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Le festin des hyènes, Fabienne Juhel (par Martine L. Petauton)

Ecrit par Martine L. Petauton , le Mardi, 16 Novembre 2021. , dans La Une CED, Les Chroniques, Les Livres

Le festin des hyènes, Fabienne Juhel, Le Rouergue, Coll. La Brune, octobre 2021, 208 pages, 18,80 €


On connaît Fabienne Juhel, et les fers au feu de ses beaux livres : servis par une belle écriture parfaitement maîtrisée, l’art de raconter une histoire, des envolées souvent frisant un rien le fantastique, des personnages que le lecteur n’a garde d’oublier, des tableaux historiques bien calés dans un décor précis comme au cinéma. Et puis, la « musique Juhel », à mi-chemin entre réalisme et lyrisme de bon aloi, parfumé au meilleur du poétique…

Dans ce dernier livre – pas le moins abouti – la caméra se transporte en Afrique noire, époque actuelle, l’Est, au bord d’un lac du grand rift, mais on devrait pouvoir trouver du similaire dans l’Ouest sub-saharien.

On savait hélas, la persistance du « vagin denté » de sinistre mémoire, et de l’ablation du clitoris des petites filles ; nous voilà dans le « festin des hyènes » ; hyènes, nom donné à ces jeunes ou moins jeunes hommes dont la « tâche » si ce n’est le devoir ancestral, est de déflorer les vierges, pour les préparer à leur vie future de femme et de mère – le « kusasa fumbi »… C’est donc un livre qu’on lira dans le silence du citoyen qui est à l’évidence convoqué d’un bout à l’autre du livre, en creux, toujours.

Marchands de mort subite, Max Izambard (par Martine L. Petauton)

Ecrit par Martine L. Petauton , le Mardi, 26 Octobre 2021. , dans La Une CED, Les Chroniques, Les Livres, Polars

Marchands de mort subite, Max Izambard, Le Rouergue noir, octobre 2021, 350 pages, 22 €


L’Afrique de l’Est, celle des grands lacs. Carrefour entre le Rwanda d’après le génocide, les grandes savanes à fauves et à touristes, l’est du Congo et ses – très – abondantes ressources en or. Le récit a pour épicentre (ce mot du vocabulaire séismique aurait d’ailleurs pu être un sous-titre au livre) l’Ouganda, et le nombre copieux de pages ne suffit probablement pas pour dire les épaisseurs grouillantes – type sol de forêt dense – de menaces, sang, corruption, et maux – à peu près tous – qui grondent sous la touffeur équatoriale de ce petit pays ignoré de beaucoup d’entre nous. L’auteur, dont c’est le premier roman, sait de quoi, de qui il parle, étant lui-même « ancien baroudeur » d’Afrique. On le verrait bien journaliste d’investigation à l’occasion, et Pierre, le héros du roman, est probablement plus que son cousin…

Les chemins de traverse d’Elizabeth George (par Martine L. Petauton)

Ecrit par Martine L. Petauton , le Jeudi, 07 Octobre 2021. , dans La Une CED, Les Chroniques


Certains la nomment « la reine George », cette américaine qui n’écrit que sur l’Angleterre, et abat, bon an mal an, son compte de pas loin de 20 magistraux romans policiers à ce jour ; chacun meilleur que l’autre dans une parfaite justesse digne de la bonification d’un Earl Grey de légende, et Dieu sait qu’on en boit en lisant, sans oublier les bières…

Elle a, dans une autre vie, avant l’écriture, beaucoup fait lire à des étudiants le miel du policier anglais. Agatha, tellement évident – elle est là à chaque page, comme en creux d’une autre époque, mais aussi Conan Doyle et Peter James. Les grands classiques anglais aussi, cités au détour des pages, avec l’exacte référence, car la dame écrit, dit-elle, des policiers qui sont aussi des romans, et tant qu’à faire, revendiquent une belle et rigoureuse écriture.

Conversations dans un jardin, Bernard Pignero (par Martine L. Petauton)

Ecrit par Martine L. Petauton , le Mardi, 29 Juin 2021. , dans La Une CED, Les Chroniques

Conversations dans un jardin, Bernard Pignero, éditions Encretoile (Nouvelles), mai 2021


Celui d’entre nous qui un jour se lance dans l’écriture ne se dit-il pas – fulgurante idée généralement abandonnée dès que commence vraiment l’aventure – que, ma foi, des nouvelles – petites histoires, bonsaï des grandes – ce serait peut-être plus facile que le format roman, si classiquement casse-gueule…

Ainsi la nouvelle serait facile ? Ou tout son contraire ? Parce qu’elle parvient à faire tenir dans un dé à coudre ce qui fabrique la « grande » histoire, lieux, temps du récit, acteurs et leur complexe théâtre, l’infinie myriade des sentiments de la comédie humaine entière, les couleurs, odeurs et on en passe. Tout, dans cet infiniment petit, pour déclencher le miracle chez le lecteur se passionnant pour si peu de lignes agencées en des pages tenant dans le creux de la main ; petite main qui plus est. De l’anticipation, ou pas loin, frisant pour nous, profanes, presque le fantastique, l’univers des nanosciences…

Là où tout se tait, Jean Hatzfeld (par Martine L. Petauton)

Ecrit par Martine L. Petauton , le Mercredi, 16 Juin 2021. , dans La Une Livres, Les Livres, Critiques, Essais, Gallimard

Là où tout se tait, janvier 2021, 224 pages, 19 € . Ecrivain(s): Jean Hatzfeld


De tous temps, nos mémoires se sont nourries des chroniqueurs, inlassablement minutieux, accumulant et vérifiant, taiseux souvent, un rien obsédés par l’objet de leur collecte. Ainsi, des Croisades ou de la Grande Peste, de toutes les guerres ou des colonisations à l’infini… Ainsi, de Hatzfeld et de sa geste du Rwanda-année 1994, celle d’un des pires génocides de l’histoire des hommes : « jamais population civile n’avait été tuée plus efficacement de la main de l’homme », entendons « artisanalement »… Plusieurs livres, devenus viatiques indispensables. Formidable tableau en plusieurs morceaux, comme triptyques en églises médiévales, disant tout, montrant l’important et les plus infinis détails, donnant, et avec quel superbe respect et amour, la parole qu’il faut à ceux qui ont vécu les 30 jours du Rwanda. Les massacres, vus face massacrés « dans le nu de la vie », puis massacreurs « une saison de machettes », la parole des enfants « un papa de sang », celle de cet Englebert des collines, synthèse à lui seul de ce temps « des tueries ».