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Japon

Durarara !! (tome 1), Narita Ryohgo

Ecrit par Priscila Selva , le Vendredi, 10 Mars 2017. , dans Japon, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Roman

Durarara !! (tome 1), éd. Ofelbe, octobre 2016, trad. du japonais Nicolas Gouraud, 276 pages, 12,99 € . Ecrivain(s): Ryohgo Narita

 

Légendes urbaines, gangs, gens étranges et une motarde sans tête qui revient sans cesse : voilà tout simplement ce qui fait le charme quotidien du quartier de Ikebukuro à Tokyo. Sous les apparences d’un roman au prime abord un poil décalé tant le genre est particulier, Durarara !! se révèle être en réalité à mesure des pages qui s’envolent une aventure hors norme dans un Tokyo tout aussi délirant que inquiétant.

Il faut constater la première force de ce roman : Durarara !! n’est pas un livre pour la jeunesse qui s’embarrasse de douceurs sirupeuses et de petites histoires plates qui respectent la bienséance, c’est un roman exigeant et dépaysant qui s’attache à proposer une aventure étrange qui ne ressemble en rien à ce que l’on peut lire habituellement. Certes le synopsis de base ne surprend guère – un jeune garçon banal en soif d’aventures qui pourraient pimenter son quotidien – pour un roman que nous devinons facilement être d’apprentissage (le light novel grandissant avec son public au fur et à mesure de la publication des tomes).

Cristallisation secrète, Yôko Ogawa

Ecrit par Marc Ossorguine , le Vendredi, 17 Juin 2016. , dans Japon, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Roman, Actes Sud

Cristallisation secrète (in Œuvres-II), (Hisoyaka na kessho, 1994), trad. japonais Rose-Marie Makino-Fayolle, 1376 pages, 29 € . Ecrivain(s): Yoko Ogawa Edition: Actes Sud

 

L’écriture de Yôko Ogawa offre une caractéristique assez rare, celle de transmettre ou faire mûrir une paix et une tranquillité chez le lecteur que l’on trouve rarement, même dans les plus grandes œuvres. Cela ne veut pas dire qu’elle ne sait pas en même temps nous questionner et, assez paradoxalement, nous « inquiéter ». C’est particulièrement le cas avec ce récit publié pour la première fois en 1994. Un récit qui est par ailleurs double : la narratrice qui est le personnage central écrivant elle aussi des romans, un roman en particulier dans le temps de ce récit.

Nous sommes sur une île où, l’une après l’autre, les choses disparaissent. Ensuite, elles sont, ou plutôt elles doivent être oubliées. La police secrète veille d’ailleurs à ce que les choses oubliées disparaissent bien et pourchassent par ailleurs ceux qui ne parviennent pas à oublier ou s’y refusent. Ce sont alors eux qui disparaissent. On retrouve là quelque chose qui peut rappeler les anticipations inquiétantes d’un George Orwell (1984) ou d’un Ray Bradbury (Farenheit 451), voire, sur un autre registre, de Michael Ende (L’histoire sans fin).

Le Démon de l’île solitaire, Edogawa Ranpo

Ecrit par Cathy Garcia , le Lundi, 09 Novembre 2015. , dans Japon, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Roman, Wombat

Le Démon de l’île solitaire, mai 2015, trad. japonais par Miyako Slocombe, 320 pages, 23 € . Ecrivain(s): Edogawa Ranpo Edition: Wombat

 

Un vrai régal ce roman, vraiment surprenant, un polar frisson d’une grande classe, au style limpide et très agréable à lire, qui parut d’abord en feuilleton dans les années 1929-1930 et qui n’a pas pris une ride, grâce peut-être aussi à une excellente traduction. On se laisse en tout cas très facilement happé par un suspense en tension permanente, avec un plaisir d’enfant, chaque énigme résolue ouvrant la porte à de nouveaux mystères. Minoura, le narrateur, est entraîné malgré lui dans cette histoire rocambolesque qui fera de lui un détective autodidacte, en tombant follement amoureux de celle qui sera la première victime d’un tueur énigmatique et ceci dans une chambre close, rappelant Le mystère de la chambre jaune.

