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Critiques

Suite orphique, François Cheng (par Nicolas Grenier)

Ecrit par Nicolas Grenier , le Mercredi, 09 Octobre 2024. , dans Critiques, Les Livres, La Une Livres, Poésie, Gallimard

Suite orphique, François Cheng, Éditons Gallimard, mars 2024, 160 pages, 17,50 € . Ecrivain(s): François Cheng Edition: Gallimard

 

Orphique philosophique

François Cheng livre, à l’automne de sa vie, une suite orphique de quatre-vingt-dix-neuf quatrains. Pour cette quête spirituelle, l’académicien se place dans la continuité d’Omar Khayyâm, et à plus forte raison la poésie chinoise classique. Sous la protection de sa mère, il revisite le mythe d’Orphée, fils d’Apollon, à la lumière de la pensée chrétienne et taoïste.

Dans un style simple, fluide, limpide qui se manifeste à travers des vers blancs, irréguliers, courts ou longs, parfois rimés, le poète français d’origine chinoise offre une méditation métaphysique sur la mort, l’amour, la beauté, l’existence, ainsi que l’univers. François Cheng emploie une des formes poétiques les plus brèves pour explorer les plus grandes questions de l’humanité. Dans cette condition humaine, marquée par le sceau de la catastrophe, il décoche une philosophie de vie, à travers le quatrain 54 :

Spinoza Code, Mériam Korichi (par Gilles Banderier)

Ecrit par Gilles Banderier , le Mardi, 08 Octobre 2024. , dans Critiques, Les Livres, La Une Livres, Roman, Grasset

Spinoza Code, Mériam Korichi, Grasset, mars 2024, 240 pages, 19,50 € Edition: Grasset

 

À l’article « Code », le dictionnaire de Littré renvoie à l’ensemble des recueils de lois portant les noms d’empereurs romains (Théodose, Justinien) et, pour l’étymologie, au latin codex, « proprement tablette à écrire ». C’est plus ou moins ce dont il s’agit et, consciemment ou non, Mériam Korichi prend le contre-pied de toutes les histoires de manuscrits retrouvés dans les endroits les plus improbables, qui peuplent le genre romanesque (on pense ainsi au Nom de la Rose). Commençons par dire ce que ce livre n’est pas : le Spinoza Code n’a rien à voir avec le Da Vinci Code et les élucubrations afférentes, parce que le codex, le volume manuscrit en question existe bel et bien à la bibliothèque du Vatican (dont le catalogue, subdivisé en une multitude de fondi, est notoirement d’une complexité inégalée) : il s’agit du manuscrit Vat. Lat. 12838 (désormais numérisé et consultable en ligne), un manuscrit assez modeste et oublié pendant des siècles, qui présente la particularité d’avoir été copié, non sur les Opera posthuma de Spinoza parues en 1677, mais sur le manuscrit original (qui fut probablement détruit par l’imprimeur une fois son travail achevé, suivant la pratique courante de l’époque, aussi choquante nous paraisse-t-elle).

Que du vent, Yves Ravey (par Gilles Cervera)

Ecrit par Gilles Cervera , le Lundi, 07 Octobre 2024. , dans Critiques, Les Livres, La Une Livres, Les éditions de Minuit

Que du vent, Yves Ravey, Les Éditions de Minuit, août 2024, 123 pages, 17 € Edition: Les éditions de Minuit

 

Le goût de l’insipide

L’art du titre selon Yves Ravey.

Nous avions commencé à lire Ravey avec le pur, synthétique et extrême Le Drap. Beau titre pour débuter la lecture d’un auteur dont on ne se lasse pas depuis des décennies. Livre après livre, tous les deux ans, Ravey nous ravit.

Ce titre Que du vent, d’aujourd’hui, excelle par son exactitude scientifique et non météorologique. Rien ne souffle sur cette histoire hormis l’ennui des lotissements, la platitude des sentiments, les piscines nulles à pleurer creusées entre deux entrepôts où notamment du commerce hasardeux de discount lessiviel venu d’Afrique.

Patient X, Le dossier Ryūnosuke Akutagawa, David Peace (par Léon-Marc Levy)

Ecrit par Léon-Marc Levy , le Jeudi, 03 Octobre 2024. , dans Critiques, Les Livres, La Une Livres, Iles britanniques, Roman, En Vitrine, Rivages, Cette semaine

Patient X, Le dossier Ryūnosuke Akutagawa, David Peace, Rivages, octobre 2024, trad. anglais, Jean-Paul Gratias, 366 pages, 24 € . Ecrivain(s): David Peace Edition: Rivages

 

David Peace n’a jamais rien fait comme tout le monde. Ses terrifiants « polars » étaient un véritable laboratoire littéraire dans lequel il dynamitait toutes les règles du genre, les contraignant à des pages sombres et souvent absconses, d’une poésie admirable. Ses célébrations du football étaient des exercices de style dont les échos – Li-ver-pool – Li-ver-pool – ne finiront jamais de résonner à nos oreilles.

Avec Patient X, Peace s’attache à présenter une sorte de biographie d’un écrivain japonais célèbre auquel il voue un véritable culte, Ryūnosuke Akutagawa. Une fois cela dit, il faut se précipiter à préciser que l’ouvrage ne ressemble à aucune biographie jamais éditée. L’intimité de Peace avec son modèle tisse une sorte de patchwork fait de passages romancés de la vie de l’auteur (vérité ? Fiction ? la magie romanesque prend en charge la question), d’articles de journaux d’époque, d’extraits de paroles de l’écrivain. La tresse entière est une résurrection de Ryūnosuke, une biographie partielle, partiale, totalement subjective.

Monsieur de Bougrelon, Jean Lorrain (par Patrick Abraham)

Ecrit par Patrick Abraham , le Mercredi, 02 Octobre 2024. , dans Critiques, Les Livres, La Une Livres, Roman

Monsieur de Bougrelon, Jean Lorrain, éditions Le Chat Rouge, 2014, 222 pages, 20 €

 

Selon Dominique Fernandez (Dictionnaire amoureux de Stendhal, Plon, 2013), le nouveau Stendhal Club ne compte à ce jour et ne comptera jamais que douze membres. Si par caprice je fondais un Lorrain Club, combien d’adhérents pourrais-je espérer ? Cinq ou six, tout au plus ? Lorrain, pourtant, n’est pas si oublié qu’on pourrait le supposer : une monumentale biographie par Thibaut d’Anthonay, somme d’érudition prodigieuse (J.L., Miroir de la Belle Époque, Fayard, 2003, 986 pages), et de constantes rééditions en témoignent : telle celle de Monsieur de Bougrelon par Le Chat Rouge en 2014 (parution initiale en 1897 comme pour Les Nourritures terrestres de Gide : coïncidence anodine ?).

S’agit-il de son meilleur roman ?