. Ils lui font une étrange proposition. Ce n’est d’ailleurs pas tout à fait une proposition, mais plutôt un commandement : « Que ce soir, à huit heures précises, tu te fasses brûler vif devant le comité central du Parti ».

Le narrateur est d’abord un peu incrédule, mais se laisse très (trop ?) vite convaincre. Son spectaculaire sacrifice pourra contribuer à saper le régime, expliquent ses comparses. Et pas n’importe quel régime, mais le régime communiste polonais, sous domination soviétique, quelques années avant la montée en puissance de Solidarnosc.

Le Nuage et la valse, Ferdinand Peroutka (par Guy Donikian)

Ecrit par Guy Donikian , le Lundi, 02 Septembre 2019. , dans Pays de l'Est, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Roman, La Contre Allée

Le Nuage et la valse, avril 2019, trad. tchèque Hélène Belletto-Sussel, 573 pages, 25 € . Ecrivain(s): Ferdinand Peroutka Edition: La Contre Allée

 

Ce fut tout d’abord une pièce de théâtre jouée en 1947-1948, pièce écrite par Ferdinand Peroutka qui fut interné à Buchenwald par les nazis en raison de ses convictions démocratiques ; ce n’est qu’en 1976, alors exilé aux USA en raison du Coup de Prague, qu’il publie son texte sous la forme d’un roman.

La structure du texte donne une vision kaléidoscopique du nazisme, de la guerre jusqu’à la libération et les excès et autres « erreurs » commises alors. Ce n’est pas, en effet, une structure romanesque classique obéissant à une linéarité « confortable », mais plutôt un rhizome de personnages dont les trajectoires peuvent se recouper. Il y a malgré tout un fil conducteur cristallisé par une méprise liée à une homonymie. Un employé de banque est interné par erreur par les nazis, et ce personnage sera confronté à d’autres individus, des internés comme lui mais aussi des gardiens nazis.

Un chien sur la route, Pavel Vilikovsky (par Sylvie Ferrando)

Ecrit par Sylvie Ferrando , le Mardi, 09 Juillet 2019. , dans Pays de l'Est, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Roman, Phébus

Un chien sur la route, mars 2019, trad. slovaque Peter Brabenec, 224 pages, 19 € . Ecrivain(s): Pavel Vilikovsky Edition: Phébus

 

Remettre à l’honneur la Slovaquie, sa capitale Bratislava et sa littérature, Livre Paris l’a fait en mars 2019 avec ce roman de Pavel Vilikovsky, à la fois récit d’un exil et de la reconnaissance de son pays et de son identité de Slovaque. En voyage de promotion culturelle de la littérature slovaque après la chute des régimes communistes, dans des pays voisins comme l’Autriche, la Pologne, la Hongrie, l’Allemagne, le narrateur, écrivain slovaque retraité, y cherche des points de convergence et des points de divergence d’avec son peuple. Il remarque que les Slovaques ont tendance à transgresser les règles dans leur pays, mais s’adaptent aisément à la vie en pays étranger. L’Europe demeure un espoir pour lui.

S’il y a un peu du Voyage sentimental à travers la France et l’Italie (1768), écrit et publié à la fin de la vie de l’écrivain irlandais Laurence Sterne, c’est Thomas Bernhard que Vilikovsky prend pour modèle, auteur autrichien internationalement célébré, qui dénigre son pays. Le narrateur est accompagné de Gabo et Dusan, poètes et écrivains slovaques avec lesquels il entretient des conversations littéraires et se livre joyeusement à la boisson.