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Articles taggés avec: Chauché Philippe

Tribus, Nouvelles, Shmuel T. Meyer (par Philippe Chauché)

Ecrit par Philippe Chauché , le Jeudi, 22 Août 2024. , dans La Une Livres, Les Livres, Critiques, Israël, Nouvelles, Gallimard

Tribus, Nouvelles, Shmuel T. Meyer, Gallimard, Coll. Blanche, avril 2024, 176 pages, 19 € Edition: Gallimard

 

« Jérusalem se réveillait de sa narcolepsie sabbatique, la bouche pâteuse, l’haleine chargée, avec ce vague à l’âme qui enfle à l’approche d’une semaine nouvelle, du labeur, de la routine. Ce vague à l’âme qui envahit les collines, les oliveraies, les rues désertes du centre-ville » (Tribus, Les héritiers).

Israël est au cœur de ce livre de nouvelles, Israël et les mille pierres qui la composent, des pierres qui parfois s’entrechoquent et les étincelles qui en surgissent nourrissent le regard affuté de l’écrivain, et évidemment son imaginaire. Ils sont libéraux, ultraorthodoxes, ils vivent dans des kibboutz, aux portes de Jérusalem, ne pensent qu’à prier et à dénigrer, rêvent de la naissance de leur nation, qui pour certains à leur âge, ils sont sionistes, et n’aiment guère les messianiques, l’inverse saute aussi aux yeux. Ces Tribus, ces nouvelles tribus d’Israël, sont un paysage humain dont la géographie dessine un État qui, dans sa constitution, n’a pas cent ans, mais qui dans l’Histoire de son et de ses tribus a plus de trois mille ans.

Le Chant des livres, Gérard Guégan (par Philippe Chauché)

Ecrit par Philippe Chauché , le Jeudi, 27 Juin 2024. , dans La Une Livres, Les Livres, Critiques, Récits, Grasset

Le Chant des livres, Gérard Guégan, Grasset, mai 2024, 100 pages, 16 € . Ecrivain(s): Gérard Guégan Edition: Grasset

 

« Le livre que je n’aurais pas dû lire, et que je venais de déposer grand ouvert sur mon visage pour me protéger du soleil, n’était autre que La Métamorphose. Je l’avais emprunté à une khâgneuse du lycée Thiers qui se prétendait la petite-nièce d’Arthaud, une contrevérité dont elle savait tirer parti quand elle voulait séduire les indifférents au nombre desquels elle m’avait compté ».

En lisant Le Chant des livres, nous pourrions tout d’abord écrire que les plus beaux chants sont ceux des livres, lus et relus, achetés, empruntés ou dérobés, ils donnent au lecteur cette liberté de vivre, cette liberté d’être, que rien d’autre n’offre, et si vous combinez cette lecture de livres admirés à des rencontres d’écrivains, à des voyages en terres d’écriture, vous tenez dans vos bras un heureux petit livre, lumineux et brillant, sans la moindre graisse de bavardage littéraire. Gérard Guégan nous raconte quelques instants de sa vie, de sa jeunesse marseillaise, avec peu de livres à déguster, de sa rencontre avec Jean Giono à Manosque, que les amis communistes de son père n’aimaient guère, aux aventures éditoriales du Sagittaire.

Le Vicomte de Bragelonne, Alexandre Dumas en La Pléiade (par Philippe Chauché)

Ecrit par Philippe Chauché , le Mardi, 11 Juin 2024. , dans La Une Livres, En Vitrine, La Pléiade Gallimard, Cette semaine, Les Livres, Critiques, Roman

Le Vicomte de Bragelonne, Alexandre Dumas, Gallimard, Bibliothèque de La Pléiade n°669, Edition Jean-Yves Tadié, novembre 2023, 2112 pages, 69 € . Ecrivain(s): Alexandre Dumas Edition: La Pléiade Gallimard

 

« Alexandre Dumas est un romancier du temps individuel aussi bien que du temps historique. À mesure qu’il avance en âge, il peint le vieillissement de ses personnages, “vingt ans après”, “dix ans plus tard”, les titres et sous-titres le disent. Vieillir, c’est avoir un passé. Peu à peu, le romancier de l’avenir et du présent devient celui du passé. Et de la mémoire » (Jean-Yves Tadié, Préface).

