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Articles taggés avec: Epsztein Pierrette

Le Jour d’avant, Sorj Chalandon

Ecrit par Pierrette Epsztein , le Jeudi, 17 Août 2017. , dans La Une Livres, La rentrée littéraire, Les Livres, Critiques, Roman, Grasset

Le Jour d’avant, août 2017, 336 pages, 20,90 € . Ecrivain(s): Sorj Chalandon Edition: Grasset

 

Après quatre jours d’arrêt de la mine, à la reprise de l’activité, le 27 décembre 1974, à 6h30 du matin, un bruit sourd retentit au fond d’une galerie de la fosse 3 dite Saint-Amé du siège 19 du groupe Lens-Liévin à Liévin dans le Pas-de-Calais. C’est un quartier de Six sillons qui a été touché, situé à 50 mètres en aval du niveau -70, dans le secteur de la taille 31. Le carreau de la mine se trouve bientôt envahi par les proches en quête d’informations. Le bilan est très lourd : 42 morts. Une enquête sera ouverte. Les syndicats CGT et FO se porteront partie civile. Assez rapidement, des faits de négligence seront révélés. Le coup de grisou sera confirmé par des experts. La bataille juridique durera jusqu’en 1981 (Extrait emprunté au site de l’INA intitulé Mémoire de mines qui relate la catastrophe). Le dernier roman de Sorj Chalandon, Le Jour d’avant, est dédié à la mémoire de ces Quarante-deux mineurs.

L’auteur s’empare de ce fait divers pour construire une fiction.

Ce n’est pas le premier roman où Sorj Chalandon trouve le chemin d’une histoire singulière pour rendre compte d’un évènement historique.

La faute des autres, Emmanuelle Friedmann

Ecrit par Pierrette Epsztein , le Vendredi, 09 Juin 2017. , dans La Une Livres, Les Livres, Critiques, Roman, Calmann-Lévy

La faute des autres, avril 2017, 288 pages, 18,90 € . Ecrivain(s): Emmanuelle Friedmann Edition: Calmann-Lévy

 

« Les bombardements incessants empêchaient les soldats de s’entendre… les risques… les explosions… la tranchée… Les corps déchiquetés… les épidémies ». Ainsi démarrent les premières pages du nouveau roman d’Emmanuelle Friedmann, La faute des autres. Tout de suite, nous sommes plongés dans l’enfer de la première guerre mondiale. Tout n’est plus que ruine et désolation. Le chaos s’installe. Dans l’horreur, des amitiés, des amours insolites, inhabituels se nouent. On s’épaule, on est soudé face au danger. Face à la mort qui rôde en permanence, les sentiments s’exacerbent. Mais cela perdure-t-il quand revient une certaine normalité ?

Pouvons-nous sortir indemne d’un carnage qui a touché tout un pays ? Le récit nous entraîne dans une course haletante qui couvre vingt-cinq ans de notre histoire nationale. Dans cette époque charnière, le roman déroule l’odyssée de vies qui se croisent, se perdent et se retrouvent avec des tissages heureux et des accrocs inévitables. Parfois le corps lâche, il vacille quand les souvenirs remontent avec trop de virulence et il devient incontrôlable : « Je ne peux plus voir de sang… Il se mit à trembler… ». Charles finira par renoncer à sa carrière de chirurgien, choisie par vocation, pour devenir médecin généraliste à Cabourg.

Je dansais, Carole Zalberg

Ecrit par Pierrette Epsztein , le Vendredi, 12 Mai 2017. , dans La Une Livres, Les Livres, Critiques, Roman, Grasset

Je dansais, février 2017, 162 pages, 16 € . Ecrivain(s): Carole Zalberg Edition: Grasset

 

Au XVIème siècle, dans le volume III, chapitre 5 de ses Essais, Montaigne écrivait déjà : « Les femmes n’ont pas tort du tout quand elles refusent les règles de vie qui sont introduites au monde, d’autant que ce sont les hommes qui les ont faites sans elles ». Aujourd’hui, cinq siècles plus tard, ce sont les femmes éduquées qui prennent la plume pour rompre le silence qui entoure la condition des femmes et la recherche d’une réelle émancipation.

