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Articles taggés avec: Compère-Demarcy Murielle

Jésus kill Juliette Éloïse, Jacques Cauda (par Murielle Compère-Demarcy)

Ecrit par MCDEM (Murielle Compère-Demarcy) , le Mardi, 31 Août 2021. , dans La Une Livres, Les Livres, Critiques, Poésie

Jésus kill Juliette Éloïse, éditions Douro, Coll. La Diagonale de l’écrivain, juillet 2021, 84 pages, 15 € . Ecrivain(s): Jacques Cauda


Que le lecteur ne s’y méprenne pas, Cauda n’aurait pas commis (au regard de la convenance, ici langagière) une « faute » de plus sur son tableau de peintrécrivain, en se rendant coupable d’une faute de conjugaison dans le titre de son nouvel opus là où la langue anglaise nous oblige à mettre un -s final au verbe conjugué à la troisième personne du singulier. Mieux que cela, voire savoureux, exquis : c’est bien délibérément que Cauda s’est empressé de plonger sa main dans l’exécution de cette faute, avec une élégance d’esprit espiègle et une préméditation digne des grands maîtres. L’absence du -s final dans le verbe du titre, en effet, s’exprime par son absence pour moult raisons aussi perspicaces que malicieuses : d’abord la volonté de l’auteur de jouer avec le verbe anglais kil qui en argot désigne le litre (un kil de rouge puisque l’opus est le journal d’un alcoolique) ; puis la volonté que l’on entende par homophonie Jésus crier (Jésus kill/Jésus crie) ; enfin Cauda souhaitait qu’il y ait une faute (en anglais) puisque Juliette est « prof d’anglais ».

Quand nous regardions depuis notre terre, Jean-Louis Rambour, Jérôme Delépine (par Murielle Compère-Demarcy)

Ecrit par MCDEM (Murielle Compère-Demarcy) , le Mercredi, 25 Août 2021. , dans La Une Livres, Les Livres, Critiques, Poésie

Quand nous regardions depuis notre terre, Jean-Louis Rambour, Jérôme Delépine, éditions L’herbe qui tremble, juin 2021, 38 pages, 16 €

Nous pourrions trébucher sur le titre : où nous emmène le poète lorsqu’il écrit Quand nous regardions depuis notre terre – avec en toile de fond, pour la première de couverture, Lumière du jour du monde (2021), du peintre Jérôme Delépine dont l’œuvre accompagne les 31 poèmes de l’opus ? Temps révolu, étayé par l’emploi de l’imparfait de l’indicatif introduit par une conjonction de coordination indiquant un point de repère temporel, « quand » ? Nous sommes bien ici dans le réel, non dans un monde conditionnel. Le poète Jean-Louis Rambour n’a pas intitulé son recueil Si nous regardions depuis notre terre, mais bel et bien Quand nous regardions depuis notre terre. N’y trouvons pas de nostalgie (même si quelquefois restent « (…) des traces de doigts / de cheveux, regrets, noirceurs »), n’y cherchons pas un paradis perdu, Rambour est, ainsi que l’avaient titré les Cahiers d’arts et de littératures dont un numéro (n°7) lui était consacré aux éditions du Petit Véhicule, un « poète en temps réel ».

Sans transition, De Roland Barthes à Pasolini, Cyril Huot (par Murielle Compère-Demarcy)

Ecrit par MCDEM (Murielle Compère-Demarcy) , le Jeudi, 06 Mai 2021. , dans La Une Livres, Les Livres, Critiques, Essais, Tinbad

Sans transition, De Roland Barthes à Pasolini, Cyril Huot, avril 2021, 154 pages, 18 € Edition: Tinbad


« Sans transition » : n’est-ce pas la posture même de Roland Barthes lorsqu’à la fin de sa vie il laisse s’introduire dans le processus de son écriture un principe pourtant contraire à la loi dans le cadre de laquelle il avait jusque-là voulu la tenir, à savoir aspirer à y voir au final s’intégrer quelques éléments autobiographiques jugés de prime abord superficiels voire fallacieux, éloignés de l’exigence formaliste du phrasé littéraire, plus opaques qu’éclaireurs d’un parcours ? Quelle place accorder aux « biographèmes » (« néologisme forgé par Barthes », précise l’auteur Cyril Huot) dans l’entreprise de l’écriture, ces fragments biographiques épars sur le chemin d’une vie ? Et n’est-ce pas contradictoire de la part de celui qui déclara « la mort de l’auteur » que de le voir rédiger un Roland Barthes par Roland Barthes ; de le surprendre, dans la dernière ligne droite de sa vie, désireux de voir s’introduire dans la mémoire qu’il laissera de lui et de son œuvre quelques fragments de son histoire personnelle ?

