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Recensions

Jésus kill Juliette Eloïse, Jacques Cauda (par Patryck Froissart)

Ecrit par Patryck Froissart , le Jeudi, 17 Février 2022. , dans Recensions, Les Livres, La Une Livres, Poésie, Editions Douro

Jésus kill Juliette Eloïse, Editions Douro, juillet 2021, 80 pages, 15 € . Ecrivain(s): Jacques Cauda

 

Jacques Cauda est un créateur étonnant et détonnant, un poly-artiste foisonnant, intarissable, ubique et unique, écrivain, peintre, illustrateur, directeur de collection chez Douro, omniprésent sur les réseaux sociaux, jouant la provocation à tire-larigot, ce qui n’est assurément pas pour déplaire en cette époque où la bienséance et son corollaire la biendisance sont de plus en plus d’âcre rigueur avec pour conséquences immédiates les levées récurrentes d’étendards d’une morale archaïque, les accusations de blasphème et l’instauration insidieuse de l’autocensure.

Dans le présent ouvrage au titre énigmatique, le personnage narrateur raconte avec la verve truculente qui caractérise l’auteur son histoire avec Juliette, professeure d’anglais et d’autres moyens d’expression. Le prénom Juliette, rencontré récemment en relation intertextuelle explicite avec l’héroïne des Prospérités du Vice dans la recension pour La Cause Littéraire de Moby Dark, autre œuvre décalée de Cauda, semble être iconique chez notre auteur qui multiplie d’ailleurs malicieusement les références littéraires et philosophiques au Divin Marquis.

Hamnet, Maggie O’Farrell (par Marie Duclos)

, le Mardi, 15 Février 2022. , dans Recensions, Les Livres, La Une Livres, Iles britanniques, Roman, Belfond

Hamnet, Maggie O’Farrell, Ed. Belfond, avril 2021, trad. anglais (Irlande) Sarah Tardy, 368 pages, 22,50 € Edition: Belfond

 

Cette œuvre de fiction nous transporte au 16ème siècle dans la famille de Shakespeare dans la campagne anglaise.

Hamnet est le frère jumeau de Judith. C’est une deuxième naissance dans ce foyer un peu insolite mélangeant des histoires de famille complexes avec des personnalités dont la vie et les tourments sont décrits avec détails, force et délicatesse dans un langage poétique malgré la dureté du monde qui les entoure.

La poésie est aussi restituée par le tempérament et les activités d’Agnès, maman des jumeaux et d’une première fille, Susanna. Agnès est l’épouse de Shakespeare qui est plutôt évoqué comme le précepteur de latin, le fils puis le père puis l’écrivain et directeur de troupe à Londres.

Agnès a la connaissance des plantes médicinales et de la nature en général, ce qui occupe ses journées. Elle dispense des soins à ceux qui frappent à sa porte jusqu’au jour où la maladie « pestilentielle » et ses bubons rentre dans la maison et touche les deux jumeaux.

Le Lac de nulle part, Pete Fromm (par Jean-Jacques Bretou)

Ecrit par Jean-Jacques Bretou , le Lundi, 14 Février 2022. , dans Recensions, Les Livres, La Une Livres, USA, Roman, Gallmeister

Le Lac de nulle part, janvier 2022, trad. américain, Juliane Nivelt, 448 pages, 24,60 € . Ecrivain(s): Pete Fromm Edition: Gallmeister

 

C’est un retour vers le passé que Bill, vieillissant, propose à ses enfants, désormais adultes. Un dernier voyage aux pays des lacs canadiens en Ontario, le Parc Provincial Quetico, ses 400.000 km2 et ses deux milles lacs. Alors qu’ils étaient encore enfants et que Bill n’était pas divorcé, les jumeaux Al et Trig (Algèbre et Trigonométrie), de la famille Mathématiques, avaient l’habitude de ces longues randonnées en canoë et des campements sauvages. Désormais Al vit à Denver et Trig en Californie (précisément dans sa voiture depuis qu’il s’est fait renvoyer de son emploi). Bill est divorcé de son épouse Dory. Alors pourquoi renoncer à revoir ce père, à revivre les souvenirs d’antan ? Nous sommes fin octobre, la saison se termine, rendez-vous est donc donné à Minneapolis dans le Minnesota avant de rejoindre International Falls, la ville frontière, en avion.

