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Critiques

Paris, je t’aime !, Colette (par François Baillon)

Ecrit par François Baillon , le Lundi, 10 Mars 2025. , dans Critiques, Les Livres, La Une Livres, Récits

Paris, je t’aime !, Colette, Éditions de L’Herne, 2023, 160 pages, 14 € . Ecrivain(s): Colette

 

Ce recueil de textes de Colette, parfois inédits, se découpe en deux sections : Paris, je t’aime !, et J’aime être gourmande, qui ont fait l’objet d’éditions séparées auparavant. Réunis par Gérard Bonal (décédé en 2022) et Frédéric Maget, il reprend parfois des articles où la célèbre écrivaine s’adressait aux lectrices de Marie-Claire. Et il est à noter que, même dans ce type d’exercice – que l’on pourrait considérer de second ordre –, on retrouve dès les premières lignes la signature inimitable du ton et du style de Colette.

En vérité, bien des thèmes chers à son œuvre se rassemblent dans ce recueil : la présence magnétique des animaux, avec « La “Chatte”, celle qui n’a pas voulu d’autre nom », dont elle fait un personnage à part entière, si ce n’est un Sphinx, compagne à la fois calme et déterminée, hautement mystérieuse, sans que l’auteure ne se départisse de l’émotion éprouvée lors de leur rencontre, très singulière, ou lorsqu’elle porte attention à son étrange langueur, à l’approche d’une ultime étape…

Un garçon d’après-guerre, Jean-Luc Marty (par Philippe Chauché)

Ecrit par Philippe Chauché , le Vendredi, 07 Mars 2025. , dans Critiques, Les Livres, La Une Livres, Roman, En Vitrine, Cette semaine

Un garçon d’après-guerre, Jean-Luc Marty, Mialet-Barrault Editeurs, janvier 2025, 320 pages, 21 € . Ecrivain(s): Jean-Luc Marty

 

« Le temps restitué par Henri D. renvoie à un garçon d’à peine dix-sept ans incroyablement courageux. Le mien, à un homme que le corps insatiable, le goût pour les marges viriles, les multiples disparitions et l’impuissance au récit absentaient de toute présence familiale ».

Un garçon d’après-guerre est un roman du temps restitué par la mémoire, la photo, la parole, il conjugue tout cela avec une force rare dans l’art français du roman. Le narrateur est photographe, photojournaliste, il cherche le juste équilibre entre deux guerres larvées, la famine et le spectre du terrorisme islamiste qui ravage notamment l’Afrique. C’est à l’occasion d’une exposition de ses photographies à Angoulême, que la machine romanesque à remonter le temps va se mettre en marche, et par la magie blanche du roman, le restituer.

Gens de couleur, Henry Louis Gates Jr. (par Yasmina Mahdi)

Ecrit par Yasmina Mahdi , le Vendredi, 07 Mars 2025. , dans Critiques, Les Livres, La Une Livres, USA, Roman

Gens de couleur, Henry Louis Gates Jr., Les Éditions du Canoë, septembre 2024, trad. anglais (États-Unis), Isabelle Leymarie, 368 pages, 24 €

 

Un enfant noir du Comté de Mineral

Gens de couleur est le récit de l’enfant « noir » que fut Henry Louis Gates Jr. (lauréat du Heartland Award du journal Chicago Tribune et du Prix Lilian Smith pour ce livre). Gates grandit à l’époque de la ségrégation raciale aux États-Unis, et se sent, lui et les siens, « comme si nous étions des bateaux se croisant dans une mer de gens blancs ». La couleur de peau est et reste un déterminisme pour celles et ceux porteurs de la couleur noire, catégorisés, figés et abandonnés à une communauté, refoulés tels des parias, et pire, assimilés à une « race ». Ici, le « colored boy » commence son existence à Piedmont, en Virginie-Occidentale, « ville industrielle sur le déclin typique, avec une infrastructure qui se délite et des habitants résignés à sa lente agonie [pourtant au] passé fier et brillant (…) ; ville d’immigrants. Le Piedmont blanc était italien et irlandais, avec une poignée de riches Anglo-Saxons à East Hampshire Street, et, partout ailleurs, des quartiers “ethniques” de gens de classe ouvrière, de couleur et blancs ».

La Lettre Écarlate (The Scarlet Letter, 1850), Nathaniel Hawthorne (par Léon-Marc Levy)

Ecrit par Léon-Marc Levy , le Mercredi, 05 Mars 2025. , dans Critiques, Les Livres, La Une Livres, USA, Roman, Folio (Gallimard), En Vitrine, Cette semaine

La Lettre Écarlate (The Scarlet Letter, 1850), Nathaniel Hawthorne, Folio, 1977, trad. américain, Marie Canavaggia, 368 pages Edition: Folio (Gallimard)

Écarlate est ce roman, comme la braise qui scintille dans les yeux de la mère sous l’opprobre, et ceux de la fille dont on ne sait si elle est fille de Dieu ou du Diable. Cet ouvrage brûle les doigts et ouvre la route qui mène au torrent de lave incandescente qui irrigue la littérature gothique américaine. Ce roman est un moment-clé de la littérature d’Outre-Atlantique qu’il place à tout jamais sous le thème du combat du Bien et du Mal, du péché et du remords, du châtiment et de la rédemption.

Le génie de Hawthorne est de brouiller sans cesse les lignes, d’éviter radicalement le pathos de la lutte entre le Bien et le Mal pour nous emmener dans des territoires effrayants où la morale ne trouve plus ses repères. La tentation est forte de prêter aux Puritains inquisiteurs les pires penchants mais jamais dans le roman ils ne seront les seuls acteurs du Mal, de même que la femme qui subit l’infamie de la lettre écarlate ne sera – ni elle ni sa petite fille – l’incarnation pure du Bien. Les traits se mêlent, s’entortillent, en un combat douteux dirait Steinbeck, allant jusqu’à superposer les images symboles. Ainsi la madone qui prend forme dans la femme honnie et exposée à la vue d’un public hostile :

Le Livre de la mort, Khalid Jawed (par Patrick Abraham)

Ecrit par Patrick Abraham , le Mardi, 04 Mars 2025. , dans Critiques, Les Livres, La Une Livres, Asie, Roman, En Vitrine, Cette semaine

Le Livre de la mort, Khalid Jawed, éditions Banyan, décembre 2024, trad. ourdou (Inde), Rosine-Alice Vuille, 127 pages, 17 €


La publication par les éditions Banyan du Livre de la mort de l’écrivain indien contemporain Khalid Jawed est une excellente nouvelle tant sont rares les traductions françaises de la littérature de langue ourdoue, continent quasi inexploré pour nous. On félicitera David Aimé pour cette initiative et Rosine-Alice Vuille pour la remarquable qualité de son travail.

Mais Le Livre de la mort, malgré sa brièveté, est en soi un grand livre par sa densité ténébreuse – je veux dire qui marque dès la première lecture en nous ouvrant sur nos ténèbres et nous obligeant à une série de relectures.