33 poèmes en forme de nouvelles (ou l’inverse), Jean-Louis Rambour (par Murielle Compère-Demarcy)

Ecrit par MCDEM (Murielle Compère-Demarcy) , le Vendredi, 19 Mars 2021. , dans La Une CED, Les Chroniques, Les Livres, Poésie

33 poèmes en forme de nouvelles (ou l’inverse), Jean-Louis Rambour, Éditions Les Lieux-Dits, Coll. Cahiers du Loup bleu, 2019, 39 pages, 7 €

Deux évidences s’imposent pour qui revient toujours à l’œuvre de Jean-Louis Rambour (car il s’agit bien d’une « œuvre ») : quelque chose du fleuve coule dans cette poésie comme dans celle de Jacques Darras, mais différemment. Sans doute, déjà, parce que le fleuve y coule sans arrêt dans sa fluidité et force dynamique, dans une transformation de lui-même ajoutée à celles qu’il provoque, porte, emporte. L’écriture protéiforme de Rambour atteste ce dynamisme des fluides à l’œuvre, qui roule dans le lit du Langage pour y déposer des alluvions typiques du cours de son fleuve, qui emporte dans son débit le charroi de nos émotions et interprétations. L’infini où chaque texte ou livre du poète se jette nous fait à chaque fois les navigateurs livrés aux métamorphoses de ses eaux poétiques. Nous n’embarquons pas sur le fleuve de la poésie de Jean-Louis Rambour, c’est bien son cours/son flux sans cesse renouvelé qui nous prend dans son voyage. Deuxième évidence marquant l’œuvre du poète : sa poésie révèle la profondeur de la vie dans son miroir, là où les reflets disent au-delà des sens qu’ils émettent. Le premier texte des 33 poèmes en forme de nouvelles (ou l’inverse) publiés dans les Cahiers du Loup bleu aux éditions Lieux-Dits nous ramène d’entrée à cette évidence :

L’arche inuit, Fragments de l’arche-inuit, Denis Ferdinande (par Murielle Compère-Demarcy)

Ecrit par MCDEM (Murielle Compère-Demarcy) , le Mercredi, 24 Février 2021. , dans La Une Livres, Les Livres, Critiques, Poésie

L’arche inuit, Fragments de l’archi-nuit, Denis Ferdinande, éd. Atelier de l’agneau, Coll. Architextes, novembre 2020, 146 pages, 18 €

 

« Et si tout revenait à ne plus savoir écrire ? », interroge le « diariste littéraire » d’entrée, dans l’« Avant-dire », sous « l’arche » du Langage dont, il prévient, la syntaxe (liée à la sémantique) est ici l’objet d’investigation primordial (« de la syntaxe avant toute chose », écrit Denis Ferdinande, où Paul Verlaine écrivit « de la musique avant toute chose » dans son Art poétique). L’auteur évoque bien la possibilité de « ne plus savoir écrire », et non de ne plus vouloir écrire. Nous touchons là à l’articulation de l’être et du monde, dans l’Histoire qui s’écrit, sur le fil linéaire déroulant le parchemin-palimpseste expérimental du Je alias « Personne ». La nuit s’ouvre arche éperdue, porte battante sur le seuil du jour, et « l’écrivant » ne peut que s’autoriser la forme linéaire du journal sauf à rejoindre l’indicible vacuité de ce qui s’écarterait de son expérience même scripturale. L’Écrire tourne ici roue libre sur l’axe d’une pensée itinérante, cadre roulant construisant sa voie tel ce E dessiné sur le frontispice de ces « Fragments de l’archi-nuit » (métal tenant lieu d’armure de la lettre) : AVEC ROTULE CENTRALE EN ACIER par quoi la lettre pouvait être mue, y ajoutant l’accent, XIIIe siècle).