« Quant au cardinal, il se contenta d’effleurer de ses lèvres flétries un bouillon servi dans une tasse d’or. Le ministre tout puissant qui avait pris à la reine mère sa régence, au roi sa royauté, n’avait pu prendre à la nature un bon estomac ».

« Sur le canal aux eaux d’un vert opaque, bordé de margelles de marbre, où le temps avait déjà semé ses taches noires et des touffes d’herbes moussues, glissait majestueusement une longue barque plate, pavoisée aux armes d’Angleterre, surmontée d’un dais et tapissée de longues étoffes damassées qui traînaient leurs franges dans l’eau ».

Lettres à Juan Bautista (Vingt ans après), Yves Charnet (par Philippe Chauché)

Ecrit par Philippe Chauché , le Jeudi, 23 Mai 2024. , dans La Une Livres, Les Livres, Critiques, Récits, Au Diable Vauvert

Lettres à Juan Bautista (Vingt ans après), Yves Charnet, éd. Au Diable Vauvert, mai 2024, 400 pages, 22 € Edition: Au Diable Vauvert

 

« Ce sont des anges de passage. Des anges aux visages graves. Vous aurez peut-être la chance de les entrevoir depuis les gradins des arènes. Ou dans certains tableaux de Modigliani. Fermez les yeux. Voilà. Croyez-moi sur parole. Une cape, des ailes, une épée ».

« L’art magique et prodigieux de toréer a aussi sa musique propre (intérieure et extérieure), et c’est ce qu’il a de mieux. Musique pour les yeux de l’âme et pour l’oreille du cœur, qui est la troisième dont nous parlait Nietzsche, celle qui écoute les harmonies supérieures », José Bergamín (1).

La corrida et les toreros fascinent les écrivains depuis bien longtemps. La liste est longue et passionnante des auteurs qui à leur façon ont touché la corne d’un toro bravo ou croisé le regard d’un torero : Hemingway évidemment, mais aussi Georges Bataille, Yvan Audouard, Jean-Marie Magnan, Jean Cau, Jacques Durand, ou encore Philippe Sollers.

Lui seul, Patrick Martinez (par Philippe Chauché)

Ecrit par Philippe Chauché , le Mardi, 14 Mai 2024. , dans La Une Livres, Les Livres, Critiques, Alma Editeur, Roman

Lui seul, Patrick Martinez, Alma éditeur, février 2024, 144 pages, 16 € Edition: Alma Editeur

 

« D’où viennent toutes ces ombres étranges au plafond ? Certaines ont l’air, de par leur fixité, leur noirceur insondable, d’être un peu comme armées afin de résister à la levée du jour. D’autres, au contraire, fragiles, instables et diluées, partent à ce point en lambeaux dès qu’elles se déplacent qu’on pourrait aisément douter de leur existence ».

Lorsque l’on ouvre un roman de Patrick Martinez, il convient d’avoir en mémoire qu’il est musicien, un temps pianiste de jazz, et pour ce dernier roman, savoir que durant une vingtaine d’années, il s’occupa d’enfants souffrant de troubles psychiques. Patrick Martinez fut donc pianiste, et sa phrase, son style, son toucher : sa manière de saisir la matière romanesque s’en ressent. Souvent, un roman s’écoute, ses phrases passent de l’œil à l’oreille, où elles résonnent et s’embrasent. Patrick Martinez est un styliste qui possède cet art singulier de la mélodie, à la manière peut-être du pianiste Bil Evans, sa phrase est brillante, classique, raffinée dans le choix des mots, et dans sa composition.