Enquête, aventure, chasse au trésor et épouvante, le démon de l’île solitaire est un subtil mélange d’ambiances noires et romantiques, qui rappellent effectivement tout à la fois Conan Doyle, l’île du Docteur Moreau et Edgard Poe, le tout à la sauce japonaise. C’est tout à fait volontaire de la part de l’auteur, de son vrai nom Tarô Hirai, dont le pseudonyme fait référence justement à Edgard Poe. L’auteur aborde ici des sujets sensibles centrés sur le corps, comme la monstruosité, l’handicap physique, le rejet et l’homosexualité.

La Maison au toit rouge, Kyoko Nakajima

Ecrit par Stéphane Bret , le Mardi, 21 Avril 2015. , dans Japon, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Roman, Seuil

La Maison au toit rouge, traduit du japonais par Sophie Refle, mars 2015, 301 pages, 21 € . Ecrivain(s): Kyoko Nakajima Edition: Seuil

 

Une dame d’âge respectable, Taki, rédige pour son neveu les souvenirs de ses années de service passées dans la famille Hirai, un foyer de la bourgeoisie tokyoïte. Le maître de maison est sous-directeur d’une entreprise de jouets, passablement prospère. Il a fait construire récemment une maison à Tokyo pour son épouse, Tokiko, et le fils de celle-ci. Tout le récit du roman de Kyoko Nakajima est articulé autour du basculement incessant entre deux époques, celle des années 30 du Japon de l’entre deux-guerres, conquérant, impérialiste, mais où il fait bon vivre, où les mœurs sont stables, confinent à l’immobilité ; et le Japon des années soixante, celui de la croissance économique, d’une entrée dans le monde occidental, au moins en apparence…

Ainsi, la narratrice souligne-t-elle le temps que les maîtresses de maisons dignes de ce nom devaient passer à préparer le nouvel an, à peaufiner la préparation des mets, à la visite systématique de tous les voisins… Tâches perçues pourtant par Taki comme nobles, valorisantes. Dans le domaine de la perception de l’histoire de son pays, Taki, peut-être à l’instar d’une grande majorité de ses compatriotes, revisite l’histoire de son pays d’une manière surprenante, qu’un observateur contemporain pourrait aisément qualifier de révisionniste. Le fils de son neveu, Takeshi, lui fait remarquer que le Japon faisait déjà la guerre en 1936 :

Petits oiseaux, Yôko Ogawa (2ème article)

Ecrit par Marc Michiels (Le Mot et la Chose) , le Mercredi, 28 Janvier 2015. , dans Japon, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Roman, Actes Sud

Petits oiseaux, traduit du japonais par Rose-Marie Makino-Fayolle, septembre 2014, 272 pages, 21,80 € . Ecrivain(s): Yoko Ogawa Edition: Actes Sud

 

« Tous les chants d’oiseaux sont des chants d’amour ».

Dans son dernier ouvrage paru aux éditions Actes Sud, Yôko Ogawa pose la question : qu’est-ce qu’être soi dans l’insécurité sociale et familiale si la parole n’existe pas en tant que lien de sociabilité ?

Comment vivre, se construire si les racines de l’affiliation sont rompues ? La transparence aux êtres y serait-elle liée, si l’autre n’existe pas ? Dans Petits oiseaux, l’écriture est un monde en forme de cage qui offre néanmoins une part à la liberté qui nous convient, faisant de chacun de nous des oiseaux, sifflant des chants d’amour que personne n’entend mais que l’on comprend parfois, au travers de nos propres illusions… Il faut alors fusionner l’espace du silence et du temps de l’écoute (ou de la lecture !) pour retrouver peu à peu les mots oubliés dans l’espace de la psyché ; enjeu même de la distance toute japonisante du vivre ensemble et d’une double identification aux fonctions multiples, interrogeant l’acte de penser l’écriture, en tant que création d’une vision à la Max Ernst, du type Loplop présente :