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Classiques Garnier

 

Les Éditions Classiques Garnier sont une maison d'édition française fondée en 1833 sous le nom de Garnier Frères, est un éditeur d'œuvres de référence en littérature et sciences humaines.

Jephtias Tragœdia, La Fille de Jephté, tragédie, Jacob Balde (par Gilles Banderier)

Ecrit par Gilles Banderier , le Lundi, 23 Septembre 2024. , dans Classiques Garnier, Les Chroniques, La Une CED, Langue allemande, Théâtre

Jephtias Tragœdia, La Fille de Jephté, tragédie, Jacob Balde, Classiques Garnier, 2020, trad. Dominique Millet-Gérard, 668 pages, 58 €

 

En matière littéraire comme en la plupart des domaines artistiques, la postérité ne se trompe pas aussi souvent qu’on le prétend, et ses jugements sont en général fondés, même s’ils peuvent être parfois sujets à révision ou à appel, dans un sens comme dans l’autre, au fil du temps (l’exemple-type étant celui de Thomas Corneille, jadis plus lu que son frère). La probabilité de découvrir sous la poussière des bibliothèques et des librairies d’anciens un écrivain de premier ordre qui aurait échappé à toutes les investigations des historiens de la littérature n’est pas aussi élevée que le croient en général les étudiants en doctorat.

Cela étant, il arrive que de grands auteurs soient injustement négligés, pour des raisons externes à leur œuvre proprement dite et à sa qualité, ainsi la langue dans laquelle ils l’ont composée. Durant une très longue période, pratiquement jusqu’au XIXe siècle, tous les écrivains européens furent bilingues, capables d’employer une langue vernaculaire (celle de leur pays) et une langue véhiculaire (le latin).

Chronique de la Grande Guerre, Maurice Barrès (par Gilles Banderier)

Ecrit par Gilles Banderier , le Lundi, 08 Juillet 2024. , dans Classiques Garnier, Les Livres, Critiques, Essais, La Une Livres, Histoire

Chronique de la Grande Guerre, Maurice Barrès, Classiques Garnier, septembre 2023, édition : Denis Pernot, Vital Rambaud, 1040 pages, 48 € Edition: Classiques Garnier

 

Avant de présenter ce fort volume, il faut commencer par tresser une couronne de laurier aux deux éditeurs scientifiques, Denis Pernot et Vital Rambaud, qui ont accompli un travail admirable, un travail de Bénédictin, pour sélectionner, republier et surtout annoter ces textes de Barrès. L’apparat critique est minutieux et les notes, abondantes, identifient les références les plus obscures et les allusions aux personnages les plus oubliés.

Pendant les quatre années que dura la Première Guerre mondiale, Barrès, qui n’était pas un jeune homme (il avait 52 ans en 1914), donna chaque jour ou presque un article à L’Écho de Paris. Ce n’était même pas le vieux conseil de Pline l’Ancien, nulla dies sine linea, mais bien davantage. Cet ensemble impressionnant, ne serait-ce qu’au point de vue quantitatif, fut réuni après-guerre en quatorze volumes (1920-1924, réédition en 1931-1939), qu’il faut aller chercher chez les libraires d’ancien. Malraux admirait le travail fourni par son prédécesseur :

Le Plaisir de lire des romans, Daniel Mortier (par Gilles Banderier)

Ecrit par Gilles Banderier , le Mercredi, 29 Mai 2024. , dans Classiques Garnier, Les Livres, Critiques, Essais, La Une Livres

Le Plaisir de lire des romans, Daniel Mortier, Classiques Garnier, 2023, 258 pages, 32 € Edition: Classiques Garnier

 