Notre petit monde se retrouve à l’aéroport de Minneapolis mais Bill qui était là le premier semble ailleurs, il avoue même avoir égaré les bagages. Alors on bouleverse les plans, on rachète des équipements, nourriture déshydratée comprise, on loue une Jeep Cherokee rouge, le voyage jusqu’à la base de départ se fera en voiture. On arrime deux canoës sur la Cherokee et c’est parti pour la grande aventure, la dernière en « famille » !

JJ Cale, Bertrand Bouard (par Guy Donikian)

Ecrit par Guy Donikian , le Lundi, 14 Février 2022. , dans Recensions, Les Livres, La Une Livres, Biographie, Le Mot et le Reste

JJ Cale, Bertrand Bouard, janvier 2022, 261 pages, 21 € Edition: Le Mot et le Reste

 

Shades, Grasshopper, Five, Troubadour, des titres d’albums qui rappellent le parcours d’un musicien nord-américain dont la carrière internationale démarre quand un autre guitariste de blues, Eric Clapton, enregistre un des titres de Cale, After Midnight. On se souvient aussi de Cocaïne, enregistré par le « guitar hero », succès mondial, écrit également par JJ Cale.

S’il naît à Oklahoma City le 5 décembre 1938, c’est à Tulsa que John Weldon Cale grandit, où ses parents déménagent en 1943. C’est dans cette ville, qui prospère grâce à la manne pétrolière, que John Weldon Cale aura ses premiers émois musicaux, en écoutant Bob Wills, Jimmy Reed, Hank Williams, et le gospel aura aussi influencé Cale. C’est aussi à Tulsa qu’il joue au sein des Rockets, adolescent qui refuse déjà les feux de la rampe, mais qui s’aperçoit du travail immense qu’il doit accomplir pour jouer véritablement de la guitare. « Ce mélange d’influences noires et blanches – country, jazz, rhythm’n’blues… – sera l’une des caractéristiques des créateurs de ce qui sera désigné des années plus tard sous l’appellation de Tulsa sound et dont JJ Cale sera l’une des figures les plus en vue ».

La péremption, Lionel Fondeville (par Philippe Thireau)

Ecrit par Philippe Thireau , le Vendredi, 11 Février 2022. , dans Recensions, Les Livres, La Une Livres, Tinbad

La péremption, Lionel Fondeville, avril 2021, 162 pages, 18 € Edition: Tinbad

Une fulgurante immersion dans la mer des mots désossés : le livre univers de Lionel Fondeville, La péremption, paru chez Tinbad, est bien dans la ligne de l’éditeur de littérature expérimentale. Il en est même le parangon, me semble-t-il. On nomme Tzara, Barthes dans la note de diffusion de l’éditeur pour exprimer ce que ces deux auteurs ont apporté à la littérature en la démembrant et pointer la filiation de Fondeville, pratiquant le segment, la découpe littéraire à l’étal, au couteau. Lionel Fondeville, en bon deleuzien, assigne à la littérature le postulat de « libérer la vie là où elle est prisonnière » – comme l’écrit Deleuze dans Questions de philosophie.

Le quotidien de l’auteur est renvoyé salement avant les origines ; rien n’exige que le réel n’entame la foi dans le non-roman. La vie n’est pas un roman, l’écriture ne peut donc l’être. L’écriture doit se résoudre à se défaire des plans établis en utilisant la pensée rhizomique ; dans le temps où elle se délite, elle devient de moins en moins roman et de plus en plus éclat philosophique. De la critique des situations réelles dans les interstices des mots, dans l’amalgame des mots, advient la liberté totale de penser « autre », c’est-à-dire soi-même hors conventions sociétales. Il s’agit pour Fondeville de « rejouer la scène sans l’avoir apprise par cœur, mais l’ayant apprise mieux que par cœur, par corps… ».