Dans son dernier roman, Je dansais, empli de bruit et de fureur où le morbide et la noirceur dominent, Carole Zalberg tente, à travers un récit singulier, de décrypter les ressorts de la violence infligée à des jeunes filles sans défense dans notre pays prétendument « civilisé ». Mais son exploration ne se limite pas à un cas particulier. Elle étend et généralise sa dénonciation à toute la condition féminine en général.

Au départ, l’intrigue s’appuie sur la réalité, mais l’auteur va bien au-delà. À partir d’un fait divers qui pourrait se tailler une part belle sur certaines chaînes de télévision ou dans certains journaux à sensations, Carole Zalberg, par la grâce de l’écriture, confère à son récit une ampleur exemplaire.

Hommage à Hubert Lucot, par Pierrette Epsztein

Ecrit par Pierrette Epsztein , le Samedi, 08 Avril 2017. , dans La Une CED, Les Chroniques

 

Il a fallu que le temps fasse son ouvrage pour que je puisse rendre hommage à Hubert Lucot. En effet, comment rendre compte, avec une certaine distance, de cette rencontre qui a été marquée du sceau de la connivence mais m’a aussi poussée à me poser des questions sur ce que fut cette relation si étonnante que je me garderai bien de qualifier ?

J’ai entendu Hubert Lucot pour la première fois à Cerisy lors du colloque sur l’autofiction où, le vendredi 29 juillet 2008, il fit une communication intitulée Je est un ogre. Sur l’estrade, un homme très grand, une carrure de rugbyman. Il était très impressionnant. Il a parlé de son écriture. Dans ses récits, il souhaitait mettre en valeur des « éclats mosaïques de la mémoire », « des surgissements fugaces », avec une obsession réaliste. Il n’est pas indifférent à la marche du monde. Il parle de sa « colère politique ». Il précise bien que ses textes n’ont rien de spontané. C’est un maniaque du mot juste. Il retravaille chaque phrase au niveau des couleurs, des silences, de la musique. Tout son travail de réécriture consiste « à retirer ». En fait, il est « un dévorateur de vie ». Il aime la flânerie, la bonne nourriture et tous les plaisirs de l’existence.

Vie de ma voisine, Geneviève Brisac

Ecrit par Pierrette Epsztein , le Mercredi, 08 Mars 2017. , dans La Une Livres, Les Livres, Critiques, Livres décortiqués, Roman, Grasset

Vie de ma voisine, janvier 2017, 180 pages, 14,50 € . Ecrivain(s): Geneviève Brisac Edition: Grasset

 

Toute notre vie, nous mettons nos pieds dans ceux de l’Histoire mais, sur le moment, nous ne le réalisons pas. Le jour où nous ouvrons le dernier livre de Geneviève Brisac, Vie de ma voisine, nous sommes saisis par un air de printemps. Une cour, un cerisier, un déménagement (c’est toujours un moment d’inquiétude). Mais qui va être le plus transporté ? la narratrice qui avoue « Je peine à m’enraciner », ou le lecteur qui ne s’attend pas à un tel arrachement à son quotidien, englué qu’il est dans ses habitudes ? Car l’auteur, qui se fait narratrice, va nous obliger, nous aussi, à déménager. En effet, comme dans La Ronde d’Arthur Schnitzler, de relais en relais, de main en main, de cœur en cœur, de nom en nom, nous partons en voyage. La narratrice va nous emporter, à notre corps défendant, dans le temps et dans l’espace pour un sacré périple. A travers l’histoire d’une famille, nous allons retrouver un siècle d’histoire avec ses bonheurs et ses souffrances, ses joies et ses tragédies.