À bien des égards, le roman est un genre littéraire paradoxal, ne serait-ce que dans la mesure où, apparu tardivement et plus ou moins méprisé pendant des siècles par rapport aux « grands » genres, aux genres nobles qu’étaient la tragédie et l’épopée, il a pris une revanche aussi éclatante qu’écrasante : à peu près tout ce qui se publie depuis un moment déjà sous l’appellation de « littérature » (en dehors, donc, des documentaires, des essais et des ouvrages pratiques) appartient au genre romanesque ; la poésie et le théâtre se trouvant, en dehors des classiques, réduits à la portion congrue. Non seulement le roman a remplacé les autres genres littéraires, à la manière d’une espèce invasive – animale ou végétale – qui supplanterait des espèces de longue date acclimatées, mais encore, comme le remarquait Bakhtine, le roman a annexé et phagocyté les autres genres littéraires. La Mort de Virgile en est un exemple magnifique, même si cette œuvre symphonique ne ressemble que de loin à ce qu’on appelle en général un roman.

Un Shtetl, suivi de Père et fils, Yitskhok Meyer Weissenberg (par Gilles Banderier)

Ecrit par Gilles Banderier , le Mardi, 30 Avril 2024. , dans Classiques Garnier, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Pays de l'Est, Roman

Un Shtetl, suivi de Père et fils, Yitskhok Meyer Weissenberg, Classiques Garnier, 2023, trad. yiddish, Jean Spector, 132 pages, 22 € Edition: Classiques Garnier

Les œuvres d’Yitskhok Meyer Weissenberg (1881-1938) appartiennent à une Atlantide doublement engloutie : celle de la littérature d’expression yiddish, d’une part, cette langue jadis parlée de l’Alsace à la Russie et qui, sans en avoir le prestige politique, religieux et intellectuel, connut seule une extension géographique comparable à celle du latin. Certes, il demeure en Israël et aux États-Unis des locuteurs de yiddish et même des écrivains qui publient dans cette langue. Mais – et c’est le second point – le yiddish israélien ou américain est fondamentalement une langue déracinée, car le terreau de cet idiome furent les shtetleh, ces bourgades juives d’Europe orientale, qui n’étaient pas à proprement parler des ghettos, mais des villages où la population était majoritairement juive, bien qu’il ne fût pas expressément interdit à un catholique de s’y établir – et cette cohabitation, qui donna lieu parfois à des scènes touchantes, fut incarnée par le personnage du shabbes goy, ce chrétien (qui finissait par connaître, sinon la théologie sous-jacente, du moins les usages du judaïsme, la praxis, aussi bien que les Juifs eux-mêmes) rémunéré par la communauté juive pour accomplir les besognes prohibées durant les fêtes religieuses, à commencer par le shabbat

Croire aux vampires au Siècle des Lumières, Entre savoir et fiction, Stella Louis (par Gilles Banderier)

Ecrit par Gilles Banderier , le Lundi, 12 Décembre 2022. , dans Classiques Garnier, Les Livres, Critiques, Essais, La Une Livres

Croire aux vampires au Siècle des Lumières, Entre savoir et fiction, Stella Louis, Classiques Garnier, mai 2022, 268 pages, 32 € Edition: Classiques Garnier

 

Montaigne, le sage, le pondéré et l’érudit Montaigne, fut le témoin effaré de la chasse aux sorcières (un phénomène qui, contrairement aux idées reçues, ne remonte pas au Moyen Âge), une forme tragique d’hystérie collective qui apparut et s’éteignit d’elle-même, sans que l’on sache pourquoi. Les Essais furent contemporains de la Démonomanie des sorciers de Jean Bodin et de la Démonolâtrie de Nicolas Remy, un juge lorrain dont on aimerait dire qu’il fut à moitié fou, car cela lui fournirait au moins une circonstance atténuante. Au Siècle dit des « Lumières », Voltaire et Rousseau furent les témoins consternés d’une autre forme de psychose collective qui, cette fois, demeura limitée à l’Europe de l’Est et n’affecta pas la France : la croyance selon laquelle des morts pouvaient sortir de leurs tombes pour revenir tourmenter les vivants. Il ne s’agissait pas, si l’on ose s’exprimer ainsi, de banales histoires de fantômes ou de spectres apparaissant aux heures indues, mais de revenants dotés d’un corps matériel, quoique dégradé par leur séjour